Je m'exprimerai un peu longuement en détaillant quelques points, mais cela nous fera gagner du temps dans la présentation de quatre amendements à venir, portant sur des contributions du secteur, que nous avons déposés.
Premièrement, c'est une bonne chose que la taxe Chirac ait produit ses effets au bénéfice de la solidarité ; nous ne parlons bien que du surplus, donc des 30 millions d'euros.
Deuxièmement, parmi ceux qui émettent des gaz à effet de serre, le secteur aérien est celui qui connaît la plus forte dynamique ; il double sa contribution tous les quinze ans. Selon le mode de calcul retenu, il représente entre 3 % et 5 % des émissions. C'est un vrai problème, sachant qu'en 2050, la moitié des consommations d'énergie pourrait servir uniquement à faire voler des avions.
C'est par ailleurs le seul secteur pour lequel, aujourd'hui, on ne dispose pas de toutes les technologies nécessaires à la sortie du carbone, à la grande différence des autres, notamment du secteur automobile. À cet égard, le transport aérien nous pose un vrai et gros problème.
J'ai été assez choqué de voir aujourd'hui même, sur le site internet du ministère de l'écologie, l'indicateur mensuel du trafic aérien commercial et un texte pour se féliciter de la progression du secteur, le grand gagnant étant le trafic intérieur qui augmente de plus de 10 %. Je ne suis pas sûr que ce soit aussi génial que cela… Nous devons changer notre communication sur ces sujets ; en tout cas, si nous pouvons nous en satisfaire sur le plan économique, il faut prendre l'habitude de rappeler l'impact particulièrement important du transport aérien sur le climat.
Je pense que l'amendement de la rapporteure qui affecte le surplus de la taxe Chirac à l'AFITF va dans le bon sens. C'est un premier pas, mais comme notre collègue M. Christophe Bouillon l'a dit, nous devons absolument aller plus loin. Peut-être ce surplus de taxe Chirac pourrait-il devenir dynamique, peut-être pourrions-nous le faire progressivement évoluer, comme le sénateur M. Ronan Dantec l'avait proposé, en jouant sur par exemple sur les prix du CO2 ?
En tout état de cause, nous pouvons dès aujourd'hui faire un premier pas avec l'affectation de ce surplus de 30 millions d'euros, et continuer dans les années à venir.
Mais d'autres solutions existent aussi ; c'est le sens des quatre amendements que nous proposerons, mais qui viendront beaucoup plus tard dans l'examen du texte. Pourquoi ne pas augmenter le montant de cette taxe Chirac et en affecter le différentiel au financement de l'AFITF ? Pourquoi ne pas mettre en place une sorte de contribution écologique au décollage, comme les Suédois viennent de le faire, avec des résultats remarquables : moins 6 % sur les vols intérieurs au premier trimestre et plus 10 % sur les voyages en train pour la même période ? Il doit être possible de créer des contributions écologiques au décollage sans nous voir opposer tous les arguments habituels, en tout cas sur les destinations pour lesquelles il existe une alternative train. Nous aurions ainsi le compromis des compromis et nous échapperions aux arguments que l'on nous rabâche à chaque fois, celui de l'avion qui ira faire son plein de kérosène ailleurs, etc.…
Évidemment, ce genre de combat se mène plus facilement et normalement sur le plan européen, mais il doit être possible, d'ici à la séance, de trouver un compromis. On peut entendre que la France veuille porter ce sujet au niveau européen en premier lieu, car c'est sans doute le bon. Mais pourquoi ne pas inscrire dans la loi, et je le proposerai avant la séance publique, que si d'ici à deux ans, aucun accord européen n'est trouvé sur la juste contribution du transport aérien, une contribution sera mise en place au niveau français ? Nous pourrons ainsi combiner l'ambition européenne avec la mise en cohérence de l'action nationale : c'est important en termes de crédibilité, y compris en Europe.