Toutes les personnes rencontrées dans le cadre des auditions ont souhaité que les pouvoirs publics tracent des perspectives claires, lisibles et durables en ce qui concerne la transition énergétique dans les transports. C'est cette prévisibilité qui permet aux secteurs concernés d'investir dans la durée, à nos chercheurs de travailler aux évolutions technologiques dans un environnement stable et à nos concitoyens de s'habituer progressivement à de nouvelles perspectives. Donner une telle vision de moyen et de long termes, tel est précisément l'objet d'une loi d'orientation.
L'amendement CD3032 propose d'inscrire dans la loi l'objectif de long terme, à échéance 2050, de décarbonation complète du secteur des transports terrestres. C'est un objectif très ambitieux, mais nécessaire. Il est cohérent avec le projet de programmation pluriannuelle de l'énergie et nécessaire pour parvenir à la neutralité carbone à cette date, conformément à l'ambition du Gouvernement.
Pour atteindre cet objectif et pouvoir se projeter à cette échéance, il est indispensable de fixer des objectifs intermédiaires qui constituent autant de points de passage. Mon amendement en propose deux qui impliquent des évolutions profondes de secteurs entiers d'activité : d'une part, la montée en puissance des véhicules à faibles et très faibles émissions à échéance 2030, dans la continuité des objectifs fixés au niveau européen, qui prévoient des dispositifs d'amende pour les constructeurs qui ne respecteraient pas leurs obligations ; d'autre part, la fin de la vente de tous les véhicules particuliers et utilitaires légers neufs utilisant de l'énergie fossile – essence, diesel et gaz naturel – au plus tard en 2040, en cohérence avec le Plan Climat qui a été présenté en juillet 2017. Si plusieurs pays européens se sont déjà positionnés en ce sens, la France serait le premier à inscrire cet objectif dans la loi.
Les véhicules utilisant de l'énergie fossile représentent aujourd'hui 93,6 % des ventes de véhicules neufs, ce à quoi il faut ajouter 4,9 % de véhicules hybrides. C'est dire à quel point l'objectif de sortie des énergies fossiles pour le transport terrestre dans les 20 ans qui viennent est ambitieux. C'est néanmoins possible et nécessaire, ainsi que le montrent notamment les prévisions des constructeurs, qui envisagent la fin des ventes de véhicules exclusivement diesel et essence au début des années 2030.
Afin de confirmer à échéances régulières que la trajectoire est respectée, je propose de confier à l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), instance commune aux deux chambres, le soin de rédiger un rapport d'évaluation tenant compte des évolutions technologiques observées. Ce dispositif est analogue à celui qui est prévu dans le cadre de la loi de bioéthique. La publication de ce rapport tous les cinq ans permettra la tenue d'un vaste débat au Parlement. Le fait de confier cette évaluation au Parlement contribuera également à renforcer le rôle d'évaluation des politiques publiques que ce dernier détient sur le fondement de l'article 24 de la Constitution.
Je vous invite vraiment à suivre d'une manière régulière les travaux de l'OPECST – et ce n'est parce que j'en suis membre que j'en parle. Cet office est composé de dix-huit sénateurs et de dix-huit députés qui suivent de près des sujets de tous ordres, allant de l'intelligence artificielle à l'huile de palme en passant par la rénovation thermique des bâtiments et les lanceurs. N'hésitez pas à consulter ces travaux qui sont très importants. L'OPECST, dont le vice-président est M. Cédric Villani, est encore méconnu.
L'amendement CD3032 fixe une trajectoire pour 2030, 2040 et 2050 : c'est maintenant à nous de jouer.