Intervention de Ludovic Mendes

Réunion du mercredi 15 mai 2019 à 9h30
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLudovic Mendes :

Je salue la qualité du travail initial d'Olga Givernet, que la commission des affaires européennes a peu modifié. Je voudrais reprendre rapidement quelques grandes lignes de la proposition de résolution.

La première chose à souligner, c'est qu'elle s'inscrit dans un contexte particulier tenant à la nouvelle architecture de la politique commerciale européenne. En effet, le jour même où le Conseil a adopté les mandats de négociation, le 22 mai 2018, il a aussi validé une nouvelle architecture qui scinde désormais les accords commerciaux en deux, simultanément négociés ou non : un accord de libre-échange portant sur l'ensemble des matières relevant de la compétence exclusive de l'Union européenne ; un accord de protection des investissements incluant en particulier un mécanisme de règlement des différends entre l'État et les investisseurs. Relevant de la compétence partagée, ce dernier seul exigera l'unanimité au Conseil ainsi qu'une ratification par l'ensemble des États-membres.

Or, les négociations commerciales avec l'Australie et la Nouvelle-Zélande ne portent que sur des matières relevant de la compétence exclusive de l'Union européenne. Par conséquent, les futurs accords seront adoptés à la majorité qualifiée au Conseil et les parlements nationaux, à commencer par le Parlement français, ne pourront pas se prononcer sur le résultat des négociations commerciales avec l'Australie et la Nouvelle-Zélande.

Cette nouvelle architecture de la politique commerciale européenne, si elle vise à améliorer l'efficacité et la rapidité de sa mise en oeuvre, affaiblit le contrôle démocratique dont elle fait l'objet de la part des parlements nationaux. Il appartient donc à ces derniers d'en tirer les conséquences et de se saisir le plus tôt possible des négociations commerciales. C'est pourquoi, même si elle est justifiée du point de vue du contrôle démocratique de la politique commerciale, on peut regretter que cette proposition de résolution européenne arrive si tardivement, près d'un an après l'adoption des mandats de négociation par le Conseil.

Sur le fond, sans faire une présentation alinéa par alinéa de la proposition de résolution, celle-ci est structurée autour de trois axes forts.

Le premier est le soutien aux intérêts offensifs et défensifs de l'Union européenne. La proposition de résolution met l'accent sur le fait que la viande et le sucre sont des produits sensibles qui devront, le cas échéant, faire l'objet de quotas d'importation adaptés et de mesures de sauvegarde efficaces. Elle met aussi l'accent sur l'importance des indications géographiques protégées (IGP) européennes ; il faut rappeler qu'un tiers des IGP de l'Union européenne sont des IGP françaises. Elle soutient par ailleurs les intérêts européens en matière de protection de la propriété intellectuelle et d'ouverture réciproque des marchés publics, ce qui avait très bien fonctionné avec le Canada par exemple.

Deuxième axe, le rappel de l'importance de la prise en compte du développement durable dans ces négociations commerciales, à travers plusieurs dispositions : l'association des ministères européens chargés de l'environnement aux négociations commerciales ; l'inscription du respect de l'Accord de Paris comme clause essentielle des accords de libre-échange, dont la violation doit entraîner systématiquement la suspension de l'accord ; le soutien à la proposition du Président de la République de promouvoir une taxe-carbone aux frontières de l'Union européenne ; l'exigence de normes élevées en matière de bien-être animal. Le développement durable ne se limite pas à la seule protection de l'environnement. Il concerne également les droits sociaux, notamment en matière d'emploi et de travail. C'est pourquoi la proposition de résolution demande à ce que les négociations incluent la ratification des conventions fondamentales de l'Organisation internationale du travail (OIT), et plus particulièrement la convention n° 138 sur l'âge minimum d'admission au travail et à l'emploi et la convention n° 87 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical.

Dernier axe, l'appel à plus de transparence dans les négociations, une plus grande publicité des résultats et une meilleure association des parlements nationaux et des différentes parties prenantes. C'est ainsi que la proposition de résolution salue les efforts de la Commission européenne en matière de transparence, tout en l'encourageant à améliorer les mécanismes de consultation des parties prenantes, des citoyens et des parlements nationaux, ainsi que la traduction en français des documents essentiels. Par ailleurs, au-delà des négociations elles-mêmes, il est demandé à ce que leurs résultats soient mieux valorisés auprès des citoyens européens et des entreprises.

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