Intervention de Valérie Boyer

Réunion du mercredi 15 mai 2019 à 9h30
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaValérie Boyer :

Après l'accord économique et commercial avec le Canada (CETA) et celui avec le Japon, sans oublier le Mercosur, nous devons aujourd'hui nous prononcer sur des accords de libre-échange avec l'Australie et la Nouvelle-Zélande. Nous avons bien conscience que l'enjeu de ces accords va désormais au-delà du commerce des biens et des services et recouvre aussi les normes sociales et environnementales ainsi que la protection de la sécurité alimentaire.

Nous comprenons tous ici les enjeux mais je souhaiterais néanmoins exprimer ma vive inquiétude. Je ne suis pas députée d'un territoire rural, je suis députée de Marseille, mais à chaque débat que nous avons sur ces accords, que nous accompagnons dans cette commission, y compris le groupe Les Républicains, nous ne pouvons pas ne pas penser à nos agriculteurs. Il est important de rappeler que l'agriculture est une activité hautement stratégique. Je m'interroge constamment sur les bénéfices de ce type d'accords pour nos compatriotes. Notre agriculture en tire-t-elle un bénéfice réel ou simplement théorique ? J'ai l'impression que ce bénéfice ne se voit pas dans les territoires. Nous devons privilégier les intérêts de la France. Dans de tels accords, la politique commerciale de l'Union est le fruit de compromis âprement négociés entre 27 États-membres.

Selon l'étude d'impact préalable à cette négociation, disponible exclusivement en anglais, ce que je regrette, les secteurs de la viande bovine, ovine et des sucres spéciaux sont ceux pour lesquels la hausse des importations depuis l'Australie sera la plus élevée. Les exportations australiennes de viande bovine et ovine seraient multipliées par cinq. Pour la Nouvelle-Zélande, outre les viandes, les produits laitiers et les fruits et légumes sont également concernés dans une moindre proportion. Il faut rappeler que par exemple, selon l'association interprofessionnelle INTERBEV, 66 % de la viande bovine consommée hors domicile, notamment dans la restauration collective, particulièrement dans les cantines scolaires, est importée ; il serait intéressant d'obtenir des chiffres plus précis dans ce domaine. Dans nos campagnes, des personnes de plus en plus désespérées n'arrivent même pas à se payer un SMIC et, accord après accord, les mêmes menaces s'accumulent sur les mêmes filières, déjà fragilisées. Je lisais hier un article sur des paysans français qui sont en train de couper des arbres fruitiers pour qu'on puisse importer des pommes polonaises. On marche un peu sur la tête.

Puisque vous avez évoqué l'Accord de Paris, j'ai du mal à comprendre que dans des filières où nous sommes en excédent, on importe des viandes d'Australie et de Nouvelle-Zélande. Ne pourrait-on pas trouver un peu plus loin ? C'est pour moi de plus en plus un sujet d'incompréhension ; je comprends l'utilité des accords, mais pas l'utilité de tels accords au regard du désespoir de nos agriculteurs et du fait que ce sont des produits pour lesquels nous sommes très largement en excédent et pour lesquels les prix des produits français sont sans arrêt cassés ou sur-subventionnés. Personnellement, je ne voterai pas ce texte.

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