Intervention de Éric Coquerel

Séance en hémicycle du vendredi 7 juin 2019 à 15h00
Mobilités — Après l'article 20

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Coquerel :

Comme vient de le dire mon collègue Lecoq, nous ne rencontrons ni les mêmes syndicats, ni les mêmes personnes. Je me rappelle la réaction, dans les quartiers de ma circonscription, à la fameuse phrase d'Emmanuel Macron, alors candidat, selon laquelle Uber vaut mieux que dealer. Je puis vous assurer que les gens trouvaient cette comparaison très dévalorisante par rapport à leur vision d'un devenir professionnel qui n'est pas forcément lié à la précarité.

Lorsque vous dérégulez complètement le marché du travail et nous dites que ce sont les gens qui le veulent, peut-être y croyez-vous – ce serait d'une naïveté confondante – , mais j'ai plutôt tendance à penser que vous accompagnez cette dérégulation d'un certain cynisme – ce serait toutefois un autre débat.

Madame la ministre, je vous répondrai en deux points. D'abord, vous l'avez compris, je ne crois pas à cette fable. Mais, même si on l'admettait, la société a tout de même des règles. Ainsi, pour des raisons liées à la concurrence entre entreprises, on ne laisse pas faire aux gens tout ce qu'ils veulent au nom de leur liberté. La question du travail du dimanche, par exemple, était un bon thème à aborder à cet égard. De fait, peut-être certains salariés pensent-ils qu'il est bien de travailler le dimanche, notamment parce que c'est mieux payé, mais il n'empêche que, selon notre vision de la société, il est bon qu'il y ait une journée d'arrêt, où les gens ne travaillent pas, sont ensemble et consacrent du temps à leur famille, aux loisirs, au sport, à une association ou à ce qu'ils veulent. C'est un choix de société, pas seulement un choix individuel.

De même, nous défendons une société dans laquelle il existe une protection et des règles sociales, et qui réglemente la subordination du travail. Quoi que vous puissiez nous répondre, en effet, il existe un lien de subordination entre ces plateformes et l'activité des VTC et des livreurs. Cette situation ne correspond pas à la définition d'un travailleur indépendant.

Le problème, c'est que vous avez commencé par déréguler. En faisant fi du grand mécontentement des chauffeurs de taxi, y compris de ceux qui étaient indépendants, vous avez complètement déréglementé leur profession et l'avez ouverte à la concurrence de gens qui coûtaient, de fait, beaucoup moins cher, puisqu'ils ne bénéficiaient en réalité d'aucune prestation sociale ni d'aucune assurance. Et maintenant, vous voulez accompagner légèrement cette évolution en la réglementant un peu. Vous êtes en train de casser tous les systèmes de protection liés à la subordination. Vous proposez un modèle d'ubérisation et je comprends donc très bien qu'au nom de cette logique, vous refusiez cet amendement.

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