Notre calendrier parlementaire force à nous exprimer, sur l'avis du Haut Conseil de la fonction publique, sur un solde structurel, calculé sur un PIB qui n'est pas complètement qualifié. Cette situation quelque peu inconfortable nous impose une certaine réserve dans nos propos, en particulier au regard du déficit structurel, lui aussi quelque peu incertain.
En revanche, le tableau de la page 3 montre une certitude : l'oubli de la recapitalisation d'Areva, 4,5 milliards d'euros sur les opérations ponctuelles et temporaires, dont la neutralisation pèse sur le solde public. D'ailleurs, le Haut Conseil note que si l'on neutralise cette dépense de 4,5 milliards d'euros en 2017, l'effort en dépenses est nul en 2017, au lieu de 0,2 point de PIB, et de 0,2 point en 2018 au lieu de 0,4 point. La croissance de la dépense publique en volume est alors, en 2018, du même ordre que 2017 – 0,9 point – à près de 1 %.
Sur le budget de l'État, le déficit est moindre que prévu par rapport à la loi de finances 2018, grâce certainement à de meilleures recettes – environ 11 milliards d'euros de plus – mais pourtant en hausse par rapport à 2017, contrairement à celui de l'ensemble des administrations publiques. Le déficit de l'État est attendu à 76 milliards d'euros, soit une hausse de 8,3 milliards d'euros par rapport à 2017. C'est la première fois depuis 2014 que le déficit augmente.
S'agissant de la dette, elle a progressé de 70,3 milliards d'euros, plus de 4,2 % entre 2017 et 2018, mais le niveau exceptionnellement bas, heureusement, des taux d'intérêt, a permis à l'État de stabiliser sa charge à 40,5 milliards d'euros.
Je résume : un effort de baisse de dépenses complètement insuffisant, 0,2 point de PIB ; des recettes de l'État qui diminuent de 1,2 milliard d'euros par rapport à 2017, en raison d'une baisse des recettes fiscales – on parle de 13,5 milliards d'euros dus à la suppression de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), à la flat tax et à la prise en charge de la taxe d'habitation ; une forte augmentation du déficit de l'État, de plus de 12 %, supérieure au déficit public ; une dette qui continue de s'envoler.
Même si des évolutions restent à venir sur certains indicateurs, nous avons tout de même une certaine idée du point chute budgétaire ; un point de chute qui est en quelque sorte conforme aux prévisions que sous-entendent vos décisions politiques, prises depuis le début de mandat.
En marge de cet exercice, aujourd'hui quelque peu décalé, je serais plutôt preneur des grandes incertitudes de 2018 qui pèseront fortement sur le budget 2019. Qu'en sera-t-il de l'exonération des 20 % les plus riches sur la taxe d'habitation – un impact de 8 milliards d'euros ? On parle aussi de supprimer des niches fiscales pour financer les réductions d'impôt des classes moyennes ; sur quels critères d'appréciation devons-nous, selon vous, effectuer ces choix ?
Par ailleurs, les mesures prises en fin d'année 2018 et au premier trimestre 2019, suite au mouvement des gilets jaunes, interrogent et même inquiètent. Je ne partage pas complètement l'analyse qui a été faite par notre collègue Charles de Courson, qui a vu dans ces décisions un virage vers des politiques plus keynésiennes, une politique de la demande plus affirmée sur différentes mesures de pouvoir d'achat et une idée d'alléger les politiques de l'offre.
Non, je dirais plutôt que nous sommes simplement sur une ligne rectificative des erreurs grossières de début de mandat qui ont complètement plombé en 2018, la consommation des ménages – moins 0,6 point de PIB – et créé ces ruptures sociales, fiscales et territoriales.
Non, je crois que la ligne politique n'a pas réellement changé. D'ailleurs vous vous inquiétez des conséquences sur la dette. Mais quelque part, vous avez raison, puisque, en réalité, elle est assise sur du déficit qui est lui-même causé par les cadeaux inutiles au monde de la finance. Vous auriez peut-être pu mieux rétablir les équilibres entre les politiques de l'offre et la demande en revenant sur votre erreur de la suppression de l'ISF, en rectifiant la flat tax ou en évitant une double charge des aides aux entreprises, en décalant de quelques mois les baisses de cotisations.
À dette égale, mais réorientée sur un plan d'investissement durable, cette dette aurait sûrement permis une relance de l'économie de proximité, indispensable dans les territoires ruraux.
Certes, il n'y a pas lieu de déclencher le mécanisme de correction prévu par l'article 23 de la loi organique, pour autant nous ne nous réjouissons pas des résultats 2018, et nous affirmons notre différence quant aux orientations politiques et économiques adoptées.