Monsieur le Premier président, vous signalez, dans ce rapport extrêmement riche, que la trajectoire de l'État diverge de celle de l'ensemble des administrations publiques, et Véronique Louwagie interprétait tout à l'heure ce fait de la façon suivante : « cela prouve que l'État n'a pas fait les efforts nécessaires ». En réalité, votre rapport ne dit pas cela. Il dit que l'État, dans cette affaire, est le cochon de payant, c'est-à-dire qu'il prend à sa charge les allégements effectués en faveur des collectivités territoriales et du système social. Et comme par ailleurs les dépenses de l'État sont certainement, dans les trois secteurs, les plus difficiles à comprimer – elles correspondent à des priorités extrêmement fortes un peu partout –, nous ne pouvons que constater cette divergence.
Cependant, je m'interroge. Cette divergence que vous critiquez, est-elle totalement illégitime ? Il me semble que nous devons vraiment distinguer, dans ce domaine, le problème des collectivités territoriales et celui des systèmes sociaux. S'agissant des collectivités territoriales, vous avez raison, les responsabiliser suppose de les obliger à mettre en parallèle leurs dépenses et les ressources qu'elles prélèvent sur les administrés. L'État devant se contenter d'une fonction de péréquation, à travers les dotations. Or il y a quelque chose qui n'est pas très satisfaisant dans les allégements réalisés.
Mais en matière de dépenses sociales, n'avons-nous pas simplement affaire à une sorte d'extension du périmètre de l'État dans le champ des protections, à travers les allégements sociaux sur les assurances maladie et chômage, à savoir, le domaine de la solidarité ? Au bout du compte, ne s'agit-il pas, d'une façon un petit peu sauvage, d'une extension du principe d'unité et d'universalité dont la Cour s'attache toujours à rappeler la pertinence ? Le seul défaut n'est-il pas simplement de bien théoriser et de bien cadrer la nouvelle part des responsabilités de l'État en matière sociale ?