Intervention de Marie-Christine Dalloz

Réunion du mercredi 29 mai 2019 à 16h15
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Christine Dalloz, rapporteure spéciale (Direction de l'action du Gouvernement et Publications officielles et information administrative) :

Le champ de mon rapport spécial comprend non seulement les crédits de la mission Direction de l'action du Gouvernement et le budget annexe Publications officielles et information administrative, mais également la mission Investissements d'avenir. Le thème d'évaluation que j'ai choisi concerne cette dernière mission budgétaire, dont l'examen est renvoyé à une autre commission d'évaluation des politiques publiques, qui aura lieu le 5 juin prochain. Aujourd'hui, j'évoquerai donc principalement l'exécution budgétaire de la mission Direction de l'action du Gouvernement et du budget annexe Publications officielles et information administrative.

Pour ce qui est du budget annexe, qui retrace les activités de la direction de l'information légale et administrative (DILA), l'année 2018 se distingue par une rupture dans l'érosion des recettes que l'on observait depuis 2013. Constituées essentiellement des recettes d'annonces publiées aux bulletins officiels, elles ont atteint 196 millions d'euros, soit 6 millions d'euros de plus qu'en 2017 et 10 millions de plus que le montant attendu en loi de finances initiale, ce qui est une bonne nouvelle. Parallèlement à cette hausse des recettes, la DILA a poursuivi sa trajectoire de baisse des dépenses, qui se sont établies à 146 millions d'euros en crédits de paiement, grâce notamment à des mesures d'économies sur les dépenses de personnel et à la rationalisation des implantations, avec la fermeture de la librairie du quai Voltaire et l'implantation des structures administratives sur le site de Ségur-Fontenoy.

En 2018, la hausse des recettes et la contraction des dépenses ont permis de dégager un excédent budgétaire de 50 millions d'euros, soit 12 millions de plus que la prévision initiale. Sachant que les évolutions vont rarement dans ce sens, le fait mérite d'être souligné, monsieur le ministre.

Comme chaque année depuis 2009, la DILA a sous-consommé ses crédits, notamment en raison de la sous-exécution des dépenses de personnel. Les effectifs ont diminué de 73 équivalents temps plein travaillé (ETPT) en 2018, ce qui représente 11 % des emplois de la DILA. Le taux de remplacement s'est ainsi établi en 2018 à 1 sur 3 – ce qui prouve que la chose est possible. Les départs en retraite non systématiquement remplacés et la mise en oeuvre du nouveau plan de cessation anticipée volontaire d'activité sont à l'origine de ces chiffres. Dans ces conditions, une réflexion semble s'imposer sur les prévisions budgétaires arrêtées par la DILA.

Je voudrais vous poser quelques questions sur ce budget annexe. En matière de dépenses, comment améliorer les prévisions budgétaires de la DILA ? Jusqu'à quand estime-t-on pouvoir diminuer les dépenses de personnel de cette direction ? On va bien atteindre un socle à un moment donné. En ce qui concerne les recettes, la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises (« PACTE ») prévoit l'extension de la publication des annonces légales aux services de presse en ligne et une réduction progressive du coût de ces annonces pour les entreprises. A-t-on estimé les conséquences de ces mesures pour la DILA ? À plus long terme, le lien entre les recettes et les dépenses de ce budget annexe ne me semble pas évident. Le maintien d'un budget annexe est-il encore justifié ?

J'en viens à la mission Direction de l'action du Gouvernement, pour laquelle la consommation des crédits en 2018 s'établit à 1,4 milliard d'euros en crédits de paiement (CP). Cette mission est composée de trois programmes.

Le programme 129 comprend, outre les cabinets du Premier ministre, du ministre chargé des relations avec le Parlement et des secrétaires d'État rattachés au Premier ministre, différentes entités se caractérisant par un positionnement interministériel. La principale dépense concerne le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN).

Le programme 333 rassemble les moyens mutualisés des administrations déconcentrées : il s'agit essentiellement des dépenses de personnel qui concourent à la réalisation de différentes politiques publiques dans les territoires, ainsi que des loyers de services administratifs et des achats mutualisés. En 2019, un transfert a été décidé dans le cadre d'une délégation de gestion au profit du ministère de l'intérieur, qui sera effective à partir de 2020. Le programme 333 sera donc supprimé dans la loi de finances pour 2020 et les crédits qui lui étaient alloués jusque-là seront alors mutualisés avec ceux du programme 307 Administration territoriale.

Le programme 308 regroupe différentes autorités administratives indépendantes (AAI) dont l'activité principale n'est pas la régulation économique mais la protection des droits et libertés. À ce titre, ces AAI ne sont pas rémunérées par des taxes affectées, mais uniquement sur des crédits budgétaires.

J'aimerais appeler votre attention sur la surconsommation de 8,5 millions d'euros en CP par rapport à la loi de finances initiale, de l'action 10 Soutien du programme 129. La raison de cette consommation excessive de crédits est notamment liée aux frais de déplacement des services et du cabinet du Premier ministre, en hausse de 2 millions d'euros en CP. Ces frais de déplacement sont, par ailleurs, peu renseignés si on les compare à la présentation détaillée des frais de déplacement de la présidence de la République dans le cadre de la mission Pouvoirs publics – sont mentionnés, en effet, le nombre de vols effectués, la part des dépenses allouée au transport et celle allant à l'hébergement. Quelles sont les raisons de cette hausse des frais de déplacement ? Par ailleurs, comment comptez-vous remédier au manque de transparence actuel ? Il faudrait au moins avoir la même transparence que pour les crédits de la Présidence de la République.

L'action 15 Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives du même programme a consommé 9,4 millions d'euros de CP de plus que les crédits votés. Cette consommation de crédits est à rapprocher des résultats, inférieurs aux objectifs fixés par l'indicateur de performance Niveau de connaissance des citoyens sur le danger des drogues, pourtant présenté par le Gouvernement comme l'un des plus représentatifs de la mission Direction de l'action du Gouvernement. Il y a donc un paradoxe... Comment expliquez-vous le décalage entre les moyens mis en oeuvre et les résultats obtenus dans un domaine aussi primordial que la lutte contre les addictions ?

Le regroupement de plusieurs services du Premier ministre et d'autorités sur le site de Ségur-Fontenoy a eu un rôle significatif lors des exercices budgétaires 2017 et 2018. L'objectif de ce projet était de rechercher des économies. Toutefois, on constate en 2018 une hausse des dépenses de fonctionnement au titre du programme 129 comme dans celui du programme 308. Quelles informations pouvez-vous nous donner sur la finalisation de ce projet et sur ses premiers effets dans le cadre des différents programmes concernés ? On nous avait promis des économies conséquentes. Il y en a eu pendant deux ans, mais on constate depuis une remontée de la dépense.

Je vais terminer par quelques mots sur ma thématique d'évaluation – j'y reviendrai plus précisément la semaine prochaine. J'ai choisi de travailler sur le plan France très haut débit, et en particulier sur les réseaux d'initiative publique, c'est-à-dire sur les parties du territoire où l'installation de la fibre optique repose sur des investissements publics. En ce qui concerne la couverture numérique, les zones les plus denses et les plus rentables sont équipées par les opérateurs privés (Orange, SFR, Bouygues et Free), sur leurs fonds propres, alors que les zones les moins denses, où le coût par prise est le plus élevé, sont sous la responsabilité des collectivités territoriales.

Pour assurer le déploiement de ce plan, l'État a promis des subventions, financées dans un premier temps par le premier programme d'investissements d'avenir (PIA 1), puis par un nouveau programme faisant appel au budget de l'État, le programme 343. Le Gouvernement a décidé en décembre 2017, sans concertation avec les collectivités territoriales, la fermeture du guichet des subventions étatiques. L'ensemble des acteurs impliqués dans la mise en oeuvre du plan France très haut débit estime pourtant qu'il manque encore 700 millions d'euros pour compléter la couverture du territoire en réseaux fixes.

À l'heure où une entreprise a impérativement besoin d'un accès à internet performant pour se développer, où l'on ferme des services publics de proximité au motif que les démarches peuvent désormais s'effectuer par internet et où même l'administration fiscale demande que les impôts soient déclarés en ligne, comment justifier que l'État abandonne les territoires les plus isolés en matière de couverture numérique ? Pouvez-vous rassurer les citoyens du monde rural qui nous écoutent sur la réouverture du guichet des subventions de l'État jusqu'à ce que le territoire soit totalement couvert ?

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