Comme M. Charles de Courson vient de le rappeler, la CNDA a effectivement connu, à la fin de l'année 2018, une augmentation de son stock, qui est passé de 25 000 à 36 000 dossiers, et un allongement de son délai de jugement, qui est passé de cinq mois et six jours à six mois et quinze jours. Cette évolution est due à un effet de ciseau : une augmentation continue des entrées, de 9,5 %, associée à une stagnation des sorties. Malgré les renforcements d'effectifs obtenus en 2018, le fonctionnement de la cour a été perturbé par les mouvements sociaux du premier semestre 2018, principalement celui des avocats mobilisés contre le projet de loi sur l'exil et l'immigration, mais aussi celui des agents de la CNDA. Cette crise est désormais derrière nous, mais la capacité de jugement de la cour s'est trouvée réduite d'environ 9 000 dossiers par ces mouvements sociaux.
L'année 2019 a donc commencé avec un fort retard à rattraper, ce qui explique une poursuite de l'augmentation du délai de jugement sur les quatre premiers mois de l'année. La tendance est toutefois en train de s'inverser. En effet, le délai moyen constaté au 28 mai est de nouveau à la baisse et le taux de couverture de la Cour est supérieur à 100 % en moyenne depuis le début de l'année – il a même atteint 140 % sur le mois de mai. Cette tendance va encore s'améliorer, lorsque les rapporteurs recrutés en mars et en mai seront formés et pleinement opérationnels. Grâce à ces renforts, la capacité de jugement de la CNDA sur l'année 2019 est estimée à 70 000 dossiers, alors que les projections d'entrées sont de l'ordre de 60 000 dossiers. Au total, la situation est donc mieux maîtrisée.
Pour prendre un peu de reculs sur les difficultés rencontrées en 2018 et sur la dégradation des indicateurs qu'elles ont entraînée, il faut rappeler deux éléments importants : premièrement, le délai de traitement des affaires par la CNDA a été divisé par plus de deux en dix ans, puisqu'il était de treize mois en 2010 ; deuxièmement, la CNDA est, de loin, la plus rapide de toutes les juridictions administratives. Les réformes de procédure, qui ont permis d'augmenter le nombre d'affaires jugées, par ordonnance ou par un juge unique, le renforcement des moyens de la Cour et l'investissement de l'ensemble des magistrats et des agents, tout cela devrait permettre d'amplifier le mouvement de réduction du stock et des délais qui s'est engagé au début de l'année 2019.
M. Saint-Martin m'a interrogé sur la possibilité de demander au Conseil d'État un avis sur les amendements fiscaux. Depuis 2008, les présidents des assemblées peuvent saisir le Conseil d'État sur des propositions de loi dont ils envisagent l'inscription à l'ordre du jour. S'agissant des amendements, je reste assez dubitatif, essentiellement pour des raisons pratiques : cela supposerait de réserver l'examen de l'amendement, et donc de l'article concerné, pour un délai minimal permettant au Conseil d'État de se prononcer, ce qui retarderait d'autant l'achèvement des discussions sur un texte. Cela paraît d'autant moins facile que l'on ne peut aborder l'examen d'une partie d'un texte financier que si la partie précédente a été adoptée, et que l'examen de ces textes est contraint par les délais constitutionnels.
S'agissant du CIVEN, comme je l'ai indiqué, la suppression de la notion de risque négligeable par la loi sur l'égalité réelle outre-mer avait conduit à l'acceptation d'un nombre beaucoup plus élevé de demandes en 2018. En conséquence, les ressources financières du CIVEN en 2018 avaient quasiment doublé par rapport à 2017, passant de 4,9 à 8,9 millions d'euros. Le 20 novembre 2018, la commission prévue à article 113 de la loi relative à l'égalité réelle outre-mer, présidée par la sénatrice Lana Tetuanui, a rendu son rapport au Gouvernement, émettant des recommandations pour que les indemnisations soient réservées aux personnes dont la maladie a été provoquée par les rayonnements ionisants dus aux essais nucléaires français. Des amendements de la sénatrice et du Gouvernement déposés sur le projet de loi de finances pour 2019 ont traduit ces recommandations et ont abondé de 2,5 millions d'euros la dotation du CIVEN, qui atteint 11,3 millions d'euros. Selon les anticipations réalisées par le Comité, le montant des indemnisations devrait se stabiliser, en 2020, autour de 11 millions d'euros.
Votre dernière question portait sur la politique de développement des ressources propres du CESE. Comme chaque année, le CESE a poursuivi la politique de développement de ses ressources propres grâce à la location de ses locaux et il a perçu, à ce titre, un montant de 2,6 millions d'euros, qui est en augmentation par rapport aux années précédentes. Grâce à l'autorisation accordée au secrétaire général du CESE par la direction générale des finances publiques pour la signature de rescrits fiscaux, le Conseil a commencé, en 2018, à mener une politique volontariste de développement du mécénat, notamment pour la réfection du palais d'Iéna.
J'en viens aux questions de M. Philippe Vigier, de Mme Sabine Rubin et de M. Jean-Louis Bricout sur l'Élysée. M. Vigier m'a interrogé sur le calendrier de remise du rapport de la Cour des comptes sur la présidence de la République. Celui-ci est d'abord remis au Président de la République : le principe de séparation des pouvoirs et d'autonomie financière des pouvoirs publics constitutionnels ne permet pas d'envisager qu'il en aille autrement. De la même manière, on n'imagine pas le Gouvernement ou la présidence de la République réclamer que lui soit remis le rapport du collège des questeurs à la commission spéciale chargée d'apurer les comptes pour l'Assemblée nationale.
Le rapport de la Cour des comptes sur la gestion des services de la présidence de la République est remis, en règle générale, après le 14 juillet. Pour ce rapport, comme pour tous les autres d'ailleurs, la Cour des comptes est très attachée au principe du contradictoire, qui trouve une traduction dans la procédure qu'elle observe en rendant publiques ses conclusions définitives. À divers stades de cette procédure, les institutions contrôlées sont placées en position de répondre aux observations de la Cour : cela vaut pour l'Élysée comme pour les autres institutions. L'instruction de la Cour commence en avril ou en mai, car il faut tenir compte du calendrier de production des comptes. Après l'entretien de fin de contrôle, qui se déroule généralement à la fin du mois de mai, la contradiction avec l'Élysée a lieu en juin. Ainsi, pour l'exercice 2017, la Cour a produit son relevé d'observations provisoires le 5 juin et la présidence y a répondu le 22 juin 2018. Le rapport a été remis au Président de la République au cours d'un entretien avec le Premier président le 24 juillet 2018. Je reconnais que ce calendrier est décalé par rapport à celui du Printemps de l'évaluation...