Nous nous retrouvons à examiner un texte qui a connu moult soubresauts, entre tricotages et détricotages, première et seconde moutures, et qui risque d'en connaître encore quelques-uns, au vu des retours du Conseil d'État et des précisions que le Parlement devra lui apporter.
Une remarque préalable : il est quand même assez désagréable pour le législateur que nous sommes de se voir imposer, via un décret, la nouvelle PPE, autrement dit les choix énergétiques de notre pays. Compte tenu des enjeux que cela représente en termes de stratégie économique, sociale et environnementale, je trouve que c'est assez léger et, à long terme, contre-productif.
Bien sûr, les députés du groupe UDI, Agir et indépendants peuvent reconnaître un certain nombre de points positifs à ce projet de loi. L'objectif de réduction de la consommation énergétique finale n'est pas revu à la baisse : il reste fixé à 20 % pour 2030, au lieu du taux de 17 % qui était envisagé dans la première version du texte. Il est également positif de créer un Haut Conseil pour le climat et de passer d'un facteur 4, comme le préconisent les experts du GIEC, à un facteur d'au moins 6 pour la division des émissions de gaz à effet de serre à l'horizon 2050. Il faut néanmoins mettre un bémol : la notion de neutralité carbone paraît peu sécurisante car elle n'est pas définie clairement en droit. Ce projet de loi acte enfin, après des années de tergiversations, l'arrêt du fonctionnement des quatre dernières centrales au charbon en 2022. Je me félicite aussi tout particulièrement de l'article 5, qui vise à renforcer la lutte contre la fraude aux certificats d'économies d'énergie : j'ai régulièrement eu l'occasion de souligner la nécessité de renforcer les contrôles, ce dispositif étant entaché par nombre de fraudes et de travaux bâclés. Dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2018, j'avais déposé un amendement préconisant de faire appel à des thermiciens agréés pour valider les travaux accomplis dans le cadre du crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE).
Derrière les ambitions toujours plus grandes qui sont affichées, on observe néanmoins un certain nombre de rétropédalages et d'incertitudes regrettables quand on entre dans le détail. Ce texte est attendu depuis si longtemps que l'on était en droit d'espérer le voir beaucoup plus abouti et, surtout, concret. Malheureusement, nous restons face à un entre-deux qui ne rassurera personne, ni les professionnels, ni les particuliers. À titre d'exemple, les mesures d'efficacité énergétique, passant principalement par une baisse de la consommation d'électricité, ne sont toujours pas au rendez-vous. Contre toute attente, ce texte fait aussi tout bonnement l'impasse sur la réforme du mécanisme de calcul des tarifs de l'électricité, alors qu'il est urgent de trouver une réponse viable à la hausse de 5,9 % décidée par la Commission de régulation de l'énergie au premier semestre 2019 et qui aura de lourds effets pour de nombreux concitoyens. Qu'il s'agisse des moyens financiers ou des leviers d'incitation, les outils ne sont pas clairement affichés. Les objectifs sont de plus en plus ambitieux, mais il n'y a pas, en face, de réel dispositif pour les atteindre. Certains secteurs ne sont pas assez favorisés – je pense notamment à l'éolien offshore et à la méthanisation. En outre, il n'y a toujours rien au sujet de la transformation du crédit d'impôt transition énergétique en prime.