Si je devais résumer ce projet de loi en une phrase, je dirais que derrière les grandes ambitions affichées, comme d'habitude, ce sont de petits moyens qui sont mis en oeuvre. Cela vaut globalement pour la politique écologique menée par ce Gouvernement. Mais nous y sommes habitués et nous ne sommes donc pas surpris par le caractère manifestement insuffisant de ce projet de loi. Ce n'est pas seulement le groupe La France insoumise qui le dit : de nombreuses organisations non gouvernementales (ONG) l'ont pointé du doigt, notamment Réseau Action Climat, qui juge ce projet de loi « dénué de mesures concrètes alors que les attentes sont fortes concernant la mobilité ou le logement, en particulier la rénovation des passoires énergétiques ».
Le premier problème avec ce texte, et quiconque a fréquenté des cercles écologistes devrait le savoir, tient au fait que la notion de neutralité carbone est hautement problématique. Nous alertons sur le risque du côté des entreprises si ce concept n'est pas associé à de stricts objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre. De plus, il laisse la porte ouverte à des visions technicistes de l'atténuation du changement climatique, ce qui n'est ni à la hauteur des enjeux, ni porteur d'avenir. L'atténuation du changement climatique passe par la sobriété et l'efficacité énergétique, et elle ne saurait en aucun cas résider dans d'improbables instruments de capture du carbone. L'introduction d'un tel concept dans la loi laisse penser que cette idée est possible et même souhaitable. Nous ne le pensons pas, et c'est l'une des raisons de notre opposition à ce texte.
Les reculades à propos du nucléaire sont une autre raison, extrêmement forte. Le report à 2035 de la réduction à 50 % de la part de la production d'électricité d'origine nucléaire n'est pas sérieux, d'autant que vous ne prévoyez aucun pas conséquent pour assurer une évolution substantielle dans ce domaine. Nous allons donc utiliser encore longtemps cette énergie complètement archaïque.
Quant à l'objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre que vous avez fixé pour 2030, il est inférieur aux engagements que la France a pris à l'occasion de l'accord de Paris. Dans ces conditions, comment voulez-vous mériter nos félicitations ?
Enfin, le Haut Conseil pour le climat que vous proposez est une coquille vide. Nous défendons, pour notre part, la création d'un Haut Commissariat à la planification écologique. On sait, car beaucoup d'exemples l'ont prouvé, que ce n'est pas le marché laissé à lui-même, dans un climat de confiance absolue et déraisonnable, qui réglera le problème écologique. Si l'on veut créer une autorité ayant un rôle important dans ce domaine, elle doit être dotée d'un pouvoir réel, notamment pour faire prévaloir l'intérêt écologique sur les intérêts économiques à court terme. Votre Haut Conseil ressemble fort à un énième comité Théodule : il n'est pas à la hauteur du problème que nous devons affronter.
On ne doit plus avoir un marché absolument libre et dérégulé : c'est la contradiction fondamentale au sein de votre politique énergétique, que l'on retrouve dans votre soutien renouvelé aux certificats d'économies d'énergie, qui sont bien en deçà des mesures qu'il faut désormais prendre. On devrait mettre en place, par exemple, comme le propose France nature environnement, une interdiction de location des passoires énergétiques. Nous serions ainsi bien davantage à la hauteur.