J'achève : vous combattre, c'est faire notre devoir. En vain espérerait-on autre chose de nous, et de moi en particulier. Vous combattre, c'est assumer la responsabilité de l'engagement qui nous fonde, dans le long fil de l'histoire qui unit les morts aux vivants, c'est maintenir ouverte la voie d'une alternative, car un autre futur doit rester possible. Quel autre choix aurait un sens pour une opposition comme la nôtre ?
J'en reste, monsieur le Premier ministre, décidément à Camus : il demande d'imaginer Sisyphe heureux… Vous vous doutez que c'est plus facile en haut de la côte qu'en bas, mais il faut l'imaginer heureux. On ne peut toutefois comprendre comment Sisyphe y parvient si on ne se souvient que pour lui, selon les mots du philosophe, la lutte vers les sommets suffit à remplir un coeur d'homme. Et il ne s'agit pas là de crapahutages politiciens : la grandeur de la République et celle de la France sont au prix que je viens de dire. Il leur faut cette opposition puissante, opiniâtre, inlassable, sans quoi elles ne sont plus elles-mêmes. Et cette exigence vaut pour chacun d'entre nous comme pour chaque Français car c'est la condition de la grandeur de la patrie.