Intervention de Fabien Roussel

Réunion du lundi 3 juin 2019 à 21h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFabien Roussel, rapporteur spécial (Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation) :

Pour la deuxième année, nous nous livrons à l'exercice du Printemps de l'évaluation, au cours duquel nous contrôlons l'exécution budgétaire. Nous pourrons juger de l'efficacité de cette nouvelle pratique de l'Assemblée nationale au regard de la prise en compte ou non des remarques que nous formulons.

S'agissant du budget consacré aux anciens combattants, je pourrais être bref en me contentant de dire qu'il a été bien exécuté et que tout va bien. De fait, le niveau d'annulations de crédits est très faible – 22,5 millions d'euros seulement pour un budget de 2,4 milliards d'euros, ce qui est parfait.

Je formulerai toutefois quatre remarques.

Tout d'abord, la disparition naturelle des anciens combattants et des ayants droit est à l'origine d'un excédent de 82 millions d'euros. Je répèterai comme tous les ans que cette somme pourrait être mise à disposition des besoins des associations du monde combattant, et donc affectée au budget des anciens combattants.

La deuxième remarque porte sur le budget de la mémoire, qui en 2018 a été exceptionnellement important du fait des célébrations du centenaire – 5 millions d'euros supplémentaires par rapport à 2017. Mais il a baissé en 2019 et va encore diminuer, ce que je trouve regrettable. Les associations nous alertent en effet sur les conséquences de cette diminution au regard de l'actualité, la multiplication des actes antisémites, des outrages à l'encontre de résistants, de déportés – je pense à Simone Veil –, la montée des nationalismes, la haine contre des communautés et contre des peuples. Les associations considèrent qu'il serait bon de maintenir un budget élevé, et de faire en sorte que chaque lycéen, chaque collégien puisse visiter au moins une fois dans sa scolarité un lieu de mémoire lié à la résistance, à la déportation et à la guerre, pour faire reculer ces idées. Certaines de ces associations s'étonnent d'ailleurs que leurs subventions aient diminué.

Troisièmement, dans le cadre de cette mission d'évaluation, j'ai visité l'Institution nationale des invalides (INI), le 21 mars dernier. C'est un établissement remarquable, dont les missions vont au-delà de la prise en charge des blessés et grands invalides de guerre puisqu'il conduit un travail de recherche et réalise des prouesses technologiques reconnues. L'INI a fait l'objet d'un audit en 2013, qui lui a fixé des objectifs de réduction de budget et d'effectifs, lui demandant de passer de 420 équivalents temps plein à 400 d'ici à 2021. Ainsi que j'ai pu le constater sur place, l'Institut a fait de gros efforts. Il donne l'alerte, considérant qu'il ne serait pas possible de descendre en dessous du seuil de 410 équivalents temps plein sans remettre en cause l'accueil des grands invalides de guerre et la qualité des soins qu'il pratique.

Ma dernière remarque porte sur le rapport constant, qui n'a rien à voir avec un député qui s'appellerait Constant : il s'agit du mécanisme d'indexation des pensions pour nos anciens combattants. C'est important puisque cela concerne 206 676 bénéficiaires de la pension militaire d'invalidité (PMI) et 940 071 titulaires de la retraite du combattant. Le rapport constant est le lien d'automaticité entre l'évolution de la valeur du point servant au calcul du montant des pensions et l'évolution du point d'indice de la fonction publique. Depuis 2005, ce mode de calcul a permis de faire évoluer le point d'indice des intéressés, mais pas assez, et pas au niveau de l'inflation. C'est ce que regrettent les associations du monde combattant, qui considèrent avec raison que cette pension est due au titre de la reconnaissance de la nation, au regard de leur engagement pour le pays, et qu'il n'est pas juste qu'elle diminue à cause de l'inflation. Ce mode de calcul les pénalise, c'est comme s'ils percevaient une reconnaissance au rabais.

Dans le cadre de ma mission de contrôle et d'évaluation du budget 2018, j'ai donc demandé aux services du ministère à quel niveau ce point d'indice se situerait s'il était calculé en fonction de l'inflation, et combien cela coûterait au budget de la nation. Concernant le budget 2018, il s'élèverait à 15,2 euros, et cette mesure coûterait 88 millions d'euros. Je mets cette somme en regard des 82 millions d'euros d'« économies » liés à l'évolution naturelle de la démographie des anciens combattants du fait de leur disparition progressive. Si ces crédits étaient maintenus dans le budget des anciens combattants, nous pourrions au moins répondre à cette demande légitime du monde combattant de voir les pensions indexées sur le niveau de l'inflation afin qu'elles retrouvent un juste niveau. Comme vous le savez, en effet, des gouvernements peuvent décider de geler le point d'indice de la fonction publique, ce qui du coup pénalise nos anciens combattants.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.