Intervention de Marie-Christine Dalloz

Réunion du mercredi 12 juin 2019 à 9h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Christine Dalloz :

Je salue tout d'abord le travail réalisé par vous-même, tout d'abord, monsieur le président, puisque vous êtes à l'origine de cette proposition de loi, par Patrick Hetzel, ensuite, avec cet amendement qui me semble frappé du sceau du bon sens. Apparemment, ce n'est pas ce que la majorité a compris, mais je veux lui rappeler quelques éléments de contexte, qui me semblent essentiels.

La question du pouvoir d'achat est aujourd'hui centrale. Celui-ci a été mis à mal par des récentes augmentations d'impôts et de taxes qui sont le fait de la majorité et du Président de la République. La question du pouvoir d'achat s'est imposée comme la revendication majeure des Français. Le mouvement des « gilets jaunes » trouve son origine dans l'exaspération suscitée par le niveau des taxes.

Si le pouvoir d'achat repose avant tout sur l'activité économique et donc la croissance, il dépend évidemment de l'ensemble des prélèvements. C'est cela que vous n'avez jamais voulu entendre. Nous sommes en France les champions d'Europe des taxes et impôts, avec un taux de prélèvements obligatoires de 45 % du produit intérieur brut en 2018, quand la moyenne, dans la zone euro, est de 41,3 %. En Allemagne, pays que vous citez souvent en référence, il est de 39,6 %. Cet écart entre nos taux de prélèvements obligatoires fait la singularité française.

Si le taux des prélèvements obligatoires était égal à cette moyenne de 41,3 %, nous paierions environ 9 milliards d'euros de moins d'impôts et de prélèvements sociaux. C'est colossal ! Le Président de la République et le Gouvernement portent seuls la responsabilité d'avoir encore augmenté ce taux de prélèvements obligatoires. Faute de réelle baisse de la dépense publique, une politique massive de matraquage fiscal s'est révélée particulièrement préjudiciable au pouvoir d'achat des Français. Vous avez donné des chiffres, monsieur Cazeneuve, mais, en 2018, nous avons assisté à la hausse massive de la CSG, à la hausse sans précédent des taxes sur le carburant, à la baisse du montant de la prestation d'accueil du jeune enfant. Au total, en 2018, les prélèvements obligatoires ont augmenté de 4,5 milliards d'euros – cela va bien à l'encontre de votre propos, et c'est l'INSEE qui donne le chiffre. C'est cela la réalité.

Depuis l'examen de notre proposition de loi, dans sa conférence de presse du 24 avril dernier, le Président de la République a évoqué sa volonté de reprendre deux mesures que Les Républicains proposent, qui figurent dans cette proposition de loi. L'une est la réindexation des petites retraites sur l'inflation, à partir de 2020. L'autre est la baisse de l'impôt sur le revenu des classes moyennes ; c'est le sens de l'amendement que propose le rapporteur. C'est bien la preuve que nos mesures étaient justifiées et que nos propositions et notre travail parlementaire ont permis d'infléchir la position de l'exécutif. Monsieur le président, vous avez contribué à infléchir la position et la vision de l'exécutif.

Ce n'est cependant pas suffisant. Lors de l'examen du texte en séance au mois d'avril dernier, les députés du groupe La République en Marche se sont opposés fermement aux mesures que nous proposions et les ont dénoncées. Ils se sont opposés bec et ongles à toute mesure de pouvoir d'achat, y compris la réindexation des retraites et la baisse de l'impôt sur le revenu, qu'ils critiquaient ouvertement.

Depuis lors, le Président de la République a largement repris largement ces deux mesures phares et annoncé qu'elles seraient votées par sa majorité lors de l'examen du prochain projet de loi de finances. Les députés du groupe La République en Marche vont donc devoir se dédire et défendre demain des mesures qu'ils ont rejetées en bloc hier – qu'ils rejettent peut-être encore aujourd'hui. Quelle cohérence extraordinaire !

Au mois d'avril dernier, les députés du groupe La République en Marche critiquaient les dépenses qui sont l'objet de notre proposition de loi, avant que le Président de la République n'annonce, quelques jours plus tard, près de 20 milliards d'euros de dépenses nouvelles non financées. Quand c'étaient les nôtres, c'était inacceptable. Quand ce sont les vôtres, c'est tout à fait favorable.

Assistant depuis de nombreuses années à des débats à l'Assemblée nationale, je n'ai jamais vu une majorité faire preuve d'autant d'incohérence. Les mesures que comporte cette proposition de loi sont nécessaires, et elles sont cohérentes avec les annonces de votre Président de la République – votez-les donc avec nous ! Enfin, et surtout, elles sont justes.

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