Lorsque nous sommes élus, nous arrivons tous ici avec nos parcours de vie, nos expériences et nos convictions. Beaucoup d'entre nous étaient des citoyens engagés avant de siéger sur ces bancs. Nous connaissons donc tous la valeur de l'engagement, c'est-à-dire de cette énergie et de ce temps que nous consacrons aux autres et à une cause qui nous dépasse, par-delà notre confort ou notre intérêt personnel immédiat.
Nous avons tous des exemples, dans nos vies, de cette valeur ajoutée humaine qu'apporte l'engagement citoyen. Lorsque j'étais bénévole d'une association de service civique, j'ai été particulièrement marqué par des jeunes qui présentaient l'action qu'il conduisaient auprès de personnes âgées isolées ou en rupture familiale. Ils leur faisaient des visites de convivialité en vue de les réinsérer dans leur quartier et dans leur environnement. Une de ces femmes, âgée de 87 ou 88 ans, au cours d'une table ronde à laquelle assistait la ministre, a expliqué d'une phrase, qui est restée dans ma mémoire, ce qu'est cette valeur ajoutée humaine de l'engagement citoyen, en l'occurrence celui de notre jeunesse. Elle n'a pas dit qu'elle trouvait sympathique de voir des jeunes chez elle toutes les semaines. Non, elle a dit : « J'étais morte et je revis. »
J'aimerais, au cours de cette semaine du « printemps de l'évaluation », souligner l'idée que, au-delà de la valeur ajoutée humaine, qui est l'essentiel de l'engagement citoyen, nous pouvons, nous législateurs, essayer de raisonner en coût et bénéfice sociétal complet lorsque nous évaluons des politiques publiques comme celle du service public – évaluation que vous avez évoquée, mes chers collègues.
Cette évaluation illustre en effet parfaitement la proposition de résolution que nous examinons aujourd'hui. Lorsque 140 000 jeunes agissent au quotidien dans le cadre de la politique publique du service civique, celle-ci est évaluée en fonction de ce qu'elle apporte à ces jeunes en matière d'orientation et de citoyenneté – la place qu'ils prennent dans la société. Dans une approche très lolfienne, on vérifie l'impact de cette politique publique sur la jeunesse.
J'aimerais souligner aujourd'hui l'existence d'un impact sociétal autre que l'impact direct de cette politique publique sur la jeunesse. Un grand nombre d'évaluations commencent à être menées, qui montrent que les jeunes qui, dans le cadre du service civique, agissent au quotidien auprès de personnes âgées isolées, en les maintenant à domicile une ou deux années supplémentaires, diminuent les coûts sociétaux et sociaux d'un placement de ces personnes en EHPAD. Il y a donc un retour sur investissement de l'action sociétale qu'ils mènent.
Ainsi, au-delà d'une lecture purement lolfienne de degré 1, si je puis dire – l'évaluation de l'impact du service civique sur les jeunes – , il est temps de prendre en compte, pour l'évaluation des politiques publiques en matière d'engagement citoyen, un impact d'un deuxième ordre, en raisonnant en fonction non plus des seuls coûts budgétaires, mais aussi de l'investissement sociétal.
Notre démocratie aura progressé lorsque nous saurons reconnaître que 30 millions d'euros supplémentaires dans le service civique auront non seulement un impact direct sur les jeunes, mais également sur les sujets qu'ils traitent, en prenant en compte le résultat de leur action sur la société.
Cette évaluation en coût et bénéfice sociétal complet, le législateur doit réussir à la mettre en oeuvre dans une démocratie comme la nôtre. La proposition de résolution de Sarah El Haïry s'inscrit dans cette logique. Le raisonnement d'analyse budgétaire des politiques publiques dans le domaine de l'engagement citoyen a probablement besoin d'innovation : celle que nous proposons consiste à passer au degré 2 de l'évaluation, c'est-à-dire à mesurer l'investissement sociétal concret plutôt que le seul coût budgétaire.
L'engagement citoyen a une puissance transformatrice exceptionnelle.
Le 18/06/2019 à 21:11, Laïc1 a dit :
Oui, c'est vrai, moi je m'engage sur "nos députés".
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