Je veux d'abord dire à mon collègue et ami Florent Boudié que si mes collègues du groupe Les Républicains ne sont pas là, c'est parce qu'ils assistent en ce moment même à une autre réunion d'une grande importance. L'essentiel pour moi, c'est que mon groupe ait accepté de consacrer cette niche à une proposition de loi relative à Mayotte ; je sais que ses membres sont de tout coeur avec nous. J'en profite pour dire que, sans la formation politique à laquelle j'appartiens depuis une quarantaine d'années, Mayotte se conjuguerait aujourd'hui en comorien.
Cela étant dit, j'ai été très sensible aux mots aimables que vous avez eus l'un et l'autre à mon endroit. Je considère qu'à travers ma personne, c'est l'ensemble des parlementaires mahorais qui ont l'honneur de représenter Mayotte au sein du Parlement de la République, et notre île elle-même, que vous avez voulu honorer.
Je vous ai entendus dire que Mayotte était une cause nationale ; je ne désespère pas que le Gouvernement ait la même appréciation, sur la base du constat commun qu'à l'égard de Mayotte, l'État a failli, et qu'il est maintenant urgent de mettre en oeuvre un programme de rattrapage.
S'il existe aujourd'hui une divergence de vues au sujet de Mayotte, elle porte sur ce rattrapage. Alors que le Gouvernement estime qu'il doit se faire essentiellement sur le terrain social, nous considérons pour notre part – comme la plupart des Mahorais, que vous pouvez interroger – que faire des écoles et du logement social, et mettre en place une exonération du ticket modérateur, c'est bien, mais ce sont des mesures qui s'adressent davantage à l'immigration qu'à nous. Par nature, un Mahorais n'ira jamais dans un logement social quelle que soit la qualité de son habitat ; construire des écoles, c'est adresser aux immigrants le message selon lequel la France est prête à les accueillir, eux et leurs enfants ; instaurer l'exonération du ticket modérateur pour permettre aux assurés sociaux d'aller se faire soigner en ville, c'est surtout permettre à ceux qui ne sont pas assurés d'aller à l'hôpital.
Les Mahorais ne se retrouvent pas dans le plan récemment mis en place par le Gouvernement. Ils considèrent que ce qu'il faut pour Mayotte, c'est le développement durable. À nos yeux, le plan du Gouvernement pour Mayotte au quotidien n'est qu'une réponse à l'urgence sociale ; cela étant, nous y adhérons, ne serait-ce que parce que nos entreprises vont pouvoir gagner des parts de marché, travailler et créer des emplois sur un territoire où le chômage frappe plus de 40 % de nos jeunes, ce qui n'est pas anodin.
La présente proposition de loi constitue, elle, une réponse en termes de développement durable du territoire. Même si je suis un politique comme vous tous, mes amis, je me refuse à faire de la politique politicienne. Je suis capable de regarder la réalité en face : je vois bien que, depuis quarante ans, c'est l'État qui a toujours dit ce qui était bon pour Mayotte – et cela vaut encore pour le plan récemment mis en place. Aujourd'hui, avec cette proposition de loi, les Mahorais considèrent que le temps est venu pour eux de faire savoir ce qui leur paraît essentiel au développement de leur île.
Je vous dis encore une fois un grand merci pour votre mobilisation et pour la qualité de vos interventions. Je me refuse à désespérer. Mayotte a toujours vécu d'espoir ; je veux croire, moi aussi, que d'ici au débat en séance publique, les situations évolueront et que le Gouvernement nous apportera des réponses plus convaincantes, qui permettront à Mayotte de continuer à espérer.
Vous avez vu comme moi, mes amis, ce qui s'est passé au cours des dernières élections européennes : alors que le Rassemblement national n'avait pas d'équipe pour faire campagne à Mayotte, ni de délégué dans les bureaux de vote, il a quand même obtenu un score de 46 %. Ça veut dire qu'il y a de la colère. Que nous trouvions ensemble les moyens d'apaiser cette colère, c'est aussi le sens de ma démarche.