S'intéresser aux agences publiques, c'est s'intéresser à l'organisation de l'État. Le recours à ces agences ne date pas d'hier. Ces entités trouvent en effet leur origine dans les années 1960. Il s'agissait alors de se doter d'administrations « légères », spécialisées et, surtout, limitées dans le temps. Leur objectif était clair et déterminé : disposer de structures capables de répondre à des besoins spécifiques.
Parmi les premières agences créées, on trouve, par exemple, l'Office national des forêts, qui date de 1964, ou l'Agence nationale pour l'emploi, qui date de 1967. Lorsque l'on parle d'agences publiques, on parle en réalité d'une forme de morcellement des services de l'État. De fait, ces agences sont des entités plus ou moins autonomes, chargées de la réalisation d'une mission d'intérêt général. Si leur pilotage revêt une dimension stratégique importante, il n'existe cependant, à ce jour, aucune définition claire du périmètre des agences de l'État.
Le dernier recensement, celui de l'Inspection générale des finances, date de 2012 et évalue leur nombre à 1 244. Comme vous le rappellent très justement les auteurs de cette proposition de résolution, il s'agit d'un chiffre significatif. Les commissions et instances consultatives ou délibératives sont, elles aussi, en nombre important, même si on constate un effort de réduction depuis 2011. Aussi peut-on légitimement parler d'un véritable maquis à propos de ces agences publiques. En effet, cette catégorie regroupe une multitude de statuts, publics, privés ou mixtes.
Agences, opérateurs, organismes, autorités : on s'y perd ! Parmi ces agences et opérateurs, on distingue différents degrés d'autonomie, voire d'indépendance. Je pense notamment aux autorités administratives et aux autorités publiques indépendantes. Or, pour favoriser la transparence, l'intelligibilité et la lisibilité de l'action publique, il est important de savoir très concrètement qui fait quoi, avec quels moyens et dans quel but.
Des actions ont déjà été entreprises par le passé pour mettre un peu d'ordre dans ce maquis. Je pense notamment à trois circulaires qui se sont succédé pour fixer et approfondir les dispositifs de pilotage et de gouvernance des agences publiques. La première date du 26 mars 2010 et a conduit la tutelle à mieux définir ses objectifs stratégiques – grâce aux contrats de performance, par exemple – et les opérateurs à optimiser l'utilisation des subventions de l'État.
La deuxième, en date du 9 avril 2013, a harmonisé et clarifié le recours aux agences et limité la création de nouvelles entités. La dernière date du 23 juin 2015. Le Premier ministre a alors demandé à chaque ministère d'élaborer un plan d'action pour renforcer la tutelle à l'égard des opérateurs dont il a la charge. Il les a aussi invités à veiller à la maîtrise des finances publiques et à l'exemplarité de ces organismes en matière de train de vie.
Mais il reste encore du chemin à parcourir : le bilan est mitigé et les enjeux sont multiples. Il y va tout d'abord de la transparence et de l'optimisation de l'action publique. Or la création d'agences au coup par coup, la diversité de leurs fonctions et de leur régime juridique n'ont jamais fait l'objet d'une étude générale approfondie. Cette pluralité, combinée à l'absence de stratégie globale, favorise l'illisibilité de l'action publique. Ce phénomène est, de plus, exacerbé par l'absence de renforcement de la tutelle de l'État sur ces agences. Alors qu'un certain nombre d'entre elles exercent des missions aux contours très flous, font doublon avec d'autres ou ne sont pas exemplaires dans leur gestion, il est urgent d'élaborer une stratégie de rationalisation.
Il y va ensuite des finances publiques. Ces dernières années, on a assisté à une véritable inflation des moyens humains et financiers de ces entités. Leur coût de fonctionnement est donc élevé : il est estimé à près de 60 milliards d'euros par an, soit environ un cinquième du budget général de l'État. Un rapport de la Cour des comptes de 2017 est sans équivoque : il désigne les concours aux opérateurs comme « un point de fuite de la dépense de l'État, difficile à maîtriser ».
Rationaliser l'organisation de l'État, la rendre plus lisible, mais aussi réduire les dépenses publiques : tels sont les engagements de notre majorité. Cette proposition de résolution s'inscrit donc en partie dans cette logique globale. Néanmoins, ses auteurs souhaitent que soit envisagée la fusion des commissions et instances consultatives avec le Conseil économique, social et environnemental. De fait, les fonctions de celui-ci et son futur rôle institutionnel font actuellement l'objet de diverses réflexions. Mais proposer cette fusion dès à présent, c'est aller trop vite et pousser la réforme trop loin.
Puisqu'il n'est pas possible d'amender une proposition de résolution, ce qui est bien dommage, nous ne pouvons que voter contre, tout en poursuivant le travail entamé par ses auteurs et par les membres du groupe UDI.