Ce projet est, à tous points de vue, une petite loi, un texte a minima : on passe à côté de la véritable loi sur l'énergie dont notre pays aurait besoin. Nous aurions aimé faire suite à vos annonces relatives à l'ambition écologique du Gouvernement en ayant l'opportunité de débattre de la politique hydroélectrique de la France, du montant de la prime à la conversion des automobiles ou encore de celui de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), mais l'occasion ne nous en est pas donnée. Nous comprenons bien que l'objet de ce texte est plutôt de modifier le cadre législatif afin qu'il coïncide un peu plus avec la PPE.
Nous applaudissons le fait que les ambitions sont revues à la hausse pour la diminution des émissions de gaz à effet de serre – il faut le reconnaître – et pour la baisse de la consommation des énergies fossiles, mais nous regrettons le report à 2035 de la réduction à 50 % de la part du nucléaire dans le mix électrique : même si le nucléaire est décarboné, il est loin d'être soutenable. Sa pérennisation dans notre mix énergétique constitue non seulement un danger pour la planète mais aussi pour notre territoire. C'est aussi une justification pratique quand on ne veut pas se montrer plus volontariste pour le développement des énergies renouvelables.
Ce projet de loi illustre aussi, par ses zones d'ombre, l'absence de mesures en matière de logement. Face au fléau de la précarité énergétique, qui paupérise plus de 12 millions de Français, nous devrions mener une politique publique résolue en matière de rénovation des passoires thermiques, pour mettre fin aux radiateurs dits « grille-pain ». Malgré l'absence de propositions concrètes de la part du Gouvernement, nous aurons l'opportunité de discuter de ce sujet à la faveur des nombreux amendements qui ont été déposés. L'article 5 prévoit, certes, quelques dispositions visant à réduire la fraude aux certificats d'économie d'énergie (CEE), mais on est loin de la levée des freins qui est nécessaire pour accélérer les rénovations dans le cadre d'une volonté de transformer notre modèle énergétique et, surtout, de faire des passoires thermiques des espaces de vie socialement responsables et écologiquement positifs.
Je pourrais évoquer d'autres manquements ou faiblesses, qui concernent notamment la chaleur et le biogaz, les réseaux de distribution, le développement de l'éolien, notamment offshore, même si on peut relever le lancement de l'appel d'offres qui a eu lieu la semaine dernière, mais aussi l'énergie fatale, dont l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) ne cesse de souligner le potentiel important, mais qui n'apparaît que pas ou peu dans ce que vous proposez.
Je dois aussi aborder la question de l'article 3. Vous n'ignorez pas que je suis le député d'une des 4 circonscriptions concernées, ou plutôt impliquées, par la fermeture des centrales à charbon. Cela menace un nombre important d'emplois locaux. L'instauration d'un plafond pour les émissions de gaz à effet de serre aboutira de facto à la fermeture de ces centrales. Je soutiens cette initiative, en tant que député de la circonscription de Gardanne : j'ai déjà eu l'occasion de le dire à de nombreuses reprises, et je le redis.
Cependant, je ne peux pas m'empêcher de faire un parallèle avec les débats que nous avons eus la semaine dernière dans l'hémicycle : le Gouvernement a refusé d'engager une action sur la fiscalisation du kérosène qui aurait constitué un autre grand symbole de notre transformation écologique. On aurait ainsi démontré que ce ne sont pas que des ouvriers, dans des territoires éloignés, mais aussi toutes les classes sociales qui doivent mettre la main à la poche. En ce qui concerne les ouvriers, c'est bien plus que cela, puisqu'il s'agit d'un sacrifice personnel : c'est la fin d'un espoir de vie pour eux.
Vous avez dit, Monsieur le rapporteur, que rien n'est plus contagieux que l'exemple. Encore faut-il qu'il y en ait un ! Cela n'a pas été le cas la semaine dernière en ce qui concerne le kérosène. Je serai très vigilant à ce que l'on soit au niveau du sacrifice demandé aux salariés et aux habitants de mon territoire dans le cadre de l'exemple donné avec la fermeture des centrales à charbon.