Un ensemble de raisons historiques et symboliques plaident en faveur de Strasbourg capitale européenne. Il est donc essentiel que la France, qui s'honore d'accueillir les institutions européennes telles que le Parlement européen et le Conseil de l'Europe, agisse pour le maintien et le renforcement de cette implantation.
L'action des autorités publiques françaises se traduit d'abord dans un outil désormais inscrit dans la loi : le contrat triennal. Celui-ci associe les collectivités territoriales concernées, soit la Ville, la Métropole, le Département et la Région, ainsi que l'Etat, pour déterminer et financer les éléments destinés à permettre à Strasbourg d'assumer son statut de capitale européenne. Depuis 1980 donc sans discontinuer, un effort constant a donc été assuré pour faire en sorte que les parlementaires européens puissent bénéficier des meilleures conditions possibles d'accueil et de vie sur place. Il faut saluer l'implication transpartisane du gouvernement français par ce biais, depuis bientôt quarante ans.
L'effort consenti par la France, l'Etat et l'ensemble des collectivités territoriales, s'élève au cours des vingt dernières années à 1,5 milliards d'euros : 500 millions au titre de l'Etat et 1 milliard provenant des collectivités locales. Ces dernières définissent entre elles les actions qu'elles souhaitent soutenir pour renforcer le rôle de Strasbourg et son attractivité en tant que capitale européenne, et ce sur trois volets : l'accessibilité, l'accueil des institutions, et le rayonnement de la ville.
Eu égard à l'importance prise depuis près de quarante ans par le Parlement européen, on mesure aisément le chemin parcouru et l'effort consenti au vu du total des investissements. Ceux de l'Etat ont mis l'accent sur les conditions d'accessibilité, avec notamment la ligne à grande vitesse entre Paris et Strasbourg, l'accueil des institutions au titre desquelles figure la contribution nécessaire de l'Hémicycle du Parlement européen et le rayonnement de la ville, qui s'appuie sur le renforcement de l'université et des institutions culturelles ainsi que sur un lieu original, le lieu d'Europe, outil d'éducation à la citoyenneté européenne.
Pour illustrer les progrès des conditions d'accessibilité, je mentionnerai la ligne à grande vitesse, dénommée « l'Européenne », qui relie Strasbourg à Francfort et à Stuttgart, et qui constitue l'ossature du réseau ferroviaire européen sur un axe Est-Ouest. L'accessibilité de Strasbourg depuis Paris est assurée à 300kmh. Des efforts ont également été consentis en faveur de l'aéroport, des liaisons routières, des transports urbains, pour un total de 745 millions d'euros d'investissements dans ce domaine depuis 1980.
Evidemment, tout n'est pas parfait. Les médias se font régulièrement l'écho des difficultés réelles ou perçues que peuvent rencontrer les eurodéputés dans leurs fonctions. Il est cependant parfois difficile de distinguer les problèmes réels de la perception de problèmes, dans nos auditions, nous nous sommes donc attachés à chercher à comprendre la nature et la gravité précise des difficultés invoquées, également au travers d'un questionnaire diffusé directement auprès des eurodéputés, des représentants du Conseil de l'Europe et des fonctionnaires de manière à pouvoir établir un diagnostic basé sur des faits et non pas des préjugés ou des perceptions.
Un des premiers problèmes évoqués est l'accessibilité de Strasbourg, qui pourtant est reliée par deux liaisons de centre-ville à centre-ville : la liaison TGV Paris et la liaison Thalys Bruxelles spécialement affrétée les semaines de sessions. Les réponses au questionnaire ont montré que nombre d'eurodéputés viennent de Bruxelles et non de leurs circonscriptions. Néanmoins, la question de l'aéroport se pose. Strasbourg, à la différence de Bruxelles, ne dispose pas d'un aéroport de la taille d'une capitale internationale, qui puisse relier la ville à l'ensemble des capitales européennes. Si Strasbourg bénéficie d'un contexte régional favorable, grâce à la proximité des aéroports de Francfort, Bâle-Mulhouse et Paris Charles-de-Gaulle, les liaisons entre ces derniers et Strasbourg sans rupture de charge pourraient encore être améliorées. L'aéroport de Strasbourg-Entzheim bénéficie quant à lui d'un statut compétitif et de lignes sous obligation de service public qui permettent aux parlementaires européens de diminuer significativement leur temps de trajet. Notre rapport fait des propositions en ce sens.
L'hôtellerie et la restauration strasbourgeoises ont fait l'objet de nombreux éloges mérités. Cela étant, des difficultés ont été rapportées quant à la réservation des hôtels et à la disponibilité de l'information. Nous encourageons la mise en place d'une centrale de réservation afin de mutualiser les achats, puisqu'il existe également une préoccupation quant au coût de l'hôtel.
Les conditions de travail au sein du Parlement européen sont elles-mêmes en voie d'amélioration. Le doublement de la taille des bureaux devrait largement y contribuer, il faut saluer l'action du Parlement européen en la matière. Cette extension ne doit toutefois pas se faire au détriment de l'espace réservé aux délégations diplomatiques ou aux représentants du Conseil. Une politique immobilière ambitieuse permettrait également de satisfaire les besoins en matière de salles de réunion et de salles où doivent se tenir les trilogues. Davantage de synergies avec le Conseil de l'Europe permettraient de disposer de moyens supplémentaires pour accueillir les travaux.
Le contrat triennal 2018-2020 participe largement de ces progrès. 49 millions d'euros sont ainsi consacrés à l'accessibilité de Strasbourg, quand 46 millions d'euros sont fléchés vers des actions en faveur de Strasbourg, capitale de la démocratie et des droits de l'homme, dans la perspective d'accueillir des forums comme le forum mondial de la démocratie. Le financement continu des instituts d'enseignement supérieur et des institutions culturelles comme l'Opéra du Rhin, s'il peut paraître plus éloigné des préoccupations premières des parlementaires européens, contribue au rayonnement international de la ville et renforce par là même le poids de Strasbourg. L'enjeu du contrat triennal lancé il y a quarante ans était d'amener Strasbourg au même niveau de ville internationale que New York ou Genève. C'est donc un ensemble d'actions cohérent qui a été mené jusqu'à aujourd'hui.
La stratégie du contrat triennal pourrait toutefois être améliorée si elle s'appuyait davantage sur une analyse en amont des besoins et des envies des personnes auxquelles ces actions doivent s'adresser en priorité : les travailleurs des institutions européennes et internationales. À ce titre, nous avons conçu un questionnaire destiné au Parlement européen et au Conseil de l'Europe pour analyser ces problématiques. Les constats qui en ressortent peuvent servir utilement de base au prochain contrat triennal, pour agir au plus près de leurs préoccupations. Les signataires du prochain contrat triennal pourraient ainsi privilégier les investissements structurants pour le renforcement de l'attractivité de Strasbourg et sa région. C'est le sens de notre proposition de résolution européenne.
Dans une même perspective, si le partenariat avec les collectivités territoriales donne toute satisfaction, une plus grande anticipation et une évaluation poussée de l'efficacité du contrat triennal permettraient sans doute la mise en place d'actions cohérentes d'un contrat à l'autre, mais évolutives en fonction des besoins. Il est donc nécessaire de regarder les choses sur la durée, sur le moyen – long terme.
Il convient enfin de saluer les efforts consentis en faveur de la sécurité du Parlement européen à Strasbourg. Au moment où des travaux importants vont être engagés dans le bâtiment Paul-Henri Spaak de Bruxelles, le siège du Parlement européen à Strasbourg offre toutes les conditions propices au bon fonctionnement de la démocratie européenne.
Notre rapport fait des propositions d'amélioration, mais on souhaite véritablement accompagner leur mise en oeuvre, grâce à la mise en place d'une application dédiée, Europe@Strasbourg, pour les nouveaux parlementaires européens, dès le début de la prochaine mandature, pour leur permettre d'avoir toutes les informations nécessaires pour profiter des atouts de Strasbourg. Cette application permettra aux nouveaux députés de se repérer, de se loger et, finalement, de s'approprier rapidement leur nouvel environnement de travail. Sont également répertoriés des lieux très symboliques en Alsace-Moselle, comme le mémorial Alsace-Moselle à Schirmeck, qui est la meilleure des façons de rappeler les raisons symboliques et historiques de la fixation du siège du Parlement européen à Strasbourg. Cette application est un beau geste symbolique et concret pour accueillir en toute amitié les nouveaux eurodéputés. On espère que cette nouvelle première impression, qui pourra être donnée le 2 juillet prochain lors de la séance inaugurale du Parlement européen, pourra en témoigner.
Ce sont par des démarches concrètes de cet ordre que l'on facilitera la vie et le travail à Strasbourg, capitale parlementaire de l'Europe.
Nous tenions, outre ces propositions concrètes que vous retrouverez dans le rapport, à réaffirmer politiquement le caractère central du siège strasbourgeois du Parlement européen. A cet égard, nous sommes très heureux que la représentation nationale puisse s'exprimer à ce sujet. Alors que des initiatives se développent contre le fonctionnement multi-sites du Parlement européen, comme nous vous l'avons exposé, nous souhaitions rappeler que la concentration des participants au processus législatif européen dans un même endroit et dans un même temps contribuait largement à l'efficacité du travail parlementaire. C'est dans cette perspective que nous appelons le Gouvernement, dans cette proposition de résolution européenne, à agir avec détermination en faveur du renforcement du travail parlementaire réalisé au siège du Parlement européen à Strasbourg.
Vous l'aurez compris, saluer l'action des autorités françaises, rappeler le rôle de Strasbourg comme capitale parlementaire de l'Europe et proposer des solutions en faveur de l'amélioration des conditions de vie, de travail et de logement des parlementaires et personnels des institutions européennes à Strasbourg : tel est le sens du rapport qui vous est présenté ainsi que de la proposition de résolution européenne que nous vous proposons d'adopter.
Je voudrai avant de conclure et en nos deux noms cher Eric remercier toutes celles et ceux sans lesquels ce travail n'aurait pas était possible, et en particulier le bureau de la commission et sa présidente pour s'être saisi de cette question cruciale, et vous nos chers collègues pour nous en avoir confié la responsabilité.