J'entends votre préoccupation. En l'état, le texte ne porte que sur les contenus manifestement illicites. Ceux qui ne sont pas manifestement illicites ne font pas l'objet d'une obligation de retrait dans les vingt-quatre heures.
Je vous ferai une réponse en deux temps. Sur le plan juridique, tout d'abord, le Conseil d'État, au paragraphe 26 de son avis, indique que, pour ce qui concerne les contenus simplement illicites, aucune obligation expresse ne peut être imposée car elle ne serait pas conforme aux exigences constitutionnelles. Nous ne pouvons donc pas légiférer sur les contenus gris, qui ne sont pas manifestement illicites.
Sur le plan pratique, ensuite, si un contenu n'est pas manifestement illicite ou s'il suscite une interrogation, le deuxième volet du texte, qui organise la régulation administrative et le lien général avec le CSA, crée une instance de dialogue qui vise à parfaire les choses en formulant des recommandations et des lignes directrices. La seule exigence qui est faite aux plateformes consiste à retirer les contenus manifestement illicites, ni plus ni moins. Dans l'hypothèse où une plateforme ne retirerait pas un contenu dans les vingt-quatre heures parce qu'elle doute de son caractère manifestement illicite, elle pourra s'en justifier dans plusieurs forums, soit devant le juge si elle doit comparaître pour défaut de retrait, car il faudra prouver le caractère intentionnel de l'absence de retrait, soit, en cas de sanction administrative, dans le cadre d'un processus gradué – de la mise en demeure à la sanction, laquelle suppose une instruction qui est elle aussi un lieu d'échange et de dialogue. La plateforme pourra y établir qu'elle se trouvait dans une zone grise et qu'elle n'a pas manqué à son obligation de retrait de contenus manifestement illicites. Cela permettra l'amélioration constante du système qui, par nature, est évolutif car il doit pouvoir s'adapter aux nouvelles formes de haine.