Intervention de François de Rugy

Séance en hémicycle du mercredi 26 juin 2019 à 21h30
Énergie et climat — Article 1er

François de Rugy, ministre d'état, ministre de la transition écologique et solidaire :

C'est un point important, qu'il convient de clarifier. Dans la situation actuelle, tous les pays qui ont signé l'accord de Paris – à l'exception d'un seul, les États-Unis d'Amérique qui, comme on le sait, s'en sont retirés – réduisent leurs émissions de gaz à effet de serre par rapport à leur production. Si donc ce qui est produit sur leur sol et exporté est décompté au titre de leurs émissions de gaz à effet de serre, on ne va pas le compter deux fois. Pour prendre un exemple concret, les émissions de CO2 liées à la production d'un téléphone portable fabriqué en Chine sont comptées au titre des émissions de CO2 de la Chine. Si donc la Chine respecte ses engagements internationaux de réduction des émissions de CO2, le process de fabrication des téléphones portables ou de n'importe quel autre produit devra intégrer une baisse des émissions de CO2, faute de quoi la Chine ne respectera pas ses engagements.

Il faut être sérieux : nous ne pouvons pas faire des efforts pour nos process de fabrication et compter comme nos propres émissions celles d'autres pays qui, eux, ne font pas d'efforts dans leurs propres process de fabrication et touchent néanmoins les retombées économiques de leurs exportations. Il existe certes en France une certaine culture qui fait que nous avons toujours un peu mauvaise conscience et que nous considérons que c'est à nous de faire des efforts, et pas aux autres pays, mais la démarche de l'accord de Paris sur le climat consiste bien à engager des efforts conjoints, chiffrés et évalués pays par pays et tenant compte de la situation de départ, laquelle diffère selon les pays – certains étaient peu émetteurs voilà cinquante ans, voire trente, tandis que d'autres l'étaient davantage. On ne peut pas compter deux fois les émissions.

La démarche liée à l'empreinte carbone est intéressante pour savoir si la France n'achète pas de nombreux produits qui ont généré des émissions de CO2, ce qui permet indirectement de mesurer si les pays dont nous importons ces produits font ou non des efforts. Sinon, il s'agit d'un vrai problème de fond quant à notre conception des accords internationaux sur le climat : on considérerait par avance que certains pays ne font pas d'efforts, ce qui fait tomber tout l'édifice de l'accord de Paris sur le climat. J'appelle donc vraiment à voter contre ces amendements.

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