En effet, il y a beaucoup à faire, beaucoup d'éléments qui compliquent la situation. L'Afghanistan n'est pas la Suisse. Je vais commencer par les enjeux migratoires, soulevés par plusieurs d'entre vous. À l'heure actuelle, les Afghans constituent, en Europe, la deuxième population dans le flux migratoire. Par exemple, sur 49 000 migrants arrivés par la Grèce, 11 000 sont des Afghans. Parmi ceux qui arrivent en France, la plupart ne souhaitent pas rester sur le territoire national mais cherchent plutôt à atteindre le Royaume-Uni. Cet accord-cadre doit nous permettre de réguler les flux migratoires en provenance d'Afghanistan dans la dignité. Il n'est pas exact d'indiquer que nous refoulons des ressortissants afghans au péril de leur vie. Il y a en effet au sein de l'Union européenne des pays qui considèrent qu'il existe des régions sûres en Afghanistan, notamment l'Allemagne, la Suède et la Finlande, mais ce n'est pas notre cas. Le taux d'acceptation des demandes d'asile pour les ressortissants afghans est, en France, de 67 % constituant l'un des taux les plus élevés de l'Union européenne. Il est important de le souligner, nous ne déméritons pas. Par ailleurs, un tel accord politique nous permet d'accompagner les personnes renvoyées en Afghanistan.
Cet accord nous permettra également de lutter contre le trafic de drogue. Il est vrai que l'Afghanistan est le premier producteur de pavot et d'héroïne, avec 85 % de la production mondiale. Il faut pouvoir endiguer et empêcher cette production de drogue. Comment pouvons-nous agir ? Tout d'abord, Il faut rappeler qu'il y a déjà eu 20 % des surfaces agricoles qui étaient auparavant dédiées à la culture du pavot qui ont été remplacées par des cultures autres. À cette date, le soutien au changement d'affectation des terres a produit peu de résultats satisfaisants. Il nous faut pour cette raison changer de méthode. Cet accord, en offrant un nouveau cadre, le permet.
Je crois qu'il est inexact de dire que la population afghane ne veut pas de cet accord. Ceux qui n'en veulent pas sont les groupuscules terroristes. Dans cet accord, il est précisé que la paix doit être établie par les Afghans eux-mêmes. L'Union européenne souhaite justement favoriser et soutenir le dialogue inter-afghan, qui est actuellement au point mort. Les divers processus de paix en cours mobilisent notamment les États-Unis qui discutent avec les talibans, ces derniers refusant de parler avec le gouvernement afghan. L'une des principales revendications des talibans concerne le retrait des troupes américaines. De leur côté, les Russes ont effectivement organisé plusieurs conférences réunissant certains pays riverains de l'Afghanistan, mais là, pareillement, l'ensemble des acteurs politiques afghans n'était pas présent et notamment pas le gouvernement central. Le Président Ashraf Ghani, a réuni, pour sa part une Loya jirga (grande assemblée) regroupant 3000 représentants de tout le pays. Cette réunion a été boudée par les talibans et l'opposition. C'est un sac de noeuds : tout le monde parle avec quelqu'un mais personne ne parle ensemble. Il est pourtant essentiel de faire parler les Afghans entre eux. Il faut qu'ils s'emparent du processus de paix. La population afghane a envie de paix, elle est épuisée par ces années de guerre.
Concernant l'AFD, celle-ci a fermé son bureau à Kaboul en 2017, en raison du contexte sécuritaire dégradé. L'AFD continue cependant de superviser les projets qui avaient été initiés auparavant mais ne compte pas, à ce stade, en relancer de nouveau.
La France ne dispose plus de forces combattantes en Afghanistan mais contribue au financement commun de la mission Resolute Support à hauteur de sa clé de contribution au budget de l'OTAN, de l'ordre 10,5 %.
Dans un cadre bilatéral, la France apporte une aide à l'Afghanistan, notamment dans le domaine de l'éducation grâce aux deux lycées français de Kaboul qui participent au rayonnement de la France et de la francophonie.
Nous pouvons, en effet, nous interroger sur la pertinence d'un accord dans un contexte tel que celui que connaît actuellement l'Afghanistan. Mais demandons-nous plutôt ce qu'il pourrait se passer si nous ne faisions rien. Une situation instable en Afghanistan finira forcément par avoir des répercussions en Europe. C'est pourquoi il nous faut trouver des solutions au plus vite.