Plus de deux mois après le tragique incendie de Notre-Dame de Paris, nous nous réunissons pour cette nouvelle lecture, conséquence de nos divergences avec le Sénat, mais toujours avec les mêmes objectifs : la conservation et la restauration de ce haut lieu du patrimoine ; la sécurisation et la transparence des dons collectés pour aider à sa reconstruction ; l'exemplarité des travaux de restauration. Notre examen en première lecture avait permis de renforcer ces priorités, notamment grâce à l'introduction de conventions entre collecteurs et bénéficiaires à l'article 3 et à la création d'un comité scientifique – à laquelle nous tenions beaucoup – indépendant et chargé d'émettre des recommandations et de formuler toute proposition relative aux travaux.
Sur les dix articles que comportait le texte que nous avions adopté, seul l'article 6 a été adopté conforme. L'article 8 ter, ajouté par nos collègues sénateurs, apporte une précision importante quant à la consultation de la Commission nationale du patrimoine et de l'architecture : elle devra être régulièrement informée et consultée sur l'avancement des études et des travaux. Mais d'autres ajouts ne vont pas dans le sens des objectifs que nous poursuivons. Ce chantier s'annonce exceptionnel, le monument hors norme, l'attente exigeante ; la réalisation sera colossale.
Certains ont pu s'interroger sur la nécessité de cette loi : je la réaffirme au nom du groupe La République en Marche. Pour mener ce projet à bien, il ne s'agit pas de s'affranchir des règles existantes, mais d'être à la hauteur de l'exigence de ce chantier exceptionnel, de cette cathédrale, témoin et actrice de notre histoire nationale. Pour cela, comme vient de l'évoquer la rapporteure, il est nécessaire de revenir à la version adoptée par l'Assemblée nationale en séance le 10 mai, qui permet d'accompagner dans les meilleures conditions le formidable élan de générosité survenu dès les premières semaines après l'incendie, mais aussi d'organiser la capacité d'intervention de l'État pour la reconstruction de ce bâtiment unique.
Alors que le diagnostic n'a toujours pas été réalisé, la générosité pour Notre-Dame s'est considérablement affaiblie : seuls 9 % des promesses des dons ont été versés. L'heure n'est donc plus à la polémique sur les éventuels excédents, mais à la remobilisation des donateurs. Plusieurs collectivités territoriales ont retiré leurs dons ; la Fondation du Patrimoine a mis fin à la collecte. Aux donateurs et aux Français, nous disons qu'ils peuvent avoir confiance dans l'utilité et l'utilisation de leurs dons pour la conservation et la restauration de Notre-Dame, ainsi que la formation initiale et continue de ceux qui y travaillent et y travailleront.
Depuis l'adoption de la loi en séance, la situation a évolué, concernant notamment l'objet des articles 8 et 9, principaux facteurs d'inquiétude et de polémique. Si la création de l'établissement public devait être confirmée par ordonnance, il serait placé sous la tutelle du ministère de la culture, comme l'ont précisé nos collègues sénateurs et comme un amendement du groupe de la Gauche démocrate et républicaine (GDR) le demandait en première lecture. Ainsi, ceux qui savent et savent faire géreront avec l'État les fonds recueillis et rebâtiront Notre-Dame.
L'article 9 a généré des craintes, que nous avons entendues, mais aussi de nombreux fantasmes, parmi lesquels de fausses intentions prêtées au Gouvernement ou encore de supposées dispositions contraires aux normes internationales. Le caractère exceptionnel de ce chantier, en raison de sa taille et de son importance patrimoniale et historique, justifie les dérogations, sans que cela ne diminue la nécessité de réaliser une restauration exemplaire, dans les règles de l'art. La visibilité sur l'avancée du chantier a d'ores et déjà permis de supprimer de la liste des dérogations les règles de commande publique et de construction.
En outre, nous ratifierons les ordonnances dans un futur projet de loi et aurons l'occasion de vérifier les conditions de leur mise en oeuvre, grâce à la mission d'information chargée du suivi de l'application de la loi pour la conservation et la restauration de Notre-Dame de Paris proposée par notre président, Bruno Studer. Le Parlement assurera donc pleinement son rôle de contrôle.
Le chantier qui s'est ouvert est celui du façonnement de notre histoire, d'une nation qui oeuvre collectivement à la sauvegarde de son patrimoine et à la mise en valeur de notre art et de nos artisans. Ce projet de loi permettra d'appuyer et d'encourager cette dynamique exceptionnelle.