Au-delà des fantasmes, l'industrie pharmaceutique s'est considérablement développée et concentrée au cours des vingt dernières années. Ses moyens et son influence publique sont importants – certainement plus que celle du lobby des airbags dont vous parliez ce matin. Il est d'autant plus important de savoir faire face à cette industrie que, contrairement à celui des airbags, le prix du médicament a une influence sur les comptes de la sécurité sociale.
Cette influence est telle qu'un conseiller du candidat Macron a pu bénéficier de plus de 80 000 euros de frais de restaurant, de logement et de transport, après avoir effectué de nombreuses interventions pour le laboratoire Servier entre 2013 et 2016. Puisqu'il a dû partir après ces révélations, nous sommes désormais à l'aise pour évoquer le poids de l'industrie pharmaceutique, et faire le point sur les outils dont nous disposons afin d'établir un rapport de force acceptable.
Or nos outils sont largement insuffisants. Le Comité économique des produits de santé (CEPS) chargé de la négociation des prix, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) chargée de la régulation des recherches biomédicales ainsi que la Haute autorité de santé (HAS) sont les trois instances qui font face au secteur du médicament. Leurs moyens sont trop faibles pour qu'elles puissent réagir de façon adéquate, comme en témoigne le scandale du Levothyrox.
Nous considérons que les missions de ces institutions, négociation des prix, régulation éthique et évaluation, ne devraient pas être séparées ; si l'on veut qu'elles soient fortes devant une industrie puissante, nous prônons leur fusion au sein d'un pôle public du médicament. Ce pôle public aux moyens renforcés sera de taille à négocier et à réguler le secteur du médicament, et pourra rassurer la population française sur la capacité de l'État à maintenir le rapport de force.