Cette loi, dont certains ont relevé le côté liberticide, a donné lieu à des débats enflammés outre-Rhin ; la procédure, qui se veut à la fois efficace et transparente, permet de faire bloquer dans les vingt-quatre heures un contenu jugé illicite. Toutefois, le résultat n'est pas optimal : les chiffres publiés par les différentes plateformes révèlent beaucoup de vent médiatique et peu de résultats concrets.
Nous sommes donc, avec ce texte, invités à faire mieux que nos amis allemands, qui sont d'ailleurs en train de remettre l'ouvrage sur le métier. Mark Zuckerberg a déclaré le 10 avril 2018 devant le Sénat américain que Facebook était responsable du contenu diffusé sur sa plateforme bien que l'entreprise ne le produise pas. On peut en déduire une réelle responsabilité de tous les fournisseurs d'infrastructures, que ce soient les fournisseurs d'accès à internet, les moteurs de recherche, les plateformes de réseaux sociaux ou les hébergeurs.
Un an plus tard, le 30 mars 2019, le même Mark Zuckerberg affirmait que « les gouvernements doivent assurer un rôle plus actif pour mettre à jour les règles afin de préserver le meilleur d'internet – la liberté d'expression et la possibilité [… ] d'innover – tout en protégeant la société contre certains maux, comme les discours haineux ».
On mesure l'évolution entre ces deux déclarations du puissant PDG de Facebook, qui coïncident d'ailleurs avec le travail parlementaire conduit par Laetitia Avia, d'abord dans le cadre de la mission de lutte contre le racisme et l'antisémitisme qui lui a été confiée par le Président de la République en mars 2018, ensuite dans la version initiale de la proposition de loi, qu'elle a déposée le 20 mars 2019.
En commission, le texte vient d'être totalement réécrit – coïncidence – après la rencontre d'Emmanuel Macron et Marck Zuckerberg le 10 mai dernier autour du thème de la lutte contre les contenus haineux sur internet. J'approuve cette réécriture plus satisfaisante que la première version, car elle tient compte de l'avis du Conseil d'État, qui est arrivé à point nommé le 16 mai dernier.
On pouvait d'ailleurs s'étonner que, pour un texte d'une telle importance, et sans vouloir minimiser le travail remarquable de la rapporteure, on n'ait pas eu dès le départ un projet de loi.