Intervention de Philippe Dunoyer

Séance en hémicycle du mercredi 3 juillet 2019 à 15h00
Haine sur internet — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Dunoyer :

L'incitation à la haine, à la violence, à la commission d'actes de terrorisme, tout comme l'injure raciste, sexiste, handiphobe ou homophobe, pour ne citer que ces exemples, ne sont pas plus tolérables selon qu'ils sont vus ou entendus par 1 000, 1 million ou 10 millions de personnes. Ils sont simplement intolérables.

Au-delà des modifications qu'il conviendrait d'apporter, je souhaiterais revenir sur un point dont nous avons déjà débattu lors de la présentation des motions de rejet préalable et de renvoi en commission, et qui ne peut malheureusement pas être résolu par de simples amendements.

Cette proposition de loi pose, au fond, la question fondamentale du rôle que nous souhaitons donner aux réseaux sociaux, moteurs de recherche et autres plateformes dans la lutte contre la diffusion de contenus haineux. Madame la rapporteure, nous souscrivons au choix d'enjoindre aux opérateurs de plateformes de remplir cette mission. L'accomplissement de cette tâche nouvelle confiée aux opérateurs comporte cependant un risque, celui de passer d'un abus à un autre en glissant de la nécessité de faire cesser un usage manifestement illicite de la liberté d'expression vers une restriction abusive par les opérateurs de cette même liberté. Cet autre abus ne serait pas plus tolérable.

Face à ce risque bien réel, il aurait paru opportun de réfléchir à un dispositif de modération publique. La méthode employée pour la plateforme d'harmonisation, d'analyse, de recoupement et d'orientation des signalements, dite PHAROS, pourrait servir de base de réflexion, mais il faudrait bien sûr adopter une procédure simplifiée et y consacrer beaucoup plus de moyens humains.

Le parquet spécialisé évoqué par le Gouvernement entre dans cette logique vertueuse, en permettant à des magistrats formés d'enquêter et de sanctionner. Il est cependant regrettable que le volet pénal de cette proposition de loi ait été présenté au dernier moment, par des amendements du Gouvernement.

Sans sous-estimer une seconde la capacité des mastodontes que nous visons à tenter d'échapper à toute forme de régulation, cette proposition de loi présente le mérite évident de poser en France, après l'Allemagne et l'Australie, une limite claire à la libre diffusion sur internet de propos insupportables et destructeurs du vivre ensemble. Cette limite, c'est celle du respect de la dignité de chaque femme, de chaque homme et de chaque enfant.

La dignité humaine est peut-être la dernière chose qui différenciera demain l'intelligence humaine de l'intelligence artificielle. Ne tolérons plus que des contenus haineux l'entachent durablement.

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