Sur ce point, la loi pour la confiance dans l'économie numérique avait retenu la notion, plus souple, de délai prompt, laquelle permet de réduire le risque de retraits tous azimuts. Au contraire, le délai ici proposé pourrait conduire, à la suite d'un signalement, à retirer des contenus sans autre forme d'examen. Les services de police, par exemple, peuvent procéder, depuis leurs comptes, à des signalements. Qui peut penser qu'une plateforme osera défier la police en ne procédant pas, dans ce cas, à un retrait immédiat ? Vous ouvrez donc une brèche, et rendez possibles des dérives inquiétantes. Vous agissez comme si la République était assurée de se trouver éternellement en de bonnes mains.
Enfin, la proposition de loi ne vise que très peu les auteurs mêmes de propos haineux : ils ne seront presque jamais poursuivis, même si leurs adresses IP pourront être signalées à la justice française. Elle ne s'intéresse pas vraiment non plus à la mécanique perverse qui nourrit la haine, notamment par le biais de certains réseaux sociaux ; car, chacun le sait, ces réseaux ont besoin de buzz, d'audience, parce que le buzz a une valeur commerciale. Le cercle vicieux à casser est bien celui-ci : la haine rapporte beaucoup d'argent.