Madame la rapporteure, je ne vous accuserai pas de vouloir vous ériger en censeur. Votre travail et la sincérité qui vous anime plaident en votre faveur. Je ne peux néanmoins m'empêcher de vous faire part ici de mes craintes : en effet, combien d'erreurs ont été commises au nom des principes les plus nobles ?
L'examen de l'article 1er en commission a montré que l'extension du domaine de l'infraction n'avait pas de limites, et pour cause. Mais le champ proposé ici est si large que les représentants des plateformes, qui savent pourtant que de l'exemplarité dont elles feront preuve en la matière dépend en partie leur avenir, se disent très inquiets quant à leur capacité, dans un délai aussi court, de décider de ce qui relève ou non de l'une ou de l'autre de ces incriminations. Ne craignez-vous donc pas, madame la rapporteure, une forme de censure automatique ? N'est-il pas dangereux de confier à des opérateurs privés un pouvoir qui devrait relever du juge ? N'est-il pas inquiétant que, désormais, une part importante du débat public se déroulera sous la surveillance étroite de plateformes étrangères ?
Nul ici ne conteste, vous l'aurez compris, la nécessité de combattre la haine sur internet et de mieux défendre les victimes ; mais êtes-vous persuadée que la voie législative est la plus adéquate pour cela ?