« Au début, c'étaient des insultes comme "chaudière", "pétasse", "salope", "pute", des insultes qui aujourd'hui me paraissent si douces. C'était tout au long de la journée, sans aucune pause, sur chaque réseau social. [... ] Je répondais à chacun d'entre eux, je signalais chacun des faux comptes qui avaient été créés pour m'insulter, mais au bout de deux mois j'ai abandonné car ça ne faisait qu'empirer les choses. [Puis c]e n'étaient plus de simples insultes : c'étaient des photomontages qu'ils menaçaient de publier. [... ] À la fin, ils étaient une cinquantaine à me harceler tous les jours. Cela a duré huit mois, jusqu'au jour où [mon ami] s'est suicidé. »
Ces mots sont ceux de Lucie, une jeune fille de 12 ans. Il s'agit de l'un des témoignages, parmi des centaines d'autres, de ce qui se passe aujourd'hui sur les fameux réseaux sociaux, sur internet. Et, comme chacun d'entre eux, il est insupportable.
La proposition de loi qui nous est présentée a pour but que ces drames cessent, qu'enfin ce qui est intolérable dans la vie matérielle le soit tout autant dans la vie sociale virtuelle – je rejoins mon collègue Balanant sur ce point. Parfois – souvent, chez les plus jeunes – , l'une prolonge l'autre ; on ne peut le nier. Il fallait donc agir très vite en privilégiant l'efficacité. Je remercie très chaleureusement notre rapporteure, Laetitia Avia, d'avoir tracé le chemin.
Si l'article 1er vise à obliger au retrait des propos haineux dans les vingt-quatre heures, c'est bien pour réagir efficacement à des situations dramatiques. Ne nous leurrons pas : on peut crier à l'amalgame, à la confusion, mais le phénomène est réel ; des milliers de jeunes, des milliers de personnes vivent cette situation ; ce n'est plus tolérable. Nous pouvons être fiers d'agir de manière responsable contre les discours de haine, le harcèlement, la provocation au terrorisme et son apologie, les atteintes à la dignité de la personne humaine, les discriminations envers une personne ou un groupe de personnes à raison de l'origine, d'une prétendue race, de la religion, de l'ethnie, de la nation, du sexe, de l'orientation sexuelle, de l'identité de genre ou du handicap.
En la matière, la cohérence est globale : l'ensemble des droits que nous allons protéger est aussi consacré dans la Constitution, dans la Convention européenne des droits de l'homme et dans la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Ce nouveau texte va permettre de consacrer enfin le respect effectif de l'altérité dans l'espace numérique.