Juste un mot sur un point que j'ai évoqué : les petits établissements pour lesquels la réforme a un effet très lourd avec les 30 000 euros que vous avez signalés. Je dois dire que j'ai eu peu de réclamations, mais j'en ai eu quelques-unes. J'ai demandé qu'on fasse une étude de la proportionnalité de cette réforme à l'intérieur de l'Autorité pour bien mesurer la portée en termes d'ex post, et nous saurons en tirer les conséquences pour la prochaine campagne.
Il y a un certain nombre de questions sur l'organisation que nous mettons en place pour assurer notre rôle en matière de finance durable.
L'AMF est déjà engagée. Cette année, nous allons diffuser deux rapports : un rapport sur la manière dont les entreprises cotées prennent cette dimension climatique, en particulier dans leur information extra-financière, donc sur les émetteurs, et un rapport sur la manière dont les sociétés de gestion communiquent et intègrent dans leur processus cette dimension. C'est, en gros, l'article 173. Il faut reconnaître que le dispositif européen qui se met en place est très proche du dispositif français, mais il faut que nous montions – en particulier, la loi « PACTE » nous a demandé plus – et nous sommes en train de mettre en oeuvre la bonne organisation.
Pour moi, la bonne organisation est du type de celle dont nous avons d'habitude, c'est-à-dire que quand nous faisons des travaux, nous les faisons challenger par des comités qui représentent les intérêts de la place, experts sur ces sujets, avant de les diffuser pour être sûrs qu'il y a une qualité et que cela réponde effectivement aux besoins. Là, nous avons par exemple une commission épargnants qui fait cela dans un certain nombre de domaines. Je crois qu'il faut que l'on trouve le bon interlocuteur de place pour challenger en temps réel nos travaux.
J'attire aussi l'attention sur le fait que nous avons des programmes de contrôle ciblés sur ces éléments-là. Nous allons voir auprès de sociétés de gestion ou d'autres intermédiaires s'ils font effectivement ce qu'ils disent. Comme je l'évoquais, je crois qu'il faut que nous ayons une approche cohérente au niveau français. Nous avons donc des débats avec l'ACPR et avec le ministère pour avoir la meilleure utilisation de nos moyens, mais il y a un enjeu très fort de crédibilité, parce que nous devons absolument éviter ce qu'on appelle le green washing, c'est-à-dire le dévoiement de cette démarche-là. Il serait terrible à beaucoup de points de vue, d'abord parce qu'on a besoin des financements bien ciblés et parce que je crois que l'industrie financière, et c'est ce que j'essaie de leur dire, joue gros dans cette affaire-là. Elle a ainsi l'occasion de se réconcilier avec le plus grand nombre si elle est sérieuse. Nous sommes là pour nous assurer qu'elle est sérieuse. C'est dans cet esprit que nous travaillons.
Sur la prochaine crise, je n'ai pas répondu parce que personne ne sait. Je crois que nous avons quand même renforcé de façon extraordinaire l'arsenal qui assure la solidité des intermédiaires et les informations qui nous permettent de réagir vite quand il se passe quelque chose. Cela étant, le risque peut ne pas venir, et c'est un peu ce que nous voyons aujourd'hui, du système financier lui-même. Il peut venir du système réel, quelque part, qui pour des raisons x ou y peut connaître un retournement très fort.
Ce que l'on voit aujourd'hui c'est que les taux étant très, très bas, les niveaux de valorisation dans beaucoup de domaines sont très élevés. Avec un niveau très élevé de valorisation, les risques de correction sont forts. La plupart des risques de correction peuvent être absorbés aujourd'hui par les mécanismes qui ont été mis en place, mais si cela se conjugue avec un retournement économique de grande ampleur, alors nous avons globalement un problème.
On parle souvent des prêts à effet de levier, qui sont très importants, avec des mécanismes (« CLO »), d'obligations adossées à des prêts à effet de levier, qui ressemblent un peu à ce qu'on avait connu dans le subprime avant la crise. Tout ceci est vrai. Cela n'a pas la même ampleur, mais c'est très peu répandu en tant qu'émissions en Europe et en France en particulier. Néanmoins il y a une vigilance, parce qu'il y a une interconnexion massive. En outre, j'observe qu'il y a une concentration de plus en plus forte sur un nombre de plus en plus réduit d'établissements, et ces établissements sont donc tout particulièrement « risqués ».
L'affaire Deutsche Bank soulève plutôt pour moi l'idée de dire : « y a-t-il encore en Europe des acteurs financiers européens de taille mondiale qui peuvent accompagner le développement des entreprises européennes dans le monde ? »
Pardonnez-moi, madame Dupont : pourriez-vous peut-être me transmettre votre question ? J'y apporterai une réponse plus précise que celle que je pourrais vous donner aujourd'hui, parce que vous faites référence au code de l'énergie que je ne suis pas sûr de bien maîtriser.
Par ailleurs, il est clair qu'aujourd'hui, quand on voit les activités qui se relocalisent à Paris, en particulier beaucoup d'activités de marché à valeur ajoutée, c'est un élément qui rajoute à l'attractivité de la place. À l'arrivée, je crois qu'après le Brexit, nous allons avoir un monde multipolaire en Europe financière – il y a Francfort, Paris, Luxembourg, Amsterdam, Dublin et il y en a même d'autres, ce qui renforce la nécessité de convergence de supervision à l'intérieur de l'Union. Au cours du temps, dans les années qui vont venir, les choses vont se redistribuer. Ne pensons pas que la photographie du Brexit ne changera pas au fil du temps. Je crois que Paris a beaucoup d'atouts pour poursuivre dans la direction qui a été prise.
S'agissant de la question de Mme Cariou, le recouvrement ne relève pas de l'AMF. C'est une unité qui est localisée en province. On suit cela de très près. Nous avons des réunions avec la commission des sanctions pour faire le point deux fois par an. C'est un point incontournable de cette réunion en disant : « où en sommes-nous dans le recouvrement des sanctions ? » Si nous infligeons des sanctions qui ne sont pas recouvrées, cela ne sert à rien. Le taux de recouvrement est de plus de 95 % quand la personne qui est sanctionnée est localisée en France. Lorsque la personne est localisée à l'étranger, et parfois même en Chine, c'est un exemple, là, c'est beaucoup plus laborieux, de l'ordre de 30 à 35 %. C'est vraiment un sujet qui est extrêmement suivi, avec une collaboration très forte. À chaque fois que nous pouvons, nous mettons sous séquestre le plus tôt possible, parce qu'il y a une tendance à l'évaporation progressive. Mettre sous séquestre, c'est aller devant un juge. Cela ne se fait pas comme ça, mais c'est ce que nous essayons de faire.
Il y a une revue de MIF qui arrive et elle est obligatoire, ne serait-ce que parce qu'en Europe on a une tendance extraordinaire à mettre en niveau un ou deux un luxe de détails incroyables qui fait que par exemple, quand le Brexit arrive, des choses deviennent impossibles à mettre en oeuvre, des seuils divers et variés qui ont été calculés avec le Royaume-Uni dans l'Union. La question, qui est complexe, consiste en ce que je disais tout à l'heure : trouver le bon équilibre entre ce qui est demandé et l'efficacité de ce qui est demandé, parce qu'en particulier l'idée que l'on se penche sur la gouvernance des produits produit par produit et non sur une approche patrimoniale plus vaste a une tendance à écarter du choix d'investissement ce que l'on voudrait développer en l'occurrence. C'est quelque chose d'assez important, mais c'est à la frontière entre MIF et une autre réglementation qui s'appelle PRIPS. Nous avons mis cela à notre à notre ordre du jour pour en discuter.
Je prends simplement un exemple : dans le cadre de MIF, on peut interdire des produits. L'ESMA peut le faire, l'AMF peut le faire, aujourd'hui par tranches de trois mois renouvelables, mais pas indéfiniment. Au-delà, c'est aux autorités nationales de le faire. Nous l'avons fait pour les options binaires au niveau de l'ESMA et les contrats pour différence, les CFD, à effet de levier trop fort. Très bien, mais maintenant, cela va être fini, c'est aux autorités nationales de le prendre en charge. Chacun ne va donc en faire qu'à sa tête.
Il y a beaucoup d'aspects de MIF qui demandent une revue. On en a répertorié un certain nombre. La Commission n'est pas pressée, je dois dire, d'agir dans ce domaine-là et elle n'envisage pas une revue de très grande ampleur. Mais je citais la recherche, la transparence des marchés. A-t-on vraiment envoyé sur les marchés les plus transparents l'essentiel des opérations ou non ? Tout ceci n'est pas évident.