Intervention de Philippe Dunoyer

Réunion du mercredi 3 juillet 2019 à 9h35
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Dunoyer, rapporteur :

Sous des dehors techniques, la proposition de loi que je vous présente est un texte essentiel pour le droit calédonien. Il fait application d'une procédure commune à la Polynésie française et à la Nouvelle-Calédonie : la procédure d'homologation des peines d'emprisonnement.

En Nouvelle-Calédonie, le congrès et les trois assemblées provinciales peuvent créer des infractions pénales dans les domaines de compétences qui leur sont propres et les assortir de sanctions, cette capacité qui leur est accordée étant encadrée par la loi organique statutaire du 19 mars 1999. Cependant, si ces institutions sont pleinement compétentes pour instaurer des amendes et des peines complémentaires, toute peine d'emprisonnement requiert une homologation législative. Cette procédure se situe à la croisée, en quelque sorte, des compétences propres des institutions calédoniennes et de la prérogative régalienne en matière de justice pénale. Validée par le Conseil constitutionnel dans une décision du 28 juillet 2011, elle est nécessaire pour que les peines d'emprisonnement puissent être prononcées valablement par les juridictions répressives.

Notre proposition de loi concerne une cinquantaine de peines – donc d'infractions adoptées par la Nouvelle-Calédonie – qui, en l'état, ne sont pas effectives.

Pendant plusieurs mois, nous avons travaillé en lien étroit avec la Chancellerie afin de comparer les infractions calédoniennes avec celles qui existent dans le droit commun, afin de vérifier la satisfaction des trois conditions fixées par la loi organique. Il faut d'abord que nous soyons bien dans des domaines de compétence des institutions calédoniennes. Ensuite, la classification des délits doit être respectée. Enfin, ce qui est le plus compliqué peut-être, le quantum de la peine ne doit pas excéder celui qui est prévu pour une infraction de même nature dans le droit commun. Ces vérifications ont été réalisées avec le concours du ministère de la justice. Toutes les homologations peuvent donc être délivrées.

Si, comme je le signalais, cette proposition de loi est essentielle pour le droit calédonien, c'est qu'au-delà de la cinquantaine de peines en attente, il s'est déjà écoulé cinq ans depuis la plus ancienne de ces demandes d'homologation, émise par le congrès en 2014. Ce sont cinq années au cours desquelles cette peine d'emprisonnement n'est pas entrée dans le droit positif, n'a pas pu être appliquée par les juridictions. Ainsi, le harcèlement moral et sexuel au travail, passible en principe de peines d'emprisonnement prévues depuis février 2014, ne peut-il être réprimé, faute d'homologation. Il en va de même d'autres délits dans les domaines de la santé, des assurances et de l'environnement. Il y a donc urgence.

Je voudrais, pour conclure, me tourner vers l'avenir. Notre pratique de l'homologation n'est pas satisfaisante. Elle emprunte souvent des chemins de traverse, passant par des amendements présentés sur des projets de loi portant sur l'outre-mer, mais dont ce n'est pas l'objet. Il serait préférable, pour la Nouvelle-Calédonie et pour la Polynésie française, que nous puissions instaurer un rendez-vous annuel qui nous permettrait d'homologuer avec régularité ces dispositions pénales.

Je voudrais vous remercier, madame la présidente, d'avoir pris l'initiative d'engager pour cette proposition de loi la procédure d'examen simplifiée. Je crois que votre souhait d'aller au plus vite est partagé par votre homologue du Sénat, le président Philippe Bas. Je remercie également le Gouvernement d'avoir compris l'importance de ce texte en l'inscrivant à l'ordre du jour de la session extraordinaire et en engageant la procédure accélérée.

L'attente fut longue. Mais elle va être prochainement satisfaite, au terme de nos débats qui seront, je l'espère, consensuels.

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