Un grand merci à Monica Michel, qui vient de nous rappeler avec talent les enjeux de ce protocole sur les compétences de la prévôté avec Djibouti.
Ce texte nous permet d'évoquer la question de la présence de la France à Djibouti et dans cette région absolument stratégique qu'est la Corne de l'Afrique. Djibouti ne se situe qu'à quelques dizaines de kilomètres de la péninsule arabique, sur le détroit de Bab el-Mandeb qui contrôle l'accès au canal de Suez, l'un des couloirs de navigation maritime les plus fréquentés au monde. L'essentiel du commerce maritime entre l'Asie, l'Europe et l'Afrique passe au large de Djibouti, dont le port en eaux profondes constitue la porte d'entrée naturelle vers toute l'Afrique de l'Est.
Je suis absolument convaincue que la France doit jouer un rôle encore plus actif dans cette région du monde, à commencer bien sûr par Djibouti, pays avec lequel nous sommes unis, depuis longtemps, par des liens très forts. C'est avec cette conviction que j'ai conduit une délégation de la commission des affaires étrangères, avec Marion Lenne, Christian Hutin et Didier Quentin, à Djibouti et en Éthiopie en mai 2018, puis en Érythrée en février dernier. Sur place, malgré – ou à cause de – la présence d'autres acteurs, la France est très attendue. Nous devons répondre à cette attente et conforter notre relation bilatérale avec Djibouti. La visite du Président de la République, en mars dernier, est à mon sens un signal fort de ce réinvestissement attendu de la France à Djibouti et dans cette région du monde.
Nous avons avec Djibouti une relation ancienne et unique. Cette relation est historique, culturelle, linguistique et stratégique.
La France est le seul pays avec lequel Djibouti a conclu un accord de défense. Mme la rapporteure a rappelé l'importance de notre présence militaire : Djibouti est notre plus grosse base militaire à l'étranger, avec 1 450 militaires présents, en famille pour la moitié d'entre eux. Cette présence est très appréciée sur place. La Chine y a inauguré en août 2017 sa première base militaire à l'étranger, pouvant accueillir jusqu'à 10 000 hommes. Les Américains sont également présents, à hauteur de 4 000 hommes. Dans ce contexte, la France doit tirer une conclusion évidente : nous devons impérativement maintenir et consolider notre présence militaire à Djibouti.
Sur le plan économique, l'endettement de Djibouti vis-à-vis de la Chine devient insoutenable : les créances chinoises représentent 60 % de la dette du pays. Comme dans d'autres pays africains, la Chine se rembourse, par exemple, en prenant le contrôle des infrastructures. Cette question de l'endettement de l'Afrique vis-à-vis de la Chine est un défi majeur auquel la France, l'Europe, et la communauté internationale devront apporter des réponses. En tout état de cause, comme nous l'ont dit les principaux acteurs économiques, c'est le bon moment pour relancer la présence et les investissements des entreprises françaises et européennes à Djibouti.
Sur le plan culturel et linguistique, Djibouti est le seul pays francophone d'Afrique de l'est. La langue française est une richesse qui nous unit et que nous devons impérativement préserver. Mais la France doit faire plus. Le français est une langue nationale de Djibouti, mais de moins en moins de jeunes le parlent. Les moyens de l'Institut français méritent vraiment d'être renforcés pour que vive cet îlot de francophonie.
Nous devons aussi regarder vers la Corne de l'Afrique et soutenir les efforts du premier ministre éthiopien Abiy Ahmed. J'espère qu'à long terme, la paix avec l'Érythrée portera ses fruits. La main tendue par le premier ministre éthiopien à la Somalie contribuera à la stabilité de la région, malgré notre grande inquiétude sur l'évolution en cours au Soudan. En tout cas, mes chers collègues, je suis convaincue que la France peut s'imposer comme un acteur en faveur de la paix et de la prospérité dans cette grande région, au carrefour des mondes africain et arabe.