La proposition de loi visant à adapter l'organisation des communes nouvelles à la diversité des territoires, adoptée par le Sénat le 11 décembre 2018, a pour objectif de répondre à une nécessité pour notre pays et nos territoires : faciliter les regroupements de communes dans des communes nouvelles et inciter les communes à se regrouper, tout en assurant l'acceptabilité de ces regroupements par les habitants et par les élus.
La délégation aux collectivités territoriales s'est naturellement saisie de l'ensemble des articles de la proposition de loi, en raison de ses implications sur le dispositif des communes nouvelles et, plus largement, de son impact potentiel sur l'organisation du bloc communal.
Largement enrichie lors de son examen par le Sénat, cette proposition de loi comporte aujourd'hui quatorze articles qui proposent diverses dispositions tout à fait bienvenues visant à renforcer encore l'incitation à la création de communes nouvelles.
À ce stade de la discussion, je souhaite me concentrer sur la disposition centrale, qui est aussi la plus délicate : celle prévue à l'article 4, qui vise à permettre à une commune nouvelle créée sur le périmètre d'un établissement public intercommunal préexistant de ne pas rejoindre un nouvel EPCI et de constituer ce qu'il est convenu de nommer une commune-communauté, c'est-à-dire une commune exerçant elle-même les compétences qui sont ailleurs, de droit ou facultativement, exercées par l'EPCI.
Au premier abord, il est délicat de juger si la possibilité pour une commune nouvelle de se constituer en commune-communauté est une bonne mesure. Au-delà des aspects purement techniques, et notamment des questions budgétaires et fiscales, la commune-communauté pose la question du but poursuivi par le législateur dans le mouvement de coopération intercommunale et de regroupement communal qu'il a amorcé il y a une dizaine d'années.
L'objectif final de ce mouvement est-il de développer l'intercommunalité et de faire en sorte que les communes coopèrent obligatoirement au sein d'un EPCI ? Dans ce cas, le concept de commune-communauté n'est pas à mon sens un objet pertinent.
Au contraire, si l'objectif qu'entend poursuivre le législateur est de s'assurer que les compétences relevant du bloc communal sont exercées par une entité d'une taille suffisante, alors peu importe que cette entité soit un EPCI constitué de communes formant un ensemble de 15 000 habitants ou une commune nouvelle créée sur le périmètre d'un ancien EPCI.
Après les auditions que j'ai menées et après avoir longuement discuté des différentes implications de la commune-communauté et de ses risques potentiels pour le fait intercommunal, je suis arrivée à la conviction que la commune-communauté, pour peu qu'elle soit suffisamment encadrée et n'aboutisse pas à un recul de la rationalisation de l'organisation du bloc communal, est un dispositif qui peut être approuvé.
En effet, les circonstances ont changé. La carte intercommunale est maintenant arrêtée et appliquée, et la possibilité de se constituer en commune-communauté apportera à notre sens un assouplissement bienvenu à une disposition de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République – loi NOTRe – qui peut, dans certains cas, constituer un frein au développement des communes nouvelles.
Si la commune-communauté peut être regardée comme un aboutissement de la coopération intercommunale, degré ultime de l'intégration, il faut cependant avoir une vision claire des incidences financières et fiscales de ce nouvel objet. Et c'est pourquoi la délégation demande au Gouvernement un rapport sur les conséquences financières et fiscales d'une telle opération.
Il ne s'agit pas de faire une étude de cas particuliers : nous souhaitons connaître la doctrine générale de l'État en matière de création de communes-communautés pour que les acteurs locaux puissent se prononcer de manière éclairée sur les conséquences financières, budgétaires et donc fiscales d'une telle fusion. Comme vous l'avez dit, monsieur le ministre, un homme averti en vaut deux, une collectivité territoriale aussi !
Le plus tôt, trois mois, serait le mieux, monsieur le ministre, afin que le Parlement puisse voter, lui aussi de manière éclairée, le projet de loi de finances pour 2020. Nous avons eu des discussions relativement animées en délégation à ce sujet et nul doute que certains de mes collègues vous interrogeront aussi sur cette question.
En dehors de ces remarques qui restent avant tout de précaution et de clarification, les membres de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation ont accueilli favorablement cette proposition de loi sénatoriale.