Intervention de Sébastien Lecornu

Séance en hémicycle du mercredi 10 juillet 2019 à 15h00
Organisation des communes nouvelles — Discussion générale

Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales :

Oui, mais vous voyez où cela peut aboutir ! On commence par quelque chose, et on arrive très vite à autre chose : l'investissement dans les écoles de la commune ne constitue-t-il pas un sujet assez important pour que l'on organise une consultation ? Et après tout, ce sur quoi vous allez-vous prononcer ce soir ne constitue-t-il pas un problème assez important pour que l'Assemblée nationale ne décide pas seule et que l'on organise un référendum dans le pays ?

Je vais volontairement loin avec cet exemple pour illustrer mon propos. Même si le maire reste la figure préférée des Français, ne nous payons pas de mots : il y a aussi une remise en question de la démocratie représentative, nous l'avons vu à l'automne dernier. Si, avec le Président de la République, nous avons autant souhaité nous appuyer sur les maires pour le grand débat national, c'était certes que nous avions besoin d'eux pour le réussir, mais c'était aussi pour les replacer au coeur de la machinerie démocratique locale.

Vous avez donc raison de dénoncer l'opacité de la prise de décision, mais, d'un autre côté, je ne suis pas favorable à ce qu'on s'en remette systématiquement à une consultation qui appellerait un vote. Il faut imaginer une information plus grande qui serait obligatoire. Il me semble que la plupart des élus avancent déjà sur cette voie.

Monsieur Paul Molac, vous parlez de prudence. Nous y sommes, car la prudence est aussi le moyen de préserver la liberté des élus en matière de réunion ou de fusion. Je partage votre commentaire relatif aux grandes régions – j'ai déjà fait référence à ce sujet en répondant au président Mélenchon.

Vous pointez du doigt le rôle des préfets dans la constitution à marche forcée des EPCI XXL. Je vous ai répondu qu'il y avait parfois du vrai dans ce constat, mais pas toujours. Et, à titre personnel, même si le débat est ouvert sur ce sujet, je ne suis pas favorable à l'élection des membres des EPCI au suffrage universel. Si l'EPCI mime la commune et que, d'établissement public, il devient une collectivité territoriale, une fois n'est pas coutume le président Mélenchon aurait raison : il y aurait un véritable virage dans l'histoire de la République. Si tout devait passer par l'EPCI collectivité territoriale, et non plus par la commune, ce serait vraiment une rupture avec ce qui a fait l'histoire de la carte administrative française. Je livre en tout cas le sujet au débat.

Ont aussi été évoquées des communes nouvelles qui se situeraient dans plusieurs départements à la fois. La fameuse loi du 11 novembre 1789 puis celle de décembre disposent qu'un département est divisé en districts – à l'époque, on ne parlait pas d'arrondissements – et que chaque commune doit se trouver dans un seul département. Au-delà des données historiques, que dire de l'idée de commencer à créer des sections électorales, car cela reviendrait à cela, au sein de communes nouvelles ! Je sais que le groupe Libertés et territoires est très allant, monsieur Molac, mais je ne me risquerai pas à cela. À mon avis, créer partout des mini-PLM n'irait dans le sens ni de la simplification ni de ce que nous voulons faire de la commune.

Madame Émilie Guerel, vous avez cité Louis XVI alors que le président Mélenchon était parti : c'est bien dommage. Vous avez rappelé la philosophie du texte, soyez-en remerciée. Je me permets de remercier avec vous M. Dimitri Houbron, car, dans vos circonscriptions respectives, vous avez pris le temps de consulter les élus locaux et les maires concernés par ces sujets. Je sais qu'avec les rapporteures, la présidente de la commission des lois et aussi M. Rémy Rebeyrotte, vous avez pris la peine de participer à l'élaboration des amendements présentés ce soir, en lien avec les deux sénatrices.

Lorsque je suis au Sénat, on me dit souvent que les députés de la majorité ne comprennent pas le Sénat et qu'ils n'entrent pas dans les questions relatives aux collectivités territoriales. Madame Guerel, monsieur Houbron, vous avez démontré que les députés pouvaient faire exactement ce qu'il était attendu d'eux et je vous en remercie encore une fois.

Madame Untermaier, j'ai répondu sur la question globale de la consultation, mais je pense que vous avez raison s'agissant de la participation citoyenne. Votre réflexion ne porte pas seulement sur les communes nouvelles ; elle pose la question de la façon dont il est possible de faire vivre la démocratie dite participative ou d'association des citoyens. Je suis moi aussi très militant en la matière, dès lors que cela ne vient pas affaiblir la démocratie représentative. Nous aurons sûrement l'occasion de travailler ensemble sur le sujet, si vous en êtes d'accord, dans le cadre de l'examen du futur projet de loi Engagement et proximité.

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