Mme Guion-Firmin souhaite l'extension du recours à des médecins à diplôme étranger, notamment cubains, par analogie avec le dispositif existant en Guyane. La possibilité de recruter ces médecins étrangers, qui sont nombreux, correspond à une demande récurrente exprimée lors de mes visites aux Antilles. Beaucoup de ces médecins, qui sont disposés à venir en France, exerçaient au Brésil. Une politique récente du Brésil leur ayant fermé la porte, ils sont retournés à Cuba et ils sont dès à présent disponibles.
Les outre-mer souffrent d'une « double peine » en termes de désertification médicale. À la difficulté démographique des médecins partout sur le territoire s'ajoute un éloignement des zones de formation, en sorte que les médecins n'y viennent pas spontanément faire des stages ou s'installer. Il y a lieu de favoriser le recrutement de ces médecins qui ont donné satisfaction en Guyane. J'ai souhaité toutefois faire évoluer les dispositions en vigueur en évaluant leurs compétences au moment de leur installation ou lorsqu'ils viennent prêter main-forte dans les hôpitaux. Ce dispositif encadré permettra à beaucoup d'établissements des Antilles de retrouver la main-d'oeuvre médicale qui leur fait défaut. J'y suis donc favorable.
Madame Limon, la couverture vaccinale des professionnels de santé est un sujet qui revient régulièrement. C'est un « marronnier » du ministère de la Santé, puisque la vaccination avait été rendue obligatoire en 2006 pour la grippe. Puis le Conseil d'État était revenu sur cette obligation parce que le bénéfice individuel de la vaccination antigrippale qu'il faut refaire chaque année n'était pas très important pour les professionnels de santé, d'autant que la grippe est plutôt dangereuse pour les personnes âgées.
Vous m'interrogez maintenant sur l'obligation de la vaccination contre la rougeole au moment où m'on constate l'émergence de rougeoles nosocomiales dans nos hôpitaux. Des personnels de santé ayant très récemment été touchés, notamment aux urgences, la question va se reposer. La haute autorité de santé travaille actuellement sur différentes questions autour des vaccins, en particulier sur la vaccination des pharmaciens et des infirmiers ou les extensions d'indications. Nous pouvons l'interroger sur l'opportunité de rendre obligatoire la vaccination contre la rougeole pour les soignants. Elle l'est pour l'hépatite B, parce que le bénéfice individuel est réel. Elle pourrait l'être pour la rougeole, probablement plus encore que pour la grippe. La question mérite d'être posée.
J'ajoute que vous avez voté dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 une expérimentation de la vaccination des soignants contre la grippe. Elle se met en oeuvre dans plusieurs régions et va être suivie. Ces débats sont encore devant nous et nous allons y travailler.
Monsieur Touraine, je vous remercie de vos propos sur la politique de prévention. Il est vrai que la couverture vaccinale par les douze vaccins obligatoires s'améliore. On relève notamment des taux très impressionnants de progression pour la méningite. On est passé de 35 % à près de 70 % d'enfants couverts dès la première année, avec une réduction par quatre du nombre de méningites à méningocoque chez les enfants de moins d'un an, puisque le nombre de cas est passé de seize à quatre. On peut être satisfait de cette décision.
En ce qui concerne le tabagisme, vous avez raison. La vente aux mineurs est très peu contrôlée. Lorsque j'étais à l'institut national du cancer, j'avais calculé qu'un buraliste était contrôlé pour la vente aux mineurs une fois tous les cent ans ! C'est clairement un défaut de contrôle et peut-être un défaut de responsabilisation des acteurs. C'est un dialogue que je pourrais renouveler avec les buralistes, puisque nous avons renoué le dialogue à l'occasion de l'augmentation du prix du tabac. Je peux y travailler avec mon collègue Gérald Darmanin.
Pour ce qui est du tabagisme des femmes, nous souhaitons rendre quasi systématique la consultation du quatrième mois. Elle manque également pour l'évaluation des risques sociaux. L'évaluation du tabagisme lors de la consultation à l'issue du premier trimestre fournirait l'occasion d'accompagner mieux les femmes pour l'arrêt du tabac.
Madame Biémouret, vous évoquez la création de centres de santé municipaux dans votre département. Je suis très favorable aux centres de santé. Aujourd'hui les jeunes sollicitent un exercice salarié. Le centre de santé alliant cet exercice salarié avec l'exercice pluriprofessionnel correspondant à leurs attentes. Les collectivités peuvent tout à fait s'emparer de tous les outils d'accompagnement existants, notamment celui fourni par les ARS via le zonage. Je ne fais pas de différence entre les maisons de santé pluriprofessionnelles et un centre de santé en termes d'accès aux financements, notamment dans les zones « sous-denses ». Je le dis souvent à la fédération des centres de santé.
Les quatre cents postes de médecins salariés viennent en plus. Il s'agit de médecins salariés soit par des collectivités, soit par des hôpitaux, destinés à exercer de façon isolée en zone « sous-dense ». Le recrutement est en cours. Les deux cents premiers postes sont déjà ouverts au recrutement. Nous espérons en recruter quatre cents d'ici la fin de l'année. Si cette initiative fonctionne, nous poursuivrons l'année prochaine. Ce ne sont pas des budgets fermés. Nous cherchons vraiment tous les moyens d'accompagner les territoires en matière de désertification médicale.
Charlotte Lecoq, vous m'interrogez sur l'homéopathie. J'ai choisi une méthode. Ces médicaments qui ont été mis sur le marché sans que leur efficacité n'ait jamais été évaluée sont remboursés depuis une trentaine d'années. Dans un contexte où les Français nous demandent une baisse d'impôts passant par une baisse des dépenses publiques, j'ai souhaité que ces médicaments soient évalués comme tout autre médicament. J'ai donc saisi la haute autorité de santé de cette évaluation. J'attends son avis définitif qui devrait être rendu la semaine prochaine.
Les Français s'inquiètent beaucoup de l'accessibilité de ces produits, dont le prix est très peu élevé, de l'ordre d'1 à 3 euros. Le remboursement de 30 % par l'assurance maladie n'est pas l'unique voie d'accès au médicament. Le prix pèse assez peu. Même s'il y avait déremboursement, ces médicaments qui ont une autorisation européenne de mise sur le marché resteraient autorisés. Mon rôle de ministre de la Santé, c'est de m'assurer que les produits remboursés ont un effet mesurable. Ce qui permet aujourd'hui de rassurer sur la qualité du panier de soins remboursables, ce sont les avis scientifiques de la haute autorité de santé qui nous dit ce qui doit être pris en charge par la solidarité nationale et ce qui n'a pas à l'être.