Je tenais tout d'abord à remercier les rapporteurs pour la pertinence de leurs travaux et pour cette présentation conjointe.
Après avoir constaté que le développement durable a longtemps été pris en compte de manière marginale dans la politique commerciale européenne, vous rappelez qu'il en est devenu un objectif essentiel même si, à ce jour, sa prise en compte reste encore insuffisante. Vous soulignez dans votre rapport le rôle des États membres pour faire reconnaître l'importance du principe de développement durable et, en particulier, de l'engagement de la France dont la volonté politique, – et je cite votre rapport – « assortie d'une campagne efficace de promotion de ses idées, peut permettre de faire bouger les lignes au niveau européen ».
Permettez-moi de revenir quelques instants sur les engagements pris par le Gouvernement français pour renforcer la prise en compte du développement durable et répondre aux craintes suscitées, par l'entrée en vigueur provisoire de l'Accord du CETA avec le Canada en septembre 2017.
Face au constat – que vous semblez partager – que l'évaluation européenne de l'impact de l'Accord est insuffisante, le Gouvernement a souhaité mettre en place une évaluation approfondie de l'impact du CETA à l'échelle nationale. Après avoir instauré la Commission indépendante d'évaluation de l'impact du CETA, présidée par Katheline Schubert, sur l'environnement, le climat et la santé, le Gouvernement a présenté, dès le mois d'octobre 2017, un plan d'action, co-construit avec les députés de la majorité. Ce plan prévoit notamment la mise en place d'une mission d'inspection sur l'impact du CETA portant sur cinq secteurs agricoles sensibles dont le rapport a été présenté en décembre 2018 ainsi que la mise en oeuvre de l'évaluation macro-économique des impacts de l'Accord conduite par le Centre d'études prospectives et d'informations internationales (CEPII).
Il faut souligner que ce degré d'évaluation est inédit et que cette initiative jette incontestablement les bases d'une nouvelle méthodologie de contrôle continue de la politique commerciale, qui a vocation, à terme, à s'appliquer aux autres accords à venir.
Je souhaite ensuite revenir sur certaines de vos propositions.
Le CETA impose explicitement le respect des obligations souscrites par le Canada et l'Union européenne dans les accords environnementaux multilatéraux. L'absence de mention de l'Accord de Paris dans le CETA est due à son absence de ratification au moment de la signature du CETA. Pourtant, des références explicites à l'Accord de Paris ont été intégrées à la déclaration interprétative conjointe, signée en octobre 2016 qui a force contraignante.
Concernant le statut d'« élément essentiel » de l'Accord de Paris, le futur accord entre l'Union européenne et la Nouvelle-Zélande devrait créer un précédent : le Président de la République et la Première ministre néo-zélandaise ont, en effet, signé une déclaration conjointe en avril 2018 visant à faire du respect des dispositions de l'Accord de Paris une clause essentielle des accords de libre-échange.
En tant que députée bretonne et présidente du groupe d'étude « Économie maritime », j'ai été particulièrement sensible à votre 7e proposition de limiter l'impact du commerce maritime et aérien. Dans le cadre des négociations avec le Canada, Nicolas Hulot et Catherine McKenna, Ministre canadienne de l'Environnement et du Changement climatique, ont d'ailleurs signé, en avril 2018, le partenariat franco-canadien sur l'environnement et le climat qui comprend 9 axes de coopération, dont celui de la diminution des GES dans le cadre des négociations à l'Organisation maritime internationale.
En ce qui concerne la garantie du principe de précaution, l'instrument interprétatif commun de l'accord, qui est juridiquement contraignant, précise que « les parties sont tenues d'assurer et d'encourager des niveaux élevés de protection de l'environnement, de s'efforcer d'améliorer continuellement leur législation et leurs politiques en la matière de même que les niveaux de protection sur lesquels elles reposent ». Dans sa décision du 31 juillet 2017, le Conseil Constitutionnel a précisé que « l'absence de mention expresse du principe de précaution dans les stipulations de l'accord, qui relèvent d'une compétence partagée entre l'Union et les États membres, n'emporte pas de méconnaissance de ce principe ».
Pour conclure, permettez-moi d'inscrire nos débats d'aujourd'hui, et ceux à venir, dans le contexte géopolitique mondial : face au constat que l'interdépendance économique et les confrontations entre puissances sont de plus en plus fortes, la politique commerciale européenne me semble incontestablement constituer un levier de la politique climatique, mais aussi un outil de reconstruction du multilatéralisme mondial. Dans ce contexte, la ratification imminente du CETA, tout comme le suivi continu de sa mise en oeuvre, doivent assurer la garantie de nos ambitions sociales et environnementales mais aussi du jeu multilatéral.