Le Gouvernement a su tenir ses objectifs en matière de dépenses dans le cadre des autorisations budgétaires, grâce à une plus grande sincérité du budget. Les résultats sont donc à mettre à son crédit. Néanmoins, quelques sous-budgétisations demeurent, mais de manière très marginale par rapport aux exécutions précédentes – seulement 1,5 milliard d'euros en 2018, principalement sur les opérations extérieures.
Avec un déficit représentant 2,5 % du produit intérieur brut en 2018, la France a pu sortir de la procédure pour déficit excessif engagée par l'Union européenne puisque, pour la deuxième année consécutive, le déficit public de notre pays s'est établi sous la barre des 3 % de PIB.
L'exécution 2018 a été marquée par une nette décélération de l'activité, avec une croissance estimée à 1,6 % contre 2,3 % en 2017. Le contexte économique international y est certainement pour quelque chose : le ralentissement de la croissance observé en France l'a été partout dans le monde, sur fond de tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine et de crise entre les États-Unis et l'Iran, qui a eu des répercussions sur les cours du pétrole.
S'agissant de la trajectoire de rétablissement de l'équilibre des finances publiques de notre pays, il convient de rester prudent pour l'avenir car le niveau de déficit reste très élevé, comme cela a déjà été dit, ce qui fait peser de lourdes incertitudes sur la fin du quinquennat.
Le déficit structurel est un bon indicateur de l'effort réalisé sur les dépenses de fonctionnement. Pourtant, il est quasi nul pour 2018 – à peine 0,1 point de PIB selon l'avis révisé du Haut Conseil des finances publiques. L'explication de cette faible amélioration du solde structurel est simple : l'effort sur les dépenses publiques hors crédits d'impôts a été presque intégralement absorbé par des mesures de baisse des prélèvements obligatoires décidées par le Gouvernement.
Cela devient problématique quand le Haut Conseil considère que l'effort moyen réalisé en dépenses sur les deux années 2017 et 2018 est nul. Pourtant, les règles européennes exigent un effort structurel de réduction de nos déficits publics de 0,5 point de PIB par an ou, à défaut, en moyenne sur deux ans. Le compte n'y est donc pas. Le déficit structurel reste quasiment au même niveau et la possibilité d'atteindre l'objectif de moyen terme défini dans la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 paraît de plus en plus inatteignable. Cela signifie qu'il faut absolument que des économies soient réalisées en dépenses et qu'elles aillent directement alimenter la réduction du déficit.
Autre sujet d'inquiétude : le déficit budgétaire de l'État se creuse, pour la première fois depuis cinq ans. Il s'est détérioré de 8,3 milliards d'euros par rapport à l'année 2017, en atteignant la somme de 76 milliards en 2018. Pourtant, les recettes sont plus élevées qu'initialement prévu, notamment en raison du rattachement erroné des droits de mutation entre 2017 et 2018, pour 1,4 milliard d'euros. Alors, comment justifier ce dérapage ? Sans doute par les raisons que nous avons déjà évoquées, à savoir une progression des dépenses couplée à des mesures de baisse d'impôts.
L'effort en dépense porte principalement sur les administrations de sécurité sociale qui, depuis deux années consécutives, ont réussi à dégager un excédent qui atteint pour 2018 les 10,7 milliards d'euros. Par ailleurs, les administrations des collectivités locales ont également contribué à cet effort, dans le respect de l'objectif en dépense des 322 collectivités territoriales ayant contractualisé avec l'État, ce qui me permet de souligner le succès de ce mécanisme.
Néanmoins, ces efforts ne suffisent pas à faire reculer l'endettement de la France. La dette de l'ensemble des administrations publiques s'est stabilisée à 98,4 % du PIB mais son montant, lui, continue d'augmenter, pour s'établir à 2 315 milliards d'euros. Nous sommes, faut-il le rappeler, parmi les derniers de la zone euro en termes d'endettement. Le FMI s'inquiète d'ailleurs du niveau de la dette française pour l'avenir alors même que nos voisins européens ont déjà commencé à réduire la leur depuis plusieurs années.
Nous nous éloignons donc de l'objectif du retour à l'équilibre du solde des comptes publics. J'en veux pour preuve la dette de l'État, qui continue de s'aggraver sous l'effet de la hausse du déficit et expose l'État en cas de remontée des taux d'intérêt.
La situation financière de l'État s'est donc dégradée en 2018. Nous sommes devenus le second émetteur de titre de dette de la zone euro, juste derrière l'Italie, avec une émission par l'État de titres à moyen et long terme de plus de 225,4 milliards d'euros en 2018. D'ailleurs la stabilisation de la charge d'intérêts due au contexte favorable de taux d'intérêt faibles n'a pas suffi à améliorer la santé financière de la France. La charge d'intérêts s'élève à 40,5 milliards d'euros en 2018 contre 40,7 en 2017.
Comme Lise Magnier l'avait fait lors de la première lecture, nous tenons à mettre en avant ces points de vigilances. Le coût des dépenses fiscales, qui sont 474 au total, a continué à progresser en 2018, se montant à 100,2 milliards d'euros, soit une progression de 6,7 milliards par rapport à 2017. Le plafonnement global est devenu inopérant depuis que le plafond a été relevé de 15 milliards d'euros, très largement au-dessus des prévisions. Par ailleurs l'évaluation de leur efficacité à l'heure actuelle reste lacunaire, voire inexistante pour certaines.
Concernant les taxes affectées, il n'est pas normal qu'elles rapportent toujours plus à l'État. En effet, le mécanisme de plafonnement et d'écrêtement des taxes affectées a rapporté à l'État une recette de presque 1 milliard d'euros en 2018, en hausse par rapport à 2017. La pratique des taxes affectées contrevient au principe d'universalité des ressources du budget. Il convient de trouver une solution afin de les rebudgétiser.
Enfin, la Cour des comptes a inclus dans son rapport d'exécution une démarche de réflexion inédite autour de la refonte de la performance de la gestion des finances publiques. Comme beaucoup de mes collègues, je suis très sensible à cette démarche et j'espère que vous le serez également, au point d'améliorer des points comme la complexité sans cesse croissante du cadre budgétaire de l'État, l'information, qui a été enrichie au risque de devenir surabondante, et les procédures et outils incomplets, pour ne pas dire souvent obsolètes, afin de mesurer l'efficience des politiques publiques.
Pour réduire notre déficit public, nous devons d'abord avoir une vision globale et éclairée de toutes les données qui l'entourent. Une information fiable, de qualité et documentée est le premier pas pour mettre en oeuvre des solutions visant une amélioration structurelle significative, afin d'éloigner le risque d'une remontée des taux d'intérêt et par voie de conséquence d'un alourdissement du poids de la dette. Ce n'est qu'à ce prix que nous pourrons redresser les finances publiques d'ici la fin de la législature.
Comme nous l'avons dit lors du débat d'orientation des finances publiques, la sincérité doit rester une habitude, et c'est un point fort observé en 2018. Elle doit maintenant s'accompagner d'une véritable baisse de la dépense publique, qui ne peut plus attendre. Je ne doute pas que vous partagerez ce souhait.
En conclusion, même si des pistes d'amélioration méritent d'être explorées, au vu des aspects positifs de cette loi de règlement 2018, le groupe UDI et indépendants votera en sa faveur.