Intervention de Nicolas Eglin

Réunion du mardi 14 mai 2019 à 16h30
Commission d'enquête sur l'inclusion des élèves handicapés dans l'école et l'université de la république, quatorze ans après la loi du 11 février

Nicolas Eglin :

Je vais répondre d'abord sur les PIAL. Je partage vos incertitudes sur la mise en place de ces dispositifs, aujourd'hui expérimentaux. Les informations qui nous remontent des différents territoires suggèrent que sont actuellement identifiés des établissements où ils seront installés à la rentrée prochaine, mais pas forcément partout. Dans le Var, le Vaucluse, il y a eu des expérimentations, ce sont deux territoires où des choses émergent, mais certains rectorats en sont seulement à l'identification des lieux où les PIAL vont être installés.

Nous avons eu des présentations par la direction générale de l'enseignement scolaire (DGESCO) de ce que sont les PIAL dans leur principe, mais nous n'avons pas de texte, de cahier des charges, d'éléments qui précisent leur fonctionnement. Certains éléments sont intégrés dans le projet de loi pour une école de la confiance, mais ils sont très généraux. Le format et le contour des PIAL restent très flous pour l'instant. J'ai envie de dire « tant mieux, cela nous forcera à faire des expérimentations et à identifier des modèles que nous pourrons ensuite mettre en oeuvre », mais je suis tout de même un petit peu inquiet, puisqu'on annonce leur généralisation pour la prochaine rentrée. À quel moment pourra-t-on faire l'évaluation de l'expérimentation ? C'est là une vraie question.

Vous avez évoqué le fait que les acteurs du secteur médico-social devaient être présents au sein des PIAL. C'était ce qui ressortait des premières présentations, mais c'est moins le cas aujourd'hui. Peut-être faut-il raisonner en plusieurs temps. Au sein de la FNASEPH, nous considérons que les PIAL sont des expérimentations intéressantes.

Parmi les gains qualitatifs que l'on peut attendre, il y a d'abord une réponse plus ajustée aux besoins des élèves, grâce à des accompagnements mutualisés. En particulier, les emplois du temps devraient être établis fonction des besoins de l'élève plutôt que des contraintes de l'AVS. Donc, pour nous, il y a un vrai gain, mais qui reste à expérimenter.

Le deuxième point concerne la gestion des ressources humaines dans le dispositif, qui actuellement est surtout faite à distance, alors que, justement, l'articulation des emplois du temps est très complexe. L'intérêt du PIAL, c'est que l'on va pouvoir faire des choses plus ajustées dans les emplois du temps des AVS, en lien avec les besoins des élèves.

Cela dit, je pense aussi qu'il y a derrière tout cela une logique d'économies, d'optimisation des moyens –mais c'est important d'avoir aussi ce regard-là. Et puis, pour faire écho à votre question sur la précarisation des AVS, le fait de pouvoir proposer, en regroupant école, collège et lycée, des emplois du temps comportant un nombre d'heures plus important, permettra peut-être de réduire la précarité de ces intervenants.

Je suis très dubitatif, néanmoins, sur l'installation des PIAL dans des écoles élémentaires, pour de multiples raisons. L'amplitude d'ouverture des établissements ne va rien résoudre quant à l'accès à des temps pleins pour les AVS, sauf à imaginer des dispositifs incluant du temps périscolaire, mais les collectifs représentatifs des AVS ne sont pas demandeurs ; on ne voit donc pas très bien comment cela pourrait être organisé. D'autre part, sur le plan organisationnel, qui va piloter les PIAL dans les écoles élémentaires ? Les inspecteurs des circonscriptions ? Cela paraît compliqué. Le lien avec les collèges ou les lycées de proximité paraît intéressant, mais j'ai cru comprendre, à la lecture du projet de loi pour l'école de la confiance, qu'on n'allait pas vers ce type de rapprochement. Ce qui va être intéressant, c'est de voir l'expérimentation sur ce sujet.

Comment le dispositif va-t-il permettre de faire culture commune ? Je ne suis pas persuadé que les PIAL seront tout de suite l'outil approprié : il va falloir regarder plutôt l'étape suivante. Je pense que, dans un premier temps, le PIAL sera un apport organisationnel propre à l'Éducation nationale, au dispositif scolaire. Peut-être pourra-t-on parler de culture commune dans deux ou trois ans, quand on aura défini l'ensemble des missions des autres acteurs, qu'ils soient du secteur médico-social ou du secteur libéral – car il y a une forte demande des familles pour que le secteur libéral puisse aussi faire de l'accompagnement dans les écoles.

En matière d'accessibilité, l'intérêt premier du PIAL est de pouvoir coordonner les interventions des AVS, puisque, par définition, il n'y a pas de nombre d'heures préétablies : il est fonction du besoin de l'élève. Donc, si un groupe scolaire dispose d'une équipe plus importante, il va pouvoir mieux réguler le temps d'accompagnement, améliorer la démarche d'accessibilité pour cet élève et se redemander, chaque fois que nécessaire, si tel accompagnement, dans telle matière, est nécessaire ou non, de façon à répondre à ses besoins.

La FNASEPH, qui est à l'origine des AVS, ne va évidemment pas dire qu'il faut arrêter les AVS ! Mais elle dit qu'à un moment donné, le moteur s'est un peu emballé, qu'il faut vraiment se réinterroger sur l'importance de l'aide humaine. Elle a toute sa place dans la compensation, pour les situations les plus complexes qui nécessitent un accompagnement continu et soutenu. Mais, sur d'autres aspects, il faut redonner place à l'aménagement pédagogique et à la responsabilité de l'ensemble des acteurs.

Pardon de le dire comme ça, mais nous sommes régulièrement sollicités par des familles qui nous disent que leur enfant est accompagné par l'AVS dans une salle à côté, donc pas sous la responsabilité de l'enseignant, mais sous celle de l'AVS. Les AVS ne sont pas des enseignants bis, ils ont des missions clairement définies, qui sont de l'ordre de l'accompagnement et non de l'intervention pédagogique.

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