Intervention de Virginie Lanlo

Réunion du mardi 14 mai 2019 à 17h35
Commission d'enquête sur l'inclusion des élèves handicapés dans l'école et l'université de la république, quatorze ans après la loi du 11 février

Virginie Lanlo :

J'appartiens à la commission « Éducation » de l'AMF, que je représente dans plusieurs groupes de travail, notamment ceux liés au handicap, ayant été partie prenante de la mission nationale « Handicap et accueil de loisirs ». Je suis également membre du comité de pilotage du Comité national du handicap (CNH) en 2018-2019, et j'ai évidemment travaillé sur l'école inclusive et le rapport remis à M. Jean Michel Blanquer et Mme Sophie Cluzel en février. Je suis maire adjoint de Meudon, chargée de l'éducation, depuis près de douze ans, et coordinatrice du réseau des élus chargés de l'éducation pour le département des Hauts-de-Seine ; j'ai été amenée, dans ce cadre, à travailler sur tous les sujets ayant trait à l'inclusion des enfants en situation de handicap, que ce soit dans le temps scolaire u dans le temps périscolaire.

Puisque nous avons pour mission, comme vous le disiez, monsieur le rapporteur, de répondre aux sollicitations des familles, il nous revient de faire en sorte que tout le monde ait accès à l'ensemble des services proposés, qu'il s'agisse du temps scolaire, périscolaire ou extrascolaire.

Tout n'est pas une question de moyens financiers. C'est d'abord et avant tout une question de volonté des personnes – et de la communauté éducative dans son ensemble – de se mettre ensemble autour d'une table pour trouver les moyens d'accueillir ces enfants. C'est absolument indispensable si l'on veut être efficace.

Nous avons depuis des années pour objectif de faire en sorte que les collectivités soient, dès le départ, associées aux processus et aux démarches qui sont faites pour accueillir ces enfants dans les écoles. Or, c'est souvent ce qui pêche le plus. Très souvent, les communes sont mises devant le fait accompli et sont informées au dernier moment de la présence d'enfants en situation de handicap, qui auraient nécessité non seulement une adaptation des locaux mais également la mise à disposition de personnels d'accompagnement sur différents temps.

Ce que nous remarquons, c'est que les enfants évoluent sur différents temps et sont confrontés à des interlocuteurs qui sont totalement différents les uns des autres. Tant que n'est pas mis en place un dialogue continu permettant de faciliter les démarches des familles, il est compliqué pour elles d'organiser le temps de l'enfant.

S'agissant de l'accessibilité, chacun s'accorde à dire que les communes ont des problèmes financiers pour mettre aux normes leurs écoles, mais aussi que l'on peut travailler de manière différente, avec des lieux et des pôles ressources permettant la mutualisation sur un territoire, de façon à pouvoir aiguiller les familles, accueillir les enfants en fonction des besoins, des réalités territoriales, des locaux disponibles. Dans certaines collectivités, il existe des écoles que l'on ne peut pas mettre aux normes en raison de la nature même du bâti ; il faut donc trouver les moyens de mutualiser et de travailler sur un territoire dans sa globalité. Il en est de même, d'ailleurs, au regard de l'accueil des enfants lorsqu'il n'est pas besoin de mise aux normes bâtimentaires : en fonction de la situation des familles, nous essayons d'organiser des pôles ressources en fonction des besoins des enfants et des temps concernés. C'est tout l'intérêt des pôles inclusifs d'accompagnement localisés (PIAL).

Un problème fréquent tient à la continuité des temps de l'enfant et de son accompagnement quand il nécessite un éducateur ou un AESH présent sur les différents temps de vie. Cela renvoie notamment à la problématique du temps de travail des AESH et à la possibilité pour ceux-ci d'avoir plusieurs employeurs. Une jurisprudence récente a décidé que, lorsqu'un enfant a besoin d'un AESH sur le temps scolaire, que celui-ci est accordé par la MDPH et qu'il est présent sur le temps périscolaire, la prise en charge financière incombe à l'Éducation nationale. Mais quand on échange entre collègues, on s'aperçoit que, d'un département à l'autre, l'investissement financier, les enveloppes dévolues à l'accompagnement, les réactions, les projets, les prises en charge ne sont pas les mêmes, aussi bien au niveau de la MDPH que des caisses d'allocations familiales (CAF).

Je disais tout au début que tout n'était pas affaire de moyens financiers, mais il faudrait au moins qu'il y ait une cohérence dans ce qui est apporté aux familles, de façon à ce qu'elles n'aient pas à tout recommencer à zéro lorsqu'elles changent de territoire. La cohérence éducative, la cohérence entre les différents acteurs est pour nous absolument indispensable. On ne peut pas faire les uns sans les autres. Les collectivités sont au centre de toutes ces problématiques : ce sont les collectivités qui sont en lien avec l'Éducation nationale, les familles, les CAF pour les financements. Or la collectivité, bien que centrale, n'est pas forcément mise dans la boucle au départ. Cela traduit une certaine incohérence de ce dispositif. Il est vrai que nous sommes de plus en plus intégrés dans ces échanges, mais il faut tout de même se battre un petit peu pour ça.

Il est évident qu'un travail doit être fait en termes de formation des équipes, qu'il s'agisse de l'Éducation Nationale, du périscolaire ou de l'extrascolaire. Il faut leur donner une connaissance du handicap de façon générale, mais aussi de certains handicaps qui nécessitent un regard et un accompagnement plus spécifiques, l'idée étant que plus on accueille les enfants en milieu ordinaire, mieux c'est, aussi bien pour eux que pour les autres enfants. Je peux témoigner que, dans la ville de Meudon, deux écoles, une maternelle et une élémentaire, accueillent des enfants autistes et au fil de l'année, ceux-ci sont de mieux en mieux inclus ; c'est magique pour tout le monde. Plus on favorisera cette dynamique-là, plus on intégrera les enfants. Eux ne se posent pas de question : je pense que ce sont surtout les adultes qui sont en difficulté, parce qu'ils sont en situation de méconnaissance. Ça peut être facile d'accueillir un enfant en situation de handicap, mais si l'on est formé, informé, et si la communication se fait bien entre les uns et les autres.

Pour autant, certains moyens manquent aux communes, notamment en termes de personnel disponible sur les différents temps, car vous n'êtes pas sans savoir qu'il est compliqué de recruter des éducateurs ou des animateurs sur le temps périscolaire ou extrascolaire, surtout quand ceux-ci doivent être formés à accompagner les enfants en situation de handicap. C'est un vrai sujet pour les collectivités : former, motiver, rendre attractifs ces métiers d'accompagnant au sens large du terme. La question des moyens financiers se pose aussi –par exemple pour la mise aux normes des bâtiments –, mais l'objectif de l'AMF est de dédramatiser cet accueil en collectivité des enfants en situation de handicap, mais cela ne pourra se faire qu'à partir du moment où l'ensemble des acteurs qui accompagnent ces enfants communiquent et s'informent les uns les autres.

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