Nous avons travaillé longtemps, près de six mois, tous les six, à la rédaction de ce rapport, pour lequel nous avons fait des déplacements sur le terrain. Nous connaissons bien, les uns et les autres, le sujet de la scolarisation des enfants handicapés. Il n'est d'ailleurs pas rare, monsieur le rapporteur, qu'il soit au coeur de missions d'inspection générale. Des rapports sur ce thème sont produits régulièrement, pratiquement une fois par an. Nous devrions donc bien connaître la situation mais, comme vous avez eu raison de le souligner, elle est très compliquée, et tout d'abord parce qu'il est difficile de connaître le nombre exact d'enfants handicapés en France.
Actuellement, seule une reconnaissance administrative permet de savoir qu'un élève est porteur d'un handicap. Parce qu'ils estiment qu'un enfant connaît une difficulté telle qu'elle pourrait être reconnue comme un handicap, des parents ou des enseignants déposent une demande. Compte tenu de la nature humaine de l'expertise et de la diversité des pratiques, il n'existe pas de normes précises permettant de trancher. La commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) est seule à décider et, nous l'avons constaté, en fonction des personnalités et des départements, les règles appliquées sont différentes.
Pour complexifier le tableau, les plans d'accompagnement personnalisé (PAP), mis en place il y a trois ans, nécessitent l'agrément de la médecine scolaire, mais certains départements ont décrété que les médecins de l'éducation nationale, en nombre très insuffisant – comme l'a d'ailleurs montré un rapport conjoint de l'IGAENR, de l'IGEN et de l'IGAS, peu diffusé à ce jour –, n'avaient pas de temps à leur consacrer.
La lettre de mission à l'origine de ce rapport dressait le constat suivant : « De plus en plus d'enfants handicapés. De plus en plus de recours aux auxiliaires de vie scolaire (AVS). » Plusieurs questions en découlaient naturellement – Pourquoi ? Que font les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) ? Que fait le secteur médicosocial ? –, auxquelles nous avons tenté de répondre.
Notre travail nous a conduits à constater de réels dysfonctionnements. Je pense, pour commencer, aux élèves en attente d'AESH. Malgré la décision qui reconnaît à un enfant le droit de bénéficier d'une assistance et d'être accueilli dans un institut médico-éducatif (IME), il s'écoule parfois jusqu'à trois ans avant qu'il n'obtienne une place.
Certaines situations ne sont pas normales non plus du côté des enseignants. Ils font parfois face à des classes très hétérogènes et peinent à prendre en compte les besoins de certains enfants.
Dans le secteur médicosocial, en revanche, le nombre de places offertes aux enfants handicapés a plutôt tendance à augmenter – ne voyez dans ce constat aucun parti pris du représentant de l'IGAS que je suis !
Alors, d'où viennent les difficultés ? Nous les décrivons dans notre rapport et nous abordons la question de la formation des AESH. Nous identifions, en particulier, un effet systémique : une demande d'aide pour un enfant est déposée, elle chemine, finit par aboutir, ce qui conduit à des classes avec de plus en plus d'enfants handicapés, souvent deux ou trois.
Mais de vrais succès existent également, que nous soulignons. Les unités localisées pour l'inclusion scolaire (ULIS), qui proposent un nouveau modèle, sont l'un d'eux. J'ai personnellement travaillé sur ces structures il y a plus de vingt ans. Elles étaient alors très peu nombreuses et, d'ailleurs, on parlait plutôt de classes pour l'inclusion scolaire (CLIS). Les ULIS d'aujourd'hui fonctionnent pleinement. Elles accueillent, pendant des temps de regroupement, des élèves handicapés scolarisés en classe ordinaire, dont elles animent la prise en charge. À l'école, au collège et au lycée, les ULIS permettent un excellent accompagnement et se développent.