Intervention de Yannick Tenne

Réunion du jeudi 16 mai 2019 à 15h30
Commission d'enquête sur l'inclusion des élèves handicapés dans l'école et l'université de la république, quatorze ans après la loi du 11 février

Yannick Tenne, inspecteur général de l'éducation nationale (IGEN) :

La question que vous posez, que nous avons tenté de traiter dans notre rapport en lien avec l'accompagnement, renvoie à une situation objective, dans laquelle les équipes éducatives jouent un rôle de « prescripteur caché ». De mauvaises réponses sont apportées aux difficultés de certains enfants en situation de handicap, ceux qui souffrent de troubles du comportement notamment.

Ces enfants, souvent diagnostiqués à l'école maternelle, posent difficulté aux enseignants. Une bonne adéquation entre leurs besoins et la réponse qui leur est apportée dans le cadre du parcours de la MDPH n'est pas simple à trouver. Quand l'équipe d'évaluation reçoit un dossier, la réflexion est déjà bien avancée au sein de l'équipe éducative : parce qu'elle est démunie face à l'élève, elle préconise souvent un accompagnement individuel.

Comment articuler le travail de l'équipe d'évaluation, qui détermine la situation de l'enfant en situation de handicap, et celui de l'équipe éducative, confrontée au manque de place et à l'absence de solutions ?

Dans certains départements, l'accompagnement humain fait partie du guide d'évaluation des besoins de compensation en matière de scolarisation (GEVA-Sco). Il suffit de cocher la case correspondante dans le formulaire. L'analyse des besoins n'est donc pas aussi objectivée que l'on croit.

Notre rapport se réfère au rapport de 2008 de l'IGAS, de l'éducation nationale et de l'IGAENR, sur l'accompagnement du handicap en milieu scolaire, qui ne disait pas autre chose que ce que nous disons.

Pourquoi mettons-nous en avant les ULIS ? Parce qu'elles structurent beaucoup plus la réponse éducative et pédagogique, et favorisent la collaboration entre enseignants au bénéfice d'une meilleure inclusion des élèves dans le substrat scolaire. En ce sens, elles apportent une réponse à votre interrogation, monsieur le rapporteur, puisqu'elles comptent à la fois un AESH collectif et un coordonnateur des accompagnants individuels. Ces derniers sont beaucoup plus difficiles à coordonner en milieu scolaire ordinaire.

En ce qui concerne les inégalités territoriales, elles sont en effet mises en lumière dans notre rapport et, vous le soulignez à juste titre, exigeront tôt ou tard une réponse efficace. L'une des fiches que nous proposons est consacrée au pilotage, extrêmement formalisé et suivi dans certains départements, et beaucoup moins dans d'autres.

Deux départements de la banlieue parisienne relativement importants présentent des réalités totalement opposées : dans le premier, 30 élèves en situation de handicap attendent le traitement de leur dossier, contre 1 600 dans le second. L'analyse des situations, construites à partir de textes identiques et de modalités communes, révèle l'importance de la structuration du pilotage. Elle ne résoudra pas toutes les inégalités territoriales – dans certains départements, la forte présence d'établissements médicosociaux explique les orientations plus massives que dans d'autres –, mais elle est essentielle.

Face aux ruptures de parcours que, comme vous, nous avons observées, nous proposons de recourir aux ULIS. Elles sont en nombre suffisant pour l'école primaire, mais elles doivent être développées dans les collèges et les lycées professionnels.

Pour travailler sur les parcours, encore faut-il que de véritables projets personnalisés de scolarisation (PPS) soient mis en place. Dans certains établissements, ils n'existent tout simplement pas et sont, au mieux, remplacés par le GEVA-Sco. Nous nous sommes refusé à dresser la liste des bons et des mauvais exemples, mais le rapport entre le nombre d'élèves en situation d'attente et le nombre d'élèves engagés dans un projet de scolarisation et de suivi par une MDPH apporte de premiers éléments de réponse sur la question des inégalités territoriales.

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