Intervention de François Geleznikoff

Réunion du mercredi 26 juin 2019 à 10h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

François Geleznikoff, directeur des applications militaires du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives :

Effectivement. Nous suivons attentivement cette question, car son évolution peut avoir une incidence politique sur les discussions américano-russes relatives aux stocks d'armes et sur les traités internationaux.

Le CEA stocke actuellement ses coeurs de chaufferie soit au sein de Magenta, son installation la plus récente, soit dans les piscines des ports. Nous devons dès maintenant envisager le moment où nous n'aurons plus de place, et avons donc engagé une réflexion pour trouver une réponse à l'horizon 2030.

Deux solutions sont envisagées, la première consistant à envoyer nos combustibles usés à l'usine de La Hague – étant précisé que, dans ce cas, nous renonçons à réutiliser pour d'autres chaufferies l'uranium encore contenu dans ces combustibles.

La seconde solution consisterait à entreposer les matières pour une longue durée dans une piscine à sec, un mode d'entreposage que l'IRSN estimait être le plus convenable. Avec l'accord de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), EDF devrait mettre en oeuvre une telle solution avec un entreposage de combustibles en piscine durant au moins cinquante ans, dans l'attente des solutions qui seront retenues ultérieurement.

Les deux solutions sont étudiées du point de vue de leur acceptabilité, mais également de leur coût, et nous devrions disposer des deux dossiers d'étude d'ici à la fin de l'année 2019, ce qui nous permettra de prendre une décision à brève échéance.

J'en viens à l'Iran et à la Corée du Nord. Pour ce qui est de l'Iran, nous estimons que cet État respecte l'accord de Vienne (JCPOA). L'analyse de la DAM est partagée par d'autres entités françaises et correspond notamment à la déclaration faite par M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères, devant l'Assemblée nationale.

Si, comme chacun le sait, les Iraniens jouent avec les limites, ils ont tout de même respecté les trois points principaux du JCPOA, des points très importants en ce qu'ils permettent de reculer l'échéance à laquelle l'Iran pourrait disposer d'un armement nucléaire. Nous continuons à suivre ce dossier de près, étant précisé que l'un des inconvénients d'une dénonciation de l'accord serait d'empêcher l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) d'accéder aux installations de l'Iran, ce qui gênerait sa mission d'observation. Dans cette hypothèse, il nous sera plus difficile d'évaluer ses capacités à accéder à l'arme nucléaire dans un délai restant à définir.

Pour ce qui est de la Corée du Nord, nous surveillons toujours ce qui s'y fait et, comme tout le monde, au moindre frémissement sismique dans l'arc sino-russe-corée, nous évaluons si ce n'est pas la signature d'un nouvel essai nucléaire… Les Nord-Coréens ont récemment manifesté une certaine bonne volonté (en détruisant les galeries d'expérimentation nucléaire), et rien de tangible n'a été détecté depuis un certain temps. Cela dit, ils ont la capacité d'avoir de nouvelles galeries opérationnelles en très peu de temps.

Aux États-Unis, la Nuclear Posture Review (NPR) ne s'adresse pas vraiment à la Corée du Nord (les Américains disposent d'un armement qui leur permettrait de vitrifier le pays plusieurs fois) mais plutôt à la Russie, en réaction aux déclarations du président Poutine. Chacun des deux États cherche à s'assurer de la suprématie en matière d'armement nucléaire, et il suffit que l'un des deux déclare se doter d'une tête manoeuvrante ou de tel ou tel équipement pour que l'autre déclare aussitôt à en faire de même : c'est dans cet esprit qu'a été conçue la NPR. En tout état de cause, la recherche de composantes supplémentaires irait s'ajouter à une panoplie qui va s'enrichir, prochainement avec une nouvelle bombe, dite OTAN, dotée d'un système de guidage d'une très grande précision.

Pour la protection des sites du CEADAM, il a décidé de faire appel aux PSPG (Peloton Spécial de Protection de la Gendarmerie) sur ses sites de Valduc et de Cadarache. À cette fin, des accords ont été signés avec la gendarmerie nationale. Le peloton de Valduc est complet, et des patrouilles sont déjà effectuées avec la formation locale de sécurité. Avant la fin de l'année, nous aurons terminé la base arrière où résident ces personnels, mais aussi les postes avancés devant nos installations les plus critiques.

Sur le site de Cadarache, il y avait un petit décalage dans le temps relativement à Valduc, dû au fait qu'il fallait former les gendarmes, mais le peloton est désormais pratiquement constitué. Je me suis rendu à Cadarache la semaine dernière, où j'ai pu constater que la situation était stabilisée. Nous leur avons fourni leurs points d'appui et ils devraient pouvoir être stationnés l'année prochaine devant les installations majeures de la propulsion nucléaire. Aujourd'hui, avec le concours de la gendarmerie, nos sites sont tout à fait bien protégés.

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