Intervention de Cecilio Madero Villarejo

Réunion du lundi 17 juin 2019 à 16h00
Commission d'enquête sur la situation et les pratiques de la grande distribution et de ses groupements dans leurs relations commerciales avec les fournisseurs

Cecilio Madero Villarejo, directeur général adjoint en charge des affaires antitrust à la direction générale de la concurrence de la Commission européenne :

On ne fait donc que de l'auto-saisine. D'où tout le mérite de ces fameux lanceurs d'alerte. Il y a des experts, de grands spécialistes d'internet, qui savent analyser les données d'une façon que le citoyen normal ne serait pas capable de le faire. Ils peuvent ainsi nous contacter, dans le respect du secret. Car ce qui compte, c'est la qualité de l'information, non qui est derrière.

Je ne voudrais pas terminer cette audition sans donner l'impression d'être juste. Je parlerai donc des prix justes autant que je le peux. À la DG Concurrence de la Commission européenne, nous n'agissons pas tant que nous ne sommes pas en mesure d'accuser quelqu'un par écrit, avant d'imposer une amende ou des réparations (remedies) qui résistent à un examen devant le juge de Luxembourg. Car on nous traîne souvent en justice. C'est pourquoi nos procédures prennent un peu de temps, et même, parfois, pas mal de temps. Nous devons être extrêmement soigneux, parce que les juges de Luxembourg vont regarder ce que nous faisons.

Au début de mon intervention, j'ai voulu rappeler que, qu'on le veuille ou non, les gens aujourd'hui –et je suis le premier à blâmer– s'intéressent avant tout à la question du prix. Nous vivons dans un monde tellement utilitariste ! Ce qui compte, c'est le prix, coûte que coûte…

C'est pourquoi on peut ne pas aimer les centrales d'achat, mais il est évident qu'elles ont servi à rendre très dynamique la fixation des prix, au-delà de ce que les économistes appellent le point de rencontre entre l'offre et la demande. Je ne veux donc pas quitter cette audition en donnant l'impression que seules les centrales d'achat sont à blâmer et à critiquer. J'ai suffisamment d'expérience pour vous dire que les grandes marques, lorsqu'elles peuvent presser le citron, ne s'en privent pas de leur côté, si cela peut leur permettre d'arriver à des marges faramineuses. Or celui qui paye, c'est finalement le consommateur et, éventuellement aussi, le distributeur. Car essayer de concurrencer les grandes marques avec les marques distributeurs réduit leurs propres marges. Le problème est donc plus compliqué que ce que notre débat peut laisser entendre.

Sur la notion de « prix juste », ce devrait être celui qui apporte le plus de protection à celui qui en a le plus besoin. Je ne voudrais pas parler comme un homme politique, ce que je ne suis pas. Mais il est évident que tous nos efforts devraient tendre à préserver surtout ces petits et moyens producteurs qui se trouvent dans une position de faiblesse relative devant les grandes marques ou les centrales d'achat. Le prix juste est celui qui permet à quelqu'un de rester sur le marché en ayant l'assurance d'un retour minimum.

Vous poussez le juriste que je suis à réfléchir à ce que peut être un prix juste. Je réfléchirai à une définition plus exacte pour la prochaine fois, mais j'imagine qu'un prix juste est celui qui permet d'arrêter les abus qui se produisent. Pour l'heure, je suis désolé de ne pas être plus précis que je ne le peux.

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