Je citerai, madame la présidente, certains de vos propos lors de votre précédente audition par notre commission : « S'agissant de France 4, la chaîne dédiée au jeune public, je vous l'ai dit, nous serons les premiers à basculer au numérique ; nous allons dans le sens de l'histoire. Si, en France, les enfants regardent encore la télévision traditionnelle, dans d'autres pays où les GAFAN sont bien plus présents, ils ont complètement basculé sur le numérique […]. À quel moment allons-nous basculer ? Le Gouvernement a décidé de l'arrêt de France 4 et de France Ô en 2020, ce qui nous laisse du temps pour dessiner cette nouvelle offre numérique, qui ne part pas de rien, puisque nous avons déjà des plateformes que nous allons redéfinir. »
Un jour, certes, il n'y aura plus que le numérique, mais le timing est très important, et les autres pays n'ont pas basculé leur offre pour enfants sur le tout numérique. Pour ce qui est de la BBC, on fait une confusion systématique entre la chaîne « jeunes adultes » et la chaîne « enfants » ; de plus, les audiences se sont évidemment écroulées au moment du basculement. Alors, répondrez-vous favorablement à ce qu'ont demandé de nombreux auteurs et producteurs – attendre la couverture numérique totale du territoire en haut débit pour ne pas fragiliser l'égalité territoriale, et ensuite attendre d'avoir un service performant puisque les offres Netflix, Disney et autres arrivent avec des moyens considérables, au moment où, de plus, M6 rachète une chaîne hertzienne pour enfants ?
De même, vous ne pouvez nous dire que l'audience de Soir 3, assez significative puisqu'elle oscille entre 600 000 et 1,5 million de spectateurs, ne va pas chuter considérablement en passant sur Franceinfo. Je partage le point de vue de ma collègue Elsa Faucillon sur ce que représente cette offre en matière de proximité, alors que vous nous parlez de « complémentarité » et d'« identité » des chaînes – tout en supprimant France 4 et France Ô, d'ailleurs.
Enfin, l'Autorité de la concurrence met à mal le projet Salto de plateforme française de vidéo à la demande par abonnement voulue par France Télévisions, TF1 et M6, en demandant que 40 % de l'offre proposée ne puisse provenir des trois groupes cités. Vous devrez donc acheter des contenus ; avec un budget de 50 millions d'euros sur trois ans, cela n'a rien d'évident. Les flux des chaînes TNT, en direct ou en replay, devront aussi être rémunérés, et vous devrez limiter vos exclusivités. Tout ce qui faisait la force d'une plateforme n'est donc plus. Et puisque vous m'avez citée, car c'est moi qui, dans mon rapport, avais parlé de risque de catastrophe industrielle, je continue de penser qu'à l'heure d'économies importantes, renforcer la production interne, qui coûte 30 % plus cher, est un choix complètement disproportionné à l'audience.