Jean-Christophe Niel vous a dressé un panorama des activités de l'IRSN.
Je voudrais d'abord vous remercier de nous recevoir. Je voudrais vous dire également que 2018 a vu le renouvellement du Conseil d'administration de l'IRSN. J'ai eu l'honneur d'en être nommée Présidente. J'assure depuis quelques mois cette fonction et j'ai pu mesurer la richesse et la complexité des enjeux qui s'imposent à l'IRSN. Il s'agit d'enjeux à court terme, d'enjeux à moyen terme, et à plus long terme également.
J'en vois essentiellement cinq.
Tout d'abord, il y a l'enjeu lié à la recherche, au fait, en particulier, que la recherche a une part dans le budget total de l'IRSN qui a un peu diminué au cours des années précédentes, qui se situe actuellement un petit peu en dessous de 40 %. L'objectif sera justement de développer une politique de recherche ambitieuse afin d'assurer la crédibilité et l'indépendance de jugement qui sont les garants de l'excellence de l'expertise.
L'IRSN a été, pour sa partie recherche, évalué par l'Hcéres.
Les récentes recommandations de l'Hcéres contribuent à renforcer l'orientation stratégique de recherche de l'Institut. Un élément important sera de densifier les partenariats de recherche, en particulier avec le monde universitaire.
Un deuxième enjeu très important est celui de l'expertise, avec des besoins croissants, dans des délais assez contraints. Ces besoins croissants sont liés notamment aux nouvelles installations type EPR, au retour d'expérience de Fukushima, et aux modifications du parc nucléaire en lien avec ce retour d'expérience. Ils sont liés également à la prolongation d'activité de certains types de réacteurs nucléaires et au projet Cigéo. Il en va de même pour les enjeux qui sont liés à la sécurité des installations nucléaires, au transport des matières radioactives, avec notamment des questions sur la cybersécurité et sur la protection contre la malveillance. Enfin, le stockage des déchets radioactifs de haute activité, à moyenne et longue vie, impose des recours à l'expertise non seulement nucléaire, mais également des besoins d'expertise géologique, voire éthique, compte tenu de la durée de vie de ces déchets.
Le troisième élément concerne la radioprotection médicale, avec un usage croissant des rayons X dans le monde médical, à la fois pour le diagnostic, mais également (et c'est nouveau et cela se développe beaucoup) pour la partie thérapeutique. En effet, on observe une multiplication des actes de radiologie, pour avoir des examens plus rapides, plus précis aussi, pour améliorer la fluidité de prise en charge des patients.
Mais ceci est au prix souvent d'un recours à un scanner, qui est un examen irradiant. On observe également de plus en plus d'examens de contrôle qui sont prescrits dans des maladies qui sont devenues plus chroniques (heureusement, comme certains cancers, que l'on soigne mieux), et qui imposent des recours à des techniques irradiantes.
Enfin, le développement de la radiologie interventionnelle est un secteur potentiellement à risque. Elle a évidemment tous ses avantages, en termes de bénéfices pour le patient. On évite certaines interventions chirurgicales, on raccourcit les hospitalisations, mais au prix d'examens qui sont souvent longs et avec des irradiations qui peuvent être importantes, à la fois pour les patients et pour les opérateurs.
La radiothérapie fait également beaucoup de progrès avec des faisceaux qui sont de plus en plus précis, mais qui sont à des doses importantes au coeur des lésions, et qui nécessitent des personnels très vigilants et très bien formés.
Ensuite, le quatrième enjeu est celui de l'attractivité de l'IRSN lors des recrutements (principalement de jeunes ingénieurs) qui se font dans un contexte concurrentiel de reprise économique. Il nous impose évidemment de réfléchir à des parcours professionnels attractifs, à la valorisation de notre activité de recherche, à la promotion de notre savoir-faire.
Enfin, le dernier enjeu important est celui du dialogue avec la société civile, de l'ouverture à la société civile. Il s'agit de répondre ainsi à une demande importante, évidente, des citoyens pour un accès à la formation, pour un partage d'informations, pour un partage des connaissances et même une demande de participation aux décisions, d'influence sur les décisions.
La poursuite d'une politique volontariste de partage des connaissances est essentielle. Elle contribue également à la vigilance au risque. Elle contribue en outre à l'évaluation des risques, à la fois nucléaires et radiologiques, afin que leur gestion soit la plus appropriée et la plus transparente possible.
L'IRSN a signé le 10 janvier 2019 un contrat d'objectifs et de performance 2019-2023 avec les tutelles. C'est un engagement réciproque des tutelles et de l'IRSN. Il fixe le cap de l'action pour les années à venir. Il a permis de consolider les engagements de l'Institut dans la gouvernance du risque nucléaire et radiologique.
Depuis les quelques mois que j'exerce cette présidence, j'ai retrouvé à l'IRSN des valeurs qui sont les miennes, qui l'ont été au cours de ma carrière dans les hôpitaux publics : tout d'abord, la valeur de l'expertise collective, qui progresse grâce au travail et à la mobilisation d'acteurs issus de spécialités différentes dans les hôpitaux (par exemple dans les réunions de concertation pluridisciplinaires) et d'experts venus d'horizons différents, de chercheurs, d'experts, au sein de l'IRSN.
La deuxième valeur, c'est l'importance de la recherche qui est gage de progrès, qui nous invite à explorer des voies nouvelles, à remettre en cause des dogmes. Ce sera vraiment notre responsabilité de continuer à développer une recherche ambitieuse et de densifier les partenariats.
En matière de transparence et d'ouverture à la société, des efforts sont également effectués dans la pratique quotidienne médicale, avec le dispositif d'annonce de maladies, la nécessité des dialogues avec la famille.
L'IRSN, un peu de la même manière, a désormais cette politique volontariste d'ouverture à la société, de dialogue avec les associations, avec les riverains des centrales, avec les jeunes en particulier.
L'ouverture concerne aussi l'international pour faire rayonner le savoir-faire des équipes françaises, pour tisser des liens qui peuvent être utiles dans l'avenir, et bénéficier aussi d'expériences internationales étrangères qui peuvent être légèrement différentes.
Je pense que, dans les mois à venir, nous allons attacher une importance particulière à la pédagogie de l'action, avec cette politique d'orientation. La place du comité d'orientation des recherches (le COR) a été soulignée et renforcée dans un décret, celui du 10 mars 2016. Il permet de conseiller le Conseil d'administration sur les questionnements de recherche. Notre préoccupation est vraiment d'être à l'écoute de tous.
En tant qu'expert du risque public radiologique et nucléaire, nous souhaitons anticiper. Nous souhaitons maintenir l'excellence de l'institution, son indépendance complète (ceci est très important) et le partage évidemment, qui sont les axes cardinaux de notre action.
Nous avons essayé de vous présenter de manière la plus synthétique possible ce qu'est l'IRSN. Nous sommes maintenant disponibles pour répondre à vos questions.