En première lecture, nous avons travaillé sur trois points : le pourquoi, le comment et le suivi. J'ai du mal à comprendre que l'on puisse nous dire qu'il manque une trajectoire dans ce texte. On peut ne pas être d'accord avec celle que nous proposons, mais elle existe, puisque nous avons identifié un point de départ et un point d'arrivée.
Le point de départ, c'est le constat de l'impact sanitaire de la pollution atmosphérique de proximité, d'une part, et les problèmes liés aux émissions de CO2, d'autre part. Les constructeurs commencent à imaginer des solutions, des métropoles et des agglomérations s'engagent également, en créant des zones à faibles émissions, et l'exigence sociétale en la matière est de plus en plus forte.
Le point d'arrivée, c'est la neutralité carbone en 2050, qui ne concerne pas que les transports, mais à laquelle les transports doivent contribuer. Pour y parvenir, nous avons défini plusieurs étapes : les objectifs européens fixés pour 2030 et la fin de la vente des véhicules fonctionnant au diesel et à l'essence en 2040. Il y a donc bien une trajectoire.
Contrairement à la loi de 2015, qui ne concernait que les flottes publiques, le présent projet de loi fixe des objectifs de verdissement pour les flottes privées, comme pour les flottes publiques. En 2030, c'est 50 % de l'ensemble des flottes de véhicules, privées et publiques – ou captives – qui devront être à faibles, voire à très faibles émissions. Je répète qu'il s'agit d'un seuil minimum : rien n'empêche les collectivités ou les entreprises qui le souhaitent d'aller au-delà.
Il y a donc bien une trajectoire, qui a le mérite d'être réaliste dans la mesure où elle est le fruit d'une discussion avec les acteurs concernés. Pour ma part, je pense que l'on assistera naturellement, entre 2030 et 2035, à la fin des véhicules 100 % diesel et 100 % essence. Il restera à régler la question des hybrides, à l'horizon 2040.
Enfin, nous avons inscrit dans la loi le principe d'un suivi obligatoire tous les cinq ans par l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), qui réunit les deux chambres du Parlement. Un débat aura lieu sur ces questions en séance publique, à l'Assemblée nationale comme au Sénat : il me semble qu'on ne pourrait pas mieux prendre en compte les représentants du peuple. Nous pourrons, à l'occasion de ces débats, décider d'une éventuelle évolution de notre trajectoire.
Il est certains sujets sur lesquels on ne peut pas se prononcer aujourd'hui. C'est, par exemple, le cas de l'hydrogène, sur lequel il existe un groupe d'études à l'Assemblée nationale, coprésidé par M. Gérard Menuel, ici présent, et dont je suis moi-même vice-président. En tant que chimiste, je fais partie des gens qui pensent que l'hydrogène est une solution intéressante, mais je suis incapable de dire s'il sera le pétrole du XXIe siècle. On peut l'espérer, le supposer, l'imaginer, mais on ne peut pas l'affirmer. Nous nous apercevrons peut-être, dans dix ans, que nous sommes prêts à produire massivement des véhicules à hydrogène, que ce soit pour la mobilité lourde ou pour la mobilité légère. Mais peut-être en sera-t-il autrement. C'est parce que nous n'avons pas de certitudes sur ces questions que nous avons prévu une évaluation régulière, qui doit nous permettre d'ajuster notre trajectoire, si c'est nécessaire. Nous devons embarquer toute la nouvelle génération dans cette aventure, notamment les constructeurs.
Pour finir, je veux souligner que la trajectoire de verdissement des flottes dans les collectivités et les entreprises va créer un stock de véhicules d'occasion. Je rappelle que 50 % des véhicules neufs qui sont achetés aujourd'hui le sont par des entreprises ou par des collectivités, et non par des particuliers. Nos concitoyens trouveront donc, sur le marché de l'occasion, de plus en plus de véhicules à faibles émissions et ils abandonneront peu à peu leurs anciens véhicules à essence, diesel et hybrides. Tout cela se fera progressivement, selon une trajectoire à la fois ambitieuse et réaliste, qui devrait faire diminuer à la fois la pollution de proximité et les émissions de CO2 – ce qui était bien notre objectif de départ.