Intervention de Dominique Potier

Séance en hémicycle du mardi 10 septembre 2019 à 15h00
Mobilités — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Potier :

Je l'avais dit en première lecture et je ne vais pas me dédire aujourd'hui : la critique des membres du groupe Socialistes et apparentés sera surtout en creux. Quand on est socialiste, il faudrait être un peu Tartuffe, après cinq ans d'exercice du pouvoir, pour vous reprocher de ne pas avoir fait la grande loi sur les mobilités du XXIe siècle, décarbonée et réduisant les inégalités. Nous ne l'avons pas vraiment faite nous-mêmes, bien que nous ayons agi dans ce sens. Néanmoins, rien ne nous empêche de dire que le texte n'est pas à la hauteur des ambitions liées au changement climatique et à la fracture sociale dans nos territoires.

Ne ferons une critique en creux car, comme Christophe Bouillon, Jean-Louis Bricout et d'autres, j'ai dit que ce texte contenait des innovations que nous avons soutenues. Nous pouvons en critiquer les modalités mais, dans leur esprit, elles participent à la modernité. Il faudrait être de mauvaise foi pour ne pas reconnaître la somme des innovations relatives à la gouvernance, à la réglementation, à l'adaptation à la modernité et aux défis technologiques, à l'accompagnement de phénomènes nouveaux dans la société. Nous reconnaissons qu'il s'agit là de points positifs.

Nous faisons avec humilité une critique en creux qui porte sur tout ce qu'aurait pu et dû être cette loi, compte tenu des deux ans écoulés depuis votre arrivée au pouvoir et des quelques années durant lesquelles nous l'avons nous-mêmes exercé.

Cette loi aurait pu redonner sa place à l'État, à la puissance publique, dans la création des infrastructures du XXIe siècle. Nous avons un débat sur les différents scénarios concernant les investissements pour les infrastructures du futur. Le Gouvernement vise le scénario no 2 mais il lui manque quelques centaines de millions d'euros pour le réaliser. Quant au scénario no 3, il ouvre des perspectives en matière de fret ferroviaire et fluvial, et nous inscrit vraiment dans une économie décarbonée.

Dans ce contexte de crise climatique du XXIe siècle, il aurait été ambitieux de viser le scénario no 3 pour le niveau d'équipement en infrastructures. Un tel texte aurait plus profondément remis en cause les mécanismes économiques qui génèrent la pollution carbone et les embouteillages multiples dont souffre notre pays.

Il aurait, par exemple, permis l'adoption d'amendements que nous avons défendus et qui, malheureusement sont passés à la trappe de l'irrecevabilité ou de l'entonnoir législatif. L'un d'eux était fondé sur l'interdiction de vendre un produit pour lequel il n'y a aucune prise en compte du coût de transport et qui n'obéit qu'à une compétition low cost internationale. Actuellement, des commerçants peuvent vendre un produit en faisant payer au producteur, donc indirectement au consommateur, un coût de transport totalement effacé.

Lors des débats sur la loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible, dite EGALIM, nous avons défendu l'idée que nous devions prendre en compte les coûts réels, qu'il en allait de la reconnaissance de leur impact environnemental ou de la dignité des personnes qui travaillent. Pour ce texte, nous aurions pu admettre le principe qu'aucune marchandise ne pourrait être « dé-transportée » symboliquement et monétairement, parce que cela repose sur un mensonge qui nous place dans une mauvaise économie destructrice des valeurs humaines et communes.

Le sénateur Olivier Jacquin avait promu une autre idée : reporter la taxation carbone, en matière de marchandises, sur les chargeurs et non pas sur les transporteurs, ce qui traduirait un total changement de paradigme. Dans ce cas, il reviendrait aux chargeurs de choisir les hypothèses les plus intéressantes. Une autre histoire économique pourrait s'écrire…

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