– Je souscris complètement à ce qui vient d'être dit au sujet des batteries. Nous nous rejoignons. En passant au lithium tout solide, nous pouvons attendre 30 à 40 % d'autonomie en plus, et c'est vrai que cela va se jouer sur les matériaux.
Pour moi, le sujet des SHS est essentiel. Nous sommes en train de mener cette réflexion à la direction du CEA. C'est très bien d'avoir une vision de l'énergie panoramique, mais il s'agit de créer des technologies qui doivent être déployées et concerner le grand public. L'idée est de pouvoir constituer des alliances avec des grandes équipes françaises sur ces sujets. Cela pose la question d'une synchronisation de l'ensemble des outils de l'État. Aujourd'hui, nous avons beaucoup parlé de l'ADEME, qui est essentielle dans le déploiement des nouvelles technologies de l'énergie, mais je pense qu'il faudrait pouvoir synchroniser également les « guichets » de financement, notamment l'ANR, pour faire en sorte que les grands sujets s'inscrivent dans les priorités nationales.
Pour moi, évidemment, l'idée n'est pas d'être « techno push », mais de cultiver une vision systémique, et de ne pas juxtaposer des technologies qui finalement ne trouveront pas de débouchés, mais au contraire de chercher des solutions. Pour ce faire, un point fondamental consiste à sortir les technologies le plus vite possible des laboratoires, même si ce n'est pas toujours facile. Le TIGA cité tout à l'heure est un bon exemple, parce qu'il faut que la synchronisation se fasse finalement à ce niveau-là, et que les données collectées au moment où l'on déploie les premières technologies industrielles puissent revenir également au niveau de la R&D. Ainsi, nous pourrons ensemble réajuster le tir si nous sentons que les technologies ne sont pas appropriées, et développer les bons outils de modélisation pour enrichir la vision systémique. Pour moi, cette synchronisation est importante : aujourd'hui, le Liten dépense à peu près 20 millions d'euros pour des projets pour l'Europe. C'est plutôt un projet en croissance budgétaire. En revanche, sur les énergies renouvelables, nous sommes plutôt en décroissance au Liten, notamment sur les sujets liés aux financements de l'ANR. La conséquence immédiate est que nous travaillons plus avec le laboratoire européen qu'avec le laboratoire français.
Pour illustrer le sujet essentiel de l'ACV, je souscris à l'idée qu'il faut des référentiels communs pour pouvoir procéder à des comparaisons. Sinon, nous n'arriverons à rien. Concernant les méthodes, il faut tout simplement partir dès le départ sur des matériaux, sur des familles, qui vont être moins dépendantes des métaux rares par exemple. Il faudra intégrer les procédures de démantèlement de composants dès que nous les concevons. Concrètement, aujourd'hui, quand nous élaborons un module ou un pack sur une batterie, les équipes du CEA réfléchissent à la façon de les assembler pour gagner du temps, et aussi d'être beaucoup plus efficace lorsqu'il s'agira de la démanteler. Ensuite, nous imaginons des secondes vies, ce qui n'est pas un sujet très facile car il faudra récupérer le gisement, le qualifier et ensuite le reconditionner. Il y a toute une philosophie à mettre en place pour encadrer l'ensemble de ces développements, pour rendre les choses plus démontables, pourquoi pas réutilisables, et en tout cas délibérément recyclables.
Un dernier point au sujet des biocarburants et carburants de synthèse : l'IFPEN, qui développe beaucoup de R&D, dans ce domaine n'est pas présent aujourd'hui dans cette audition, mais côté CEA, nous abordons ce sujet essentiellement autour de la molécule d'hydrogène. Aujourd'hui, dans la mécanique moléculaire que nous pouvons imaginer, si l'hydrogène rencontre du CO2 émis, nous pouvons ouvrir une vraie voie de valorisation de molécules (du méthane, du méthanol, etc.) Le sujet de cette utilisation du carbone est en train de monter en puissance en France et en Europe.