Les deux propositions de loi soumises à notre examen, dont l'objet est de clarifier certaines dispositions du code électoral, découlent de la volonté du sénateur Alain Richard de traduire dans la loi certaines recommandations formulées par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 21 février 2019 relative au déroulement des dernières élections législatives.
Cette initiative parlementaire – que je salue – apporte des correctifs ou des aménagements à certaines règles relatives à deux grandes thématiques : le financement des campagnes électorales et la propagande.
Je tiens à souligner dès à présent que nous nous sommes efforcés, dans le cadre des travaux de la commission, de conserver les apports du Sénat qui nous semblaient bienvenus et de proposer des rédactions de compromis pour ceux qui pouvaient soulever des débats. À ce titre, il me semble que nous avons eu des discussions très constructives et que les textes adoptés par la commission traduisent un consensus assez large au sein des différents groupes qui la composent – mais je laisserai leurs orateurs s'exprimer sur ce point.
Ce constat témoigne à la fois de l'intérêt que nous portons, en tant qu'élus, à cette matière si particulière qu'est le droit électoral, et des difficultés que nombre d'entre nous ont rencontrées, à titre personnel ou non, pour appliquer une règle de propagande, réunir des financements ou imputer une dépense.
Plus fondamentalement encore, nos discussions ont illustré notre souhait commun, quelles que soient nos sensibilités, de garantir à tous les candidats les meilleures conditions pour mener une campagne électorale – il y va de la vitalité de notre démocratie – et d'offrir aux citoyens l'information la plus complète et la plus juste possible sur les choix qui s'offrent à eux dans le cadre d'une élection, dans un souci de transparence et d'exemplarité de notre République.
Des règles claires profitent à tous et à toutes, et nous faisons oeuvre utile en nous inscrivant dans la continuité des travaux du Sénat en la matière. Dans ce contexte, je rappellerai brièvement les décisions prises par la commission, en dehors des modifications rédactionnelles ou de précision apportées aux textes.
L'article 1er A, qui permet désormais aux candidats et aux partis politiques de recueillir des dons par le biais de plateformes de paiement en ligne, a été adopté sous réserve de modifications mineures – nous poursuivrons ultérieurement les échanges sur cet article. Cette disposition permet de traduire une évolution des pratiques et des outils auxquels les candidats peuvent avoir recours pour financer une campagne. Toutefois, certains commissaires des lois se sont interrogés sur le contenu du décret devant préciser les modalités de traçabilité des opérations financières ainsi effectuées et la fiabilité de la qualité de personnes physiques des donateurs. Je pense, monsieur le ministre, que vous pourrez leur apporter des éléments de réponse sur ce point au cours de nos débats.
L'article 1er propose plusieurs mesures de simplification pour les candidats, dont une dispense de recourir à un expert-comptable pour tous ceux n'ayant pas atteint 5 % des suffrages exprimés et dont les dépenses sont inférieures à un plafond fixé par décret. La commission a considéré que cette disposition sera positive pour les petits candidats. Peut-être des précisions pourront-elles être apportées sur le montant envisagé par le décret que devra prendre le Gouvernement.
Les articles 1er bis et 1er ter sont de précision, tandis que l'article 3 bis concerne le délai de carence qui s'appliquera aux préfets et aux sous-préfets prenant leur retraite pour se présenter à des élections municipales dans le ressort de leur ancienne activité, comme cela est déjà prévu pour les autres élections. À ce propos, je vous proposerai un amendement, déjà évoqué en commission – notamment lors de mon intervention en discussion générale – , visant à porter le délai applicable aux sous-préfets, secrétaires de cabinet et secrétaires généraux de un à deux ans, pour mieux tenir compte de leur importante fonction de représentation dans certains territoires.
L'article 1er ter A, qui autorisait un candidat à régler directement des menues dépenses sans passer par le mandataire financier, a été supprimé. Les plafonds proposés, ainsi que l'appréciation de ces menues dépenses, posaient plusieurs difficultés qui nous ont conduits à renoncer à inscrire une telle disposition dans la loi. Les souplesses tolérées par le juge électoral et la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques – CNCCFP – ne sont toutefois pas remises en cause.
À l'article 2, a été supprimée une disposition invitant le juge à décider de la durée des peines d'inéligibilité prononcées en cas de fraude ou de manquement d'une particulière gravité aux règles relatives au financement des campagnes électorales, en tenant compte du calendrier électoral à venir. L'article 3, qui prévoyait une disposition identique en matière de fraude électorale, a également été supprimé, par coordination. Ces suppressions ont été décidées à l'unanimité.
Par cohérence avec l'article 4, un nouvel article 4 bis A a été adopté afin de fixer le terme de la campagne électorale à la veille du scrutin, à minuit. Pour toutes les élections, la campagne s'arrêtera donc le vendredi à 23 h 59. Cette clarification me semble particulièrement bienvenue, tant les questionnements sur ce point étaient constants, élection après élection.
À l'article 5, a été ouverte la faculté de faire figurer la photographie des candidats sur le bulletin de vote, tout en maintenant l'interdiction d'insérer la photographie de tierces personnes, ce qui va d'ailleurs dans le sens des recommandations formulées par le Conseil constitutionnel. À ce titre, je proposerai un amendement afin de limiter la possibilité de faire figurer le nom ou la photographie de tierces personnes aux seuls candidats pressentis pour présider l'organe délibérant des villes à secteurs, c'est-à-dire Paris, Lyon et Marseille. Je tiens ici à saluer la qualité des travaux menés sur cette question avec mes collègues Raphaël Schellenberger, Philippe Latombe et Christophe Euzet afin d'aboutir à la position de consensus qui vous sera présentée.
À l'article 5 bis A, l'imputation des coûts de nettoyage des affiches illégales ou collées illégalement sur le remboursement des dépenses de propagande électorale des candidats mis en cause et n'étant pas en mesure de prouver leur absence de responsabilité a été supprimée.
D'autres évolutions sont également souhaitables. Pour ce faire, j'ai notamment déposé un amendement prévoyant la mise en ligne de la liste des candidats sur le site des collectivités territoriales concernées par le scrutin, afin d'améliorer l'information dont bénéficient les électeurs. Pour les élections municipales, les villes publieraient ainsi sur leur site les professions de foi et affiches des candidats déclarés. J'ai également déposé un amendement afin de clarifier et d'assouplir la règle actuelle d'interdiction de la combinaison du bleu, du blanc et du rouge sur les affiches et circulaires électorales. Ces sujets méritent d'être discutés au sein de notre assemblée – j'espère que le Gouvernement pourra nous apporter des réponses en la matière.
Nous avons par ailleurs procédé aux coordinations nécessaires dans le cadre de la proposition de loi organique, pour tenir compte des votes intervenus concernant la proposition de loi ordinaire. Je considère ainsi, mes chers collègues, que nous sommes parvenus à un texte équilibré, très proche de celui du Sénat, qui nous permet de lever certaines interrogations et de résoudre des difficultés très concrètes rencontrées par les candidats dans le cadre des élections.
Je conclurai en saluant M. Christophe Euzet, qui a participé à mes côtés à l'ensemble des auditions, ainsi que les différentes personnalités auditionnées, qui nous ont permis d'aboutir à ce résultat.