Il n'est sans doute pas de matière juridique qui rassemble autant de spécialistes dans notre hémicycle que le droit électoral, puisque nous avons tous eu à en connaître de près pour accéder à la fonction de député que nous exerçons aujourd'hui. Nous en connaissons les enjeux et les points forts, mais nous savons aussi les difficultés que pose parfois sa lecture ou les incompréhensions que peut susciter l'interprétation de certaines rédactions, issues de corrections successives, parfois mal adaptées à l'évolution des modes de scrutin. La discussion de ces textes est donc bienvenue : il s'agit d'apporter un certain nombre de clarifications concernant des dispositions devenues désuètes ou, tout simplement, illisibles.
En préambule, je tiens à saluer l'esprit avec lequel le rapporteur a animé la discussion de ces textes, un esprit apaisé assorti de la volonté de trouver un consensus. Sur cette matière, très sensible pour tous, qui constitue le coeur de la démocratie, nous avons apprécié de travailler et d'échanger avec vous. Cette qualité d'échange est d'autant plus notable que la matière est, je l'ai dit, particulièrement sensible.
Nous discutons aujourd'hui non pas d'un grand soir du droit électoral, mais de quelques ajustements techniques, à la marge. De notre point de vue, le texte issu des travaux de la commission est bien meilleur que celui qui nous a été soumis par le Sénat, s'agissant d'un certain nombre de dispositions sur lesquelles je vais revenir.
Le groupe Les Républicains se réjouit particulièrement que l'impossibilité de procéder à un redécoupage électoral dans l'année qui précède le scrutin ait été inscrite dans la loi. C'était un usage ; cela devient une règle législative.
Nous nous réjouissons également des ajustements relatifs aux comptes de campagne. En particulier, on ne demandera plus aux petits candidats, une fois que l'on aura constaté leur score, de produire des justificatifs supplémentaires lorsque les mouvements financiers ont été peu importants, plus précisément lorsque sont réunies les conditions d'un faible niveau de don et d'un faible niveau de dépense.
Nous nous réjouissons aussi d'avoir pu revenir sur l'interdiction, que le Sénat avait voulu introduire, de faire figurer la photographie du ou des candidats sur les bulletins de vote. En effet, permettre aux candidats d'afficher l'ensemble des informations jusqu'au bulletin de vote nous semble participer de la lisibilité.
Nous nous réjouissons enfin de la modification de l'article relatif à l'affichage sauvage, grâce à un amendement du rapporteur adopté en commission. La rédaction du Sénat induisait une inversion de la charge de la preuve, qui aurait vraiment pu jouer au détriment des candidats – celles et ceux qui ont l'expérience des campagnes le savent : une forme de comportement frauduleux d'un candidat aurait pu faire peser sur le compte de campagne d'un autre candidat des charges financières que ce dernier n'aurait pas été en mesure de maîtriser.
Toutefois, il nous reste à débattre d'un certain nombre de questions.
Un premier point, qui n'a pas été tout à fait tranché en commission, concerne la coordination des décisions du juge de l'élection et le point de départ de la période d'inéligibilité. De notre point de vue, il n'y a pas d'accord entre nous pour faire évoluer les règles en la matière. Dès lors, il vaut mieux jouer la prudence, c'est-à-dire respecter le droit en vigueur et nous en tenir, in fine, à une forme de statu quo.
En outre, nous devons poursuivre la discussion à propos des noms pouvant figurer sur les bulletins de vote, même si nous sommes presque parvenus à un accord entre l'examen en commission et la séance – je tiens à saluer le travail du rapporteur à cet égard. Certes, la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République – NOTRe – a introduit un fléchage pour les élections communautaires, mais nous devons nous garder de changer la nature du scrutin départemental à l'occasion de la présente modification des règles électorales, dès lors que nous ne l'avons pas fait au moment de la réforme des modes de scrutin.
Nous sommes dans une démocratie représentative ; dans les cantons comme dans les communes, c'est aux représentants dont le nom figure sur le bulletin de vote que l'on confie le pouvoir de désigner d'autres représentants, en l'espèce l'exécutif de la collectivité. C'est bien dans cet ordre-là que les choses se passent, et il ne faut pas tromper l'électeur en lui laissant croire que cela pourrait être dans l'ordre inverse.
Je serai par ailleurs très attentif à la qualité de la rédaction des textes, car, en matière de droit électoral, c'est parfois la mauvaise qualité de l'écriture qui pose problème, …
Le 19/09/2019 à 21:54, Laïc1 a dit :
"Nous sommes dans une démocratie représentative ; dans les cantons comme dans les communes, c'est aux représentants dont le nom figure sur le bulletin de vote que l'on confie le pouvoir de désigner d'autres représentants, en l'espèce l'exécutif de la collectivité."
c'est bien, les représentants font leur vie de leur côté tandis que les citoyens font la leur ailleurs. Le peuple "élu" doit garder la prééminence sur le peuple non élu...
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